L’assistante de Direction de Rituals Cosmetics a pris acte de la rupture pour non-paiement d’heures supplémentaires, non-respect de la durée quotidienne et hebdomadaire de travail, non-respect des temps de repos, non-respect de l’obligation de sécurité.
Le juge départiteur juge que la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause.
L’assistante de direction obtient 47 000 euros bruts.
Le jugement de départage est définitif.
1) EXPOSÉ DU LITIGE
Madame X a été engagée par la SAS RITUALS COSMETICS FRANCE, par contrat à durée indéterminée du 1er octobre 2018 en qualité d'assistante de direction, statut cadre.
Il était convenu d'une rémunération annuelle brute de 37.000,00 euros pour une durée de travail mensuelle de 169 heures.
Madame X a fait l'objet d'arrêts de travail du 25 juin 2020 au 17 juillet
2020 et du 9 février 2021 au 2 mai 2021.
Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 23 février 2021, Madame X a dénoncé une situation de harcèlement moral et a sollicité le paiement d'heures supplémentaires et de rappels de salaires.
Madame X a ensuite saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail le 20 avril 2021 (dossier RG n°21/03271).
Postérieurement à cette saisine, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, par courrier du 29 septembre 2021.
Madame X a saisi la juridiction prud'homale le 29 décembre 2021, pour solliciter la requalification de la prise d'acte en un licenciement nul ou à défaut sans cause réelle et sérieuse (dossier RG n°21/10506).
Lors de l'audience du départage, Madame X sollicite la jonction des deux dossiers et a repris les demandes exposées ci-dessus.
Elle demande que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement nul, soutenant à cet effet qu'elle a été victime de harcèlement moral, qu'elle a effectué de nombreuses heures supplémentaires impayées, que les durées maximales de travail et les repos n'ont pas été respectés et que l'employeur a manqué à ses obligations contractuelles en matière de sécurité et d'affichage.
En défense, la SAS RITUALS COSMETICS FRANCE conclut au débouté des demandes formées à son encontre et sollicite la condamnation de la demanderesse sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle conteste les heures supplémentaires invoquées par la salariée et souligne que le harcèlement moral n'est pas constitué.
A titre subsidiaire, elle sollicite la réduction des sommes qui pourraient être allouées à la demanderesse au titre de la rupture.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.
2) MOTIFS DE LA DÉCISION :
Dans son jugement du 4 juin 2024 (RG 21/03271), le Conseil, présidé par le juge départiteur statuant seul après avis des conseillers présents, publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, rendu par mise à disposition au greffe,
ORDONNE la jonction du dossier RG 21/10506 au dossier RG 21/03271 ;
Dit que la prise d'acte de Madame X produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
CONDAMNE la SAS RITUