Dans un arrêt du 9 janvier 2019 (17-20568), la Cour de cassation rappelle qu’une qualification exacte doit être donnée aux licenciements.
La Cour de cassation a précisé à de nombreuses reprises que "l’insuffisance professionnelle ne constitue pas une faute."
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Madame X a été engagée par la société Calyon le 11 février 2015 en qualité de chargée de relation ; le 30 mai 2011, elle a été licenciée pour insuffisance professionnelle.
La lettre de licenciement fait état de divers manquements de la salariée, notamment son opposition permanente aux instructions de sa hiérarchie et son désaccord manifesté à l’égard de la politique de l’entreprise.
Elle a contesté son licenciement en justice.
Les juges prud’homaux ont affirmé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse.
Les juges d’appel ont confirmé le jugement aux motifs que les dits manquements rejaillissaient sur le bon fonctionnement de l’entreprise « et ce d’autant plus qu’elle occupait un poste de cadre hors classification et que son comportement avait, de ce fait, des conséquences rapidement délétères sur l’ensemble de l’équipe ce qui était constitutif d’une insuffisance professionnelle ».
La salariée s’est pourvue en cassation.
1) Solution de l’arrêt.
La Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Versailles et affirme : « alors qu’il résultait de ses constatations qu’il était fait grief à la salariée d’avoir refusé de manière presque systématique de se soumettre aux directives de son responsable hiérarchique, d’avoir refusé de serrer la main de son supérieur et convoquée à son bureau , refusé de s’asseoir, d’avoir critiqué la politique managériale et de s’être opposée, parfois de manière virulente, à son responsable, ce dont il résultait que le licenciement avait été prononcé pour des motifs disciplinaires, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».
2) Analyse : distinction du licenciement pour insuffisance professionnelle et pour faute disciplinaire
L’insuffisance professionnelle peut justifier un licenciement, mais ce licenciement ne peut pas être disciplinaire.
Dans l’arrêt d’espèce, c’est le contraire.
En effet, selon la Haute juridiction, les faits reprochés à la salariée auraient dû mener à un licenciement pour un motif disciplinaire (et non pour insuffisance professionnelle).
Cela explique pourquoi la Cour de cassation a censuré la décision des juges du fonds, qui avaient validé la qualification de licenciement pour insuffisance professionnelle.
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La distinction de la faute disciplinaire et de l’insuffisance professionnelle est délicate : toutes deux se manifestent par une mauvaise exécution du contrat de travail.
Le critère permettant de distinguer les deux notions (faute et insuffisance professionnelle) se situe dans l’état d’esprit du salarié.
L’insuffisance professionnelle du salarié se manifeste lorsqu’il ne parvient pas à effectuer correctement son travail, alors même qu’il fait preuve de bonne volonté.
Au contraire, la faute disciplinaire nécessite que le caractère défectueux découle de la mauvaise volonté délibérée du salarié.
Attention, la faute n’a pas à être intentionnelle pour être caractérisée (le salarié ne doit pas forcément avoir recherché la production d’un dommage) : la faute doit être volontaire.
Ainsi, lorsque les erreurs commises par le salarié ne relèvent pas d’une mauvaise volonté délibérée mais bien de son insuffisance professionnelle, elles peuvent constituer une faute grave le privant de préavis et d’indemnité de licenciement (Soc. 31 mars 1998, n° 95-45 639).
La distinction entre ces deux notions est également importante car les conséquences ne sont pas les mêmes : une faute grave entraîne l’application des procédures disciplinaire.
La Cour de cassation a précisé à de nombreuses reprises que « l’insuffisance professionnelle […] ne constitue pas une faute » (Soc. 17 févr. 2004, n° 01-45643, Soc. 9 mai 2000, n°97-45163).
Source : C. cass. 9 janvier 2019, 17-20568
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Frédéric CHHUM, Avocat à la Cour et Membre du Conseil de l’ordre des avocats de Paris
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