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La Chambre criminelle rappelle qu’il n’est pas nécessaire que les propos soient blessants, injurieux ou insultants pour qu’ils soient constitutifs d’un harcèlement sexuel.
 1.      Rappel des faits
Mme I... A. a été embauchée par la ville de Mâcon en tant qu'adjointe au gestionnaire de la cuisine centrale, M. Y., le 1er septembre 2012.
Le 26 mars 2015, le médecin de prévention a déclaré Mme A. inapte au travail pour une durée d'un mois en raison d'une situation de harcèlement professionnel nécessitant un éloignement du milieu professionnel, le médecin précisant que la reprise ne pouvait être effective qu'à la condition d'une mobilité d'un des deux agents.
Le 29 avril 2015, Mme A. a déposé plainte à l'encontre de M. T. pour harcèlement sexuel.
A l'issue de l'enquête, le procureur de la République a classé cette plainte sans suite.
Mme A. a contesté ce classement et après un complément d'enquête, le procureur général a infirmé la décision de classement sans suite.
M. T. a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour harcèlement sexuel.
Par jugement du 13 juin 2018, le tribunal correctionnel a renvoyé le prévenu des fins de la poursuite et a débouté Mme A., constituée partie civile, de ses demandes.
Mme A. a relevé appel principal sur les dispositions civiles de cette décision et le procureur de la République a relevé appel principal du jugement de relaxe.
2. Moyen du manager devant la Cour de cassation
Monsieur T. critiquait l’arrêt de la Cour d’appel de Dijon qui l’avait déclaré coupable de harcèlement sexuel alors :
« 2°/ que le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ; que la création d'une situation offensante suppose que les propos tenus aient été blessants, injurieux ou insultants ; que la loi pénale est d'interprétation stricte ; qu'en retenant que les propos tenus par M. T... dans les mails et les messages écrits reproduits dans ses motifs avaient créé une situation offensante pour Mme A... lorsque tous les propos tenus par le prévenu reproduits dans l'arrêt, qui louait sa beauté et ses compétences, étaient intellectuellement et physiquement valorisants pour Mme A... et étaient dépourvus de tout caractère blessant, insultant ou injurieux, outre qu'ils ne présentaient aucun caractère avilissant ou hostile, la cour d'appel a violé les textes susvisés,
3°/ que le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ; que la condition tenant à l'effet des propos se distingue des autres conditions prévues par la loi liées à la répétition et à l'imposition des propos à la victime et s'apprécie de façon objective, au regard des propos concernés et du contexte dans lequel ils s'inscrivent, sans pouvoir être déduite du seul constat médical d'une incapacité temporaire de travail de la plaignante ; qu'en relevant, pour retenir la création par les propos reprochés au prévenu d'une situation offensante à l'encontre de Mme A..., d'une part, que celle-ci avait exprimé à M. T... à plusieurs reprises qu'elle n'entendait nullement répondre à ses avances et l'avait invité à cesser de lui écrire et que malgré cela, le prévenu avait continué de lui adresser des messages et d'autre part, que le 26 mars 2015, le médecin de prévention avait déclaré Mme A... inapte temporaire en raison du harcèlement au travail, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé en quoi les propos reprochés au prévenu avaient créé une situation offensante par Mme A..., n'a pas justifié légalement sa décision. »
 3.     Arrêt du 18 novembre 2020
Pour déclarer le prévenu coupable de harcèlement sexuel, l'arrêt de la Cour d’appel de DIJON retient que l'existence de propos écrits revêtant une telle connotation est établie par les courriels et les billets, dont la teneur a été rappelée par l'arrêt, et par lesquels M.T. exprime de façon répétée son désir explicite d'avoir une relation d'ordre sexuel avec sa collègue, en dépit de ses refus réitérés.
Les juges de la Cour d’appel de DIJON relèvent que l'envoi de ces courriels et le dépôt des messages se sont produits de 2012 à 2015, et qu'à plusieurs reprises au cours de cette période, la victime a exprimé de façon ferme et explicite à leur auteur qu'elle n'entendait nullement répondre favorablement à ses avances et qu'elle l'a invité à cesser de lui écrire.
Ils retiennent que le 26 mars 2015, le médecin de prévention a déclaré Mme A... inapte temporaire en raison d'un harcèlement au travail.
Les juges en concluent que M. T... a imposé à Mme A..., d'une façon réitérée, des propos à connotation sexuelle, en dehors de tout contexte de plaisanterie ou de familiarité, créant à son encontre une situation offensante, génératrice d'une incapacité de travail.
La Cour de cassation en conclut donc que la cour d'appel de DIJON a justifié sa décision.
Pour aller plus loin, lire ou relire nos brèves :
. Harcèlement sexuel et moral : office du juge devant le conseil de prud’hommes et en appel.
. Harcèlement sexuel au travail : jurisprudences 2019 /2020
. Egalité Femmes / Hommes, harcèlement moral et agissements sexistes : les slides du Petit déjeuner débat du 29 mars 2019 chez CHHUM AVOCATS en open data
https://www.legavox.fr/blog/frederic-chhum-avocats/egalite-femmes-hommes-harcelement-moral-26664.htm
. French Labour Law: sexual harassment and sexist behaviours at work: the new rules after the laws of August 3rd and September 5th, 2018
https://www.legavox.fr/blog/frederic-chhum-avocats/french-labour-sexual-harassment-sexist-26516.htm
. Harcèlement sexuel et agissements sexistes en entreprise : que préconise le Ministère du travail ?
. Propos à connotation sexuelle + pressions sur une salariée pour tenter d'obtenir des faveurs sexuelles = Harcèlement sexuel
. French Employment law - Sexual harassment (harcelement sexuel) at work (au travail): overview of French case law in 2019 - 2020
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Source : Legifrance
c. cass. 18 nov. 2020 n°19-81790
Frédéric CHHUM avocat et membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
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