Tout commence durant la saison 2012/2013, par la « bousculade » en fin de match d’un arbitre de football par Léonardo, alors directeur sportif du PSG. Débute un processus disciplinaire auquel l’intéressé se plie pourtant, et qui aboutit à une décision du 3 juillet 2013 de la commission supérieure d’appel de la fédération française de football (FFF), laquelle le suspend jusqu’au 30 juin 2014 et demande l’extension de ladite sanction aux autres associations nationales membres de la Fédération Internationale de Football Association (FIFA).
En clair, cette sanction implique qu’il ne peut jouer (peu probable au vu de son âge), être présent sur le banc de touche, notamment, et assurer toutes fonctions officielles en France et partout dans le monde - sauf dans l’équipe du Vatican, du Tibet, de Zanzibar ou de la République turque de Chypre du Nord etc. qui ne sont pas membres de la FIFA- ceci tant que la sanction est en vigueur.
L’intéressé saisit le tribunal administratif, car les fédérations sportives accomplissent une mission de service public et bénéficient de prérogatives de puissance publique. Leurs décisions ont dès lors, un caractère administratif (CE 22 novembre 1974 FIFAS n° 89828). C’est ce caractère administratif qui rend possible la saisine du juge administratif pour toute contestation de la sélection d’un joueur au sein d’une équipe nationale, quelle que soit la discipline (CE 8 avril 2013 Fédération française des sports de glace n° 351735).
Léonardo saisit donc le juge des référés du tribunal administratif de Paris, d’une requête en référé suspension du 20 septembre 2013, visant la décision de la commission du 3 juillet 2003. Il soutient notamment, qu’il y a urgence à suspendre la décision attaquée car il lui est impossible de briguer des fonctions d’entraineur, de manager, de directeur sportif ou de sélectionneur tant qu’il reste sanctionné. D’autre part, qu’il existe un doute sérieux sur la légalité de ladite décision, car la FFF n’avait pas de pouvoir disciplinaire à son encontre, il disposait seulement d’une carte d’accès aux tribunes des stades, et n’avait jamais été licencié de la FFF depuis son arrivée au PSG en 2011.
La FFF soutient notamment de son côté, qu’aux termes de l’article 2 de ses règlements généraux, son pouvoir disciplinaire ne se limite pas aux seuls licenciés mais s’exerce aussi à l’égard du personnel des clubs, qu’il soit salarié ou non. Que « priver les fédérations sportives de tout pouvoir disciplinaire à l’encontre de personnes qui se sont délibérément abstenues de solliciter la délivrance d’une licence reviendrait à nier la réalité du lien qui unit ces personnes à la fédération ».
Dans son ordonnance du 15 octobre 2013 (n°1313375/9) le juge des référés du tribunal administratif de Paris, retient la condition d’urgence. Puis se fonde sur les dispositions de l’article R131-3 du code du sport et de son annexe I-6, en vertu desquelles « les organes de la FFF sont investis d’un pouvoir disciplinaire à l’encontre de ses membres qu’ils soient notamment joueurs ou dirigeants sous réserve qu’ils aient la qualité de licenciés de cette fédération », afin de retenir l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée.
Il estime pour suspendre l’exécution de la décision litigieuse, que Léonardo « n’était au demeurant pas titulaire d’une licence de dirigeant délivrée par la FFF, ni titulaire de la licence à un autre titre pendant toute la durée de ses fonctions de directeur sportif au Paris Saint-Germain football club […] lorsque les instances disciplinaires de la FFF ont statué sur sa situation ».
La FFF n’entendant pas se laisser faire, saisit le Conseil d’Etat en sa qualité de juge de cassation et demande l’annulation de cette ordonnance.
Il s’agissait pour le conseil, notamment, de déterminer l’étendue ou les limites du pouvoir de sanction de la FFF.
Il convient de relever ici, qu’aux termes de l’article L. 131-14 du code des sports : « Dans chaque discipline sportive et pour une durée déterminée, une seule fédération agrée reçoit délégation du ministre chargé des sports ». L’article L. 131-15 concède quant à lui la compétence de l’organisation de compétitions sportives aux fédérations délégataires, à l’issue desquelles sont délivrés les titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux. L’article L. 131-16 enfin, leur concède la compétence pour édicter les règles techniques propres à leur discipline.
Ainsi, le Conseil d’état, a, dans un considérant lapidaire de sa décision du 28 avril 2014 (CE 28 avril 2014 fédération française de football n°373051) rejeté le recours de la FFF en estimant : « qu’une fédération sportive agréée, qu’elle ait ou non reçu la délégation du ministre chargé des sports prévue à l’article L. 131-14, n’est habilitée à prononcer une sanction disciplinaire qu’à l’encontre des personnes qui, à la date à laquelle il est statué par l’organe disciplinaire compétent de la fédération, ont la qualité de licencié de cette fédération ; que, contrairement à ce que soutient la fédération française de football, les fédérations délégataires ne tiennent d’aucune disposition législative le pouvoir d’infliger une sanction disciplinaire à des personnes qui prendraient part, sans être licenciées, aux compétitions pour lesquelles elles ont reçu délégation » .
Score final : Léonardo 2/ FFF 0.
Calvin Job