Cette procédure disciplinaire simplifiée est une « CRPC disciplinaire ».
Elle ne s’applique que pour les manquements disciplinaires des avocats les moins graves.
La procédure disciplinaire simplifiée s'applique aux procédures disciplinaires engagées et aux réclamations reçues postérieurement au 30 janvier 2025.
Elle permettra de rendre une justice disciplinaire plus rapide.
Nous présenterons successivement :
- Mise en œuvre de la procédure disciplinaire simplifiée par le bâtonnier de l’ordre
- Sanctions et peines complémentaires pouvant donner lieu à la procédure disciplinaire simplifiée ;
- Convocation de l’avocat poursuivi par le Bâtonnier de l’ordre et proposition de sanctions ;
- Notification de la proposition de sanction à l’avocat poursuivi ;
- Délai de 15 jours pour l’avocat poursuivi d’accepter et ou de refuser la proposition de sanction ;
- Acceptation par l’avocat poursuivi de la proposition de sanction ;
- Homologation ou refus d’homologation par la juridiction disciplinaire de la proposition de sanction ;
- Recours contre la décision d’homologation dans un délai de 15 jours ; Droit d’opposition du procureur général dans un délai de 15 jours ;
- Refus par l’avocat poursuivi de la proposition de sanction ;
- Echec de la procédure disciplinaire simplifiée.
La procédure disciplinaire simplifiée (Articles 187-2 à 187-6 du décret du 27 novembre 1991) se distingue désormais de la procédure disciplinaire ordinaire (Articles 188 à 199 du décret du 27 novembre 1991).
1) Mise en œuvre de la procédure disciplinaire simplifiée par le bâtonnier de l’ordre
Le bâtonnier de l'ordre peut décider de mettre en œuvre la procédure disciplinaire simplifiée, sauf lorsque la poursuite disciplinaire fait suite à une réclamation présentée par un client ou d’un tiers ou lorsque l'avocat poursuivi a fait l'objet d'une peine d'interdiction temporaire d'exercice assortie en tout ou partie du sursis pour son exécution dans les cinq années qui précèdent.
La procédure disciplinaire est mise en œuvre par le bâtonnier de l’ordre (et non par la juridiction disciplinaire).
Cela va donc augmenter le travail du bâtonnier.
Toutefois, en pratique, cela peut être une bonne chose car cela permettra au bâtonnier de voir l’avocat poursuivi et de le « recadrer ».
2) Sanctions et peines complémentaires pouvant donner lieu à la procédure disciplinaire simplifiée
La procédure disciplinaire simplifiée ne peut donner lieu :
. qu'aux sanctions d’avertissement ou de blâme,
. aux peines complémentaires :
. de publicité du dispositif et de tout ou partie des motifs de la décision, dans le respect de l'anonymat des tiers ;
. d’interdiction temporaire, et ce quel que soit le mode d'exercice, de conclure un nouveau contrat de collaboration ou un nouveau contrat de stage avec un élève-avocat, et d'encadrer un nouveau collaborateur ou un nouvel élève-avocat, pour une durée maximale de trois ans, ou en cas de récidive une durée maximale de cinq ans ;
. et d’une formation complémentaire en déontologie dans le cadre de la formation continue, ne pouvant excéder 20 heures sur une période de deux ans maximum à compter du caractère définitif de la sanction prononcée (article 187-2 du décret 27 novembre 1991).
La procédure disciplinaire n’est pas applicable aux manquements disciplinaires les plus graves et notamment ceux entrainant une interdiction temporaire d’exercice ou la radiation du tableau ou encore le retrait de l’honorariat.
3) Convocation de l’avocat poursuivi par le Bâtonnier de l’ordre et proposition de sanctions
Le bâtonnier de l'ordre, après avoir convoqué l'avocat poursuivi pour l'entendre, assisté le cas échéant par son conseil, lui propose l'une des sanctions (avertissement ou blâme) (article 187-3 du décret 27 novembre 1991) (cf § 1.2 supra).
4) Notification de la proposition de sanction à l’avocat poursuivi
La proposition de sanction, notifiée à l'avocat poursuivi par tout moyen conférant date certaine à sa réception, contient l'indication détaillée des faits reprochés accompagnée des pièces et la motivation de la proposition de sanction (article 187-3 du décret 27 novembre 1991).
5) Délai de 15 jours pour l’avocat poursuivi d’accepter et ou de refuser la proposition de sanction
L'avocat poursuivi dispose d'un délai de quinze jours pour soit reconnaître les faits qui lui sont reprochés et accepter la proposition de sanction, soit refuser cette proposition par tout moyen conférant date certaine à sa réception.
L'absence de réponse de l'avocat poursuivi dans ce délai vaut refus de la proposition de sanction.
6) Acceptation par l’avocat poursuivi de la proposition de sanction
En cas d'acceptation par l'avocat poursuivi de la proposition de sanction, le bâtonnier saisit dans le délai de quinze jours la juridiction disciplinaire aux fins d'homologation.
Il lui transmet une copie du dossier contenant la notification de la proposition de sanction ainsi que son acceptation par l'avocat poursuivi (article 187-4 du décret 27 novembre 1991).
7) Homologation ou refus d’homologation par la juridiction disciplinaire de la proposition de sanction
La juridiction disciplinaire statue dans les meilleurs délais, le cas échéant en formation restreinte, pour homologuer ou refuser d'homologuer la proposition de sanction.
La décision d'homologuer la proposition de sanction est motivée par les constatations, d'une part, que l'avocat poursuivi reconnaît les faits qui lui sont reprochés et accepte la proposition de sanction et, d'autre part, que les sanctions proposées sont justifiées au regard des circonstances des faits et du comportement de leur auteur (article 187-4, alinéa 2 du décret 27 novembre 1991).
