Maître Frédéric CHHUM est l’avocat du salarié, Réalisateur, intermittent du spectacle, de la société FRANCE TELEVISIONS.
Le bureau de jugement du 24 octobre 2014 s’est déclaré en partage de voix et l’affaire a été reprise en audience de départage le 6 juin 2016.
Au soutien de ses demandes, Monsieur X. expose que la société FRANCE TELEVISIONS a eu recours à des contrats à durée déterminée pour pourvoir un emploi permanent et qu’il n’existe pas d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée pour l’emploi de réalisateur et que les autres motifs de recours ne sont pas justifiés par les éléments du dossier au regard du caractère permanent de l’emploi.
En défense, la société FRANCE TELEVISIONS demande le débouté des demandes formées par Monsieur X.
1) Jugement du Conseil de prud’hommes de Paris du 9 septembre 2016 (Départage - Encadrement)
Par jugement du 9 septembre 2016, le Conseil de Prud’hommes requalifie les CDD successifs en CDI et condamne la société FRANCE TELEVISIONS à verser au salarié, Réalisateur, les sommes suivantes :
- 15.000 euros à titre d’indemnité de requalification ;
- 17.192 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté ;
- 10.200 euros à titre de rappel de prime de fin d’année ;
- 2.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Au total, le salarié obtient 44.892 euros bruts.
Le réalisateur intermittent du spectacle a interjeté appel du jugement.
1.1) Requalification des CDD en CDI
En premier lieu, le Conseil de prud’hommes rappelle l’article L.1242-1 du Code du travail qui dispose qu’ « un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoi durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise».
Il poursuit : «l’article L.1242-2 du Code du travail dispose que, sous réserve des contrats spéciaux prévus à l’article L.1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans cinq cas qu’il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d’un salarié (1°), l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise (2°) et les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d’usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois (3°) »
Le juge départiteur rappelle aussi l’article L 1242-12 du code du travail et la directive européenne 1999/70CE du 28 juin 1999 :
« Aux termes de l’article L.1242-12 du code du travail le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif, et notamment les mentions énumérées par ce texte ; à défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée ».
« L’accord cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en œuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives, qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets, établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi ».
En second lieu, le juge constate que « Monsieur X. a travaillé à compter du 1er octobre 1995, dans le cadre de contrats à durée déterminée successifs motivés soit par la nécessité de remplacer un salarié absent, pour l’accroissement temporaire d’activité, ou le plus souvent, dans le contexte de contrats dits d’usage.
Dans cette dernière hypothèse, le recours au contrat à durée déterminée suppose l’existence d’un usage et le caractère par nature temporaire de l’emploi en cause ».
« Par ailleurs, le recours à un contrat à durée déterminée ne peut avoir pour objet de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ».
A cet égard, le juge relève que : « Monsieur X. a exercé la même fonction de réalisateur pour le compte de la société FRANCE TELEVISIONS et ce, de façon continue depuis plus de 20 ans »
« Il résulte des contrats versés au débat par le salarié qu’il ne travaillait pas sur des missions spécifiques et temporaires »
Le Conseil des prud’hommes en déduit alors que « France Télévisions fait appel à Monsieur X. pour répondre à un besoin structurel et permanent de personnel, et non à une activité temporaire » et (…) il y a lieu de requalifier les contrats à durée déterminée de Monsieur X. en un seul contrat à durée indéterminée à compter du 1er octobre 1995 ».
1.2) Condamnation de la société FRANCE TELEVISIONS au versement de 15.000 euros à titre d’indemnité de requalification
Le Conseil de prud’hommes rappelle que « conformément à l’article L.1245-2 du code du travail, si le juge fait droit à la demande du salarié tendant à la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, il doit lui accorder une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire ».
Le juge départiteur pour allouer cette indemnité tiens compte de l’âge du salarié et de la durée des relations contractuelles.
En effet, je juge considère que : « Compte tenu de l’âge de Monsieur X. et de la durée des relations contractuelles et de ses nécessaires implications sur la vie du salarié, maintenu par l’employeur dans une situation de précarité depuis plus de 20 ans, il convient de fixer cette indemnité à la somme de 15.000 euros ».
1.3) Droit à reconstitution de carrière du réalisateur, intermittent du spectacle
Le juge départiteur rappelle que « la requalification de contrats à durée déterminée successifs en un seul contrat à durée déterminée ouvre le droit au salarié d’obtenir la reconstitution de sa carrière ainsi que la régularisation de sa rémunération ».
A cet égard, diverses primes sont allouées au salarié.
En premier lieu, le juge départiteur condamne la société FRANCE TELEVISIONS à payer à Monsieur X. la somme de 17.192 euros à titre de rappel de la prime d’ancienneté.
A cet égard le juge indique que « conformément à l’accord collectif d’entreprise FRANCE TELEVISIONS (…) les salariés ont le droit à une prime d’ancienneté calculée selon l’ancienneté dans l’entreprise, dans les conditions suivantes : 0,8% du salaire minimal garanti du groupe de classification 6 (cadre 2) par année d’ancienneté entreprise jusqu’à 20 ans puis 0,5% par année de 21 à 36 années »
Il en déduit alors que « le repositionnement de Monsieur X. dans la situation d’un salarié permanent doit lui permettre de bénéficier des avantages conventionnels afférents à cette situation.
Dès lors, il convient de condamner la société à payer à Monsieur X. la somme de 17.192 euros »
En second lieu, le juge départiteur condamne la société FRANCEE TELEVISIONS à verser la somme de 10.200 euros au titre de la prime de fin d’année.
A cet égard, le juge constate qu’ « il résulte des notes de service de la Direction des Ressources Humaines de la société, verses au débat, que les salariés perçoivent une prime de fin d’année pondérée en fonction du salaire mensuel de base ».
En dernier lieu, le Conseil de prud’hommes condamne la société FRANCE TELEVISIONS à verser à Monsieur X. la somme de 2.919,84 euros à titre de supplément familial.
En effet, le juge relève qu’ « aux termes de l’article I) de l’annexe de l’accord collectif du 28 mai 2013 tout salarié perçoit, sur présentation de justificatifs, une prime dite de « supplément familial » pour les enfants qu’il a sa charge effective au sens des prestations familiales. Cette prime est d’un montant de 35 euros pour chacun des deux premiers enfants. Elle est de 87 euros par enfant à partir du 3ème».
Frédéric CHHUM, Avocats à la Cour (Paris et Nantes)
. Paris : 4 rue Bayard 75008 Paris - Tel: 01 42 56 03 00 ou 01 42 89 24 48
. Nantes : 41, Quai de la Fosse 44000 Nantes - Tel: 02 28 44 26 44
e-mail : chhum@chhum-avocats.com
Blog : www.chhum-avocats.fr