Au visa des articles L. 2411-1, 16° et L. 2411-21 du code du travail (imminence de la désignation d’un conseiller du salarié), la Cour de cassation affirme que « pour l’application des textes susvisés, c’est au moment de l’envoi de la convocation à l’entretien préalable au licenciement que l’employeur doit avoir connaissance de l’imminence de la désignation d’un salarié en qualité de conseiller du salarié ».
1) Faits
Mme Y. a été engagée le 7 novembre 2005 en qualité de télé gestionnaire par la société Credirec France, aux droits de laquelle est venue la société EOS Credirec, devenue la société EOS France.
Au dernier état de la relation contractuelle, la salariée occupait les fonctions d’expert métier.
Convoquée le 30 octobre 2014 à un entretien préalable au licenciement fixé au 12 novembre 2014, elle a été licenciée pour cause réelle et sérieuse le 26 novembre 2014.
Invoquant le bénéfice du statut protecteur en raison de la connaissance par l’employeur de l’imminence de sa désignation en qualité de conseiller du salarié, la salariée a saisi la juridiction prud’homale le 3 mars 2015 de demandes en nullité de son licenciement et en paiement de diverses sommes.
Dans un arrêt du 5 avril 2019, la Cour d’appel de Rennes a considéré que le licenciement de la salariée était nul et de nul effet.
La société s’est pourvue en cassation.
2) Moyen de la société
L’employeur faisait grief à l’arrêt de dire que le licenciement est nul et de le condamner au paiement de certaines sommes à titre d’indemnisation de la violation du statut du salarié protégé et d’indemnisation du licenciement illicite.
L’employeur plaidait « que ce n’est que si l’employeur a connaissance, au jour de l’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable, marquant l’engagement de la procédure de licenciement, de la candidature ou de l’imminence de la désignation du salarié en qualité de conseiller du salarié que ce dernier peut bénéficier du statut protecteur lié à ce mandat extérieur à l’entreprise » ;
Il ajoutait « qu’en retenant que la protection prend effet avant la publication de la liste des conseillers du salarié si le salarié fait la preuve que son employeur a eu connaissance de l’imminence de sa désignation “ avant de procéder à son licenciement ” et qu’en l’espèce Mme Y... avait informé l’employeur de l’imminence de sa candidature le 6 novembre 2014, soit antérieurement à l’entretien préalable au licenciement qui s’est tenu le 12 novembre 2014, la cour d’appel qui s’est placée à la date de l’entretien préalable et non à celle de l’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable, soit le 30 octobre 2014, pour apprécier si l’employeur avait connaissance de la candidature ou de l’imminence de la désignation de la salariée en qualité de conseiller du salarié a violé les articles L. 2411-1-16° et L. 2411-21 du code travail. »
3) Solution de la Cour de cassation
Au visa des articles L. 2411-1, 16° et L. 2411-21 du code du travail, la Cour de cassation affirme que « pour l’application des textes susvisés, c’est au moment de l’envoi de la convocation à l’entretien préalable au licenciement que l’employeur doit avoir connaissance de l’imminence de la désignation d’un salarié en qualité de conseiller du salarié ».
Pour dire le licenciement nul en l’absence d’autorisation administrative de licenciement, l’arrêt de la Cour d’appel de Rennes retient qu’il est constant que la protection prend effet avant la publication de la liste des conseillers du salarié si le salarié fait la preuve que son employeur a eu connaissance de l’imminence de sa désignation avant de procéder à son licenciement et qu’en l’espèce la salariée a bien informé l’employeur de l’imminence de sa candidature aux fonctions de conseiller du salarié le 6 novembre 2014, soit antérieurement à l’entretien préalable au licenciement qui s’est tenu le 12 novembre 2014.
En statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que la salariée avait été convoquée à un entretien préalable au licenciement le 30 octobre 2014 et qu’il résultait de ses constatations que l’employeur n’avait eu connaissance de l’imminence de la désignation de l’intéressée en qualité de conseiller du salarié que le 6 novembre 2014, soit postérieurement à l’engagement de la procédure de licenciement, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel de Rennes et renvoie l’affaire devant la cour d’appel d’Angers.
Source : site de la Cour de cassation
Cass. soc. 13 janvier 2021 (19-17.489)
https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/74_13_46283.html
Frédéric CHHUM avocat et membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
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