Outre les cas dans lesquels les conditions prévues à la phrase précédente ne sont pas remplies, la juridiction disciplinaire peut refuser d'homologuer au motif que la nature des faits, le comportement de l'avocat poursuivi, le cas échéant la situation de l'avocat auteur de la réclamation ou les intérêts de la profession justifient une procédure disciplinaire ordinaire.
La juridiction notifie sa décision ainsi que les pièces du dossier, par tout moyen conférant date certaine à sa réception, à l'avocat poursuivi, au bâtonnier, au procureur général et, le cas échéant, à l'avocat auteur de la réclamation (article 187-4, al. 2 du décret 27 novembre 1991).
8) Recours contre la décision d’homologation dans un délai de 15 jours
L'avocat poursuivi dispose d'un délai de quinze jours pour former un recours à l'encontre de la décision d'homologation dans les conditions prévues à l'article 188-2 (article 187-4, alinéa 3 du décret 27 novembre 1991).
9) Droit d’opposition du procureur général dans un délai de 15 jours
Le procureur général dispose d'un délai de quinze jours pour s'opposer à la décision d'homologation.
L'opposition est notifiée à la juridiction disciplinaire par tout moyen conférant date certaine à sa réception.
Copie de cette opposition est adressée au bâtonnier, à l'avocat poursuivi et, le cas échéant, à l'avocat auteur de la réclamation.
En cas d'opposition, la décision d'homologation est non avenue.
En l'absence d'opposition du procureur général et de recours de l'avocat poursuivi, la décision devient définitive. La juridiction disciplinaire en informe l'avocat poursuivi, le bâtonnier et, le cas échéant, l'avocat auteur de la réclamation. La décision est versée au dossier personnel de l'avocat poursuivi tenu par l'ordre dont il relève.
10) Refus par l’avocat poursuivi de la proposition de sanction
En cas de refus par l'avocat poursuivi de la proposition de sanction, le bâtonnier peut poursuivre la procédure simplifiée.
Dans ce cas, il convoque l'avocat poursuivi, assisté le cas échéant par son conseil, lui transmet la copie du dossier disciplinaire constitué avant la proposition de sanction et procède à son audition (Art. 187-5 du décret 27 novembre 1991).
Le bâtonnier transmet le dossier et le procès-verbal d'audition de l'avocat poursuivi au président de la juridiction disciplinaire, et, à Paris, au bâtonnier doyen, membre du conseil de l'ordre, ou, s'il est empêché, au plus ancien bâtonnier, membre du conseil de l'ordre.
La proposition de sanction et les éventuelles observations de l'avocat poursuivi sur celle-ci ne peuvent être ni produites ni invoquées dans la suite de la procédure.
L'avocat poursuivi est convoqué par la juridiction disciplinaire dans les conditions prévues à l'article 192. Les pièces transmises à la juridiction disciplinaire sont jointes à la convocation. La convocation et l'ensemble des pièces qui y sont annexées sont adressées au procureur général.
La juridiction disciplinaire statue le cas échéant en formation restreinte. Les articles 196 et 197 sont applicables à sa décision. La décision jugeant n'y avoir lieu à procédure simplifiée n'est susceptible d'aucun recours.
11) Echec de la procédure disciplinaire simplifiée
En cas d'échec de la procédure disciplinaire simplifiée, sauf si la juridiction disciplinaire statuant sur le fondement de l'article 187-5 a jugé que les faits reprochés à l'avocat poursuivi ne justifient pas une sanction, le bâtonnier, le procureur général ou, le cas échéant, l'avocat auteur de la réclamation peuvent engager la procédure disciplinaire prévue à la section 2 (Art. 187-6 du décret 27 novembre 1991).
La proposition de sanction, les éventuelles observations de l'avocat poursuivi sur celle-ci, les déclarations de l'avocat poursuivi et les documents produits après l'audition de l'avocat poursuivi dans le cadre de la procédure simplifiée ne peuvent être ni produits ni invoqués dans cette procédure disciplinaire (Art. 187-6 du décret 27 novembre 1991).
12) Information de l’avocat du droit de se taire pendant la procédure disciplinaire
Le décret n° 2025-77 du 29 janvier 2025 instaure un droit au silence de l’avocat pendant la procédure disciplinaire dont il est l’objet.
A cet égard, l’avocat faisant l'objet d'une procédure disciplinaire est informé de son droit de se taire avant d'être entendu sur les faits susceptibles de lui être reprochés (art. 187-1 du décret du 27 novembre 1991).
Le décret intègre ainsi la jurisprudence du conseil constitutionnel du 8 décembre 2023 qui a affirmé la nécessité d’information d’un notaire poursuivi du droit qu’il a de se taire dans le cadre d’une procédure disciplinaire (décision 2023-1074 QPC du 8 décembre 2023 https://www.legifrance.gouv.fr/cons/id/CONSTEXT000048796406?fonds=CONSTIT&page=1&pageSize=10&query=2023-1074&searchField=ALL&searchType=ALL&tab_selection=all&typePagination=DEFAULT).
Cette jurisprudence était transposable aux avocats.
En pratique, lors des audiences disciplinaires du Barreau de Paris, il était déjà rappelé à l’avocat qu’il/elle avait le droit de se taire pendant l’audience.
Source :
. Décret n° 2025-77 du 29 janvier 2025 relatif à la déontologie et à la discipline des avocats
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000051058650
. Discipline des avocats : la nouvelle procédure après le décret du 30 juin 2022
. Discipline des avocats : imprescriptibilité de la faute disciplinaire
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
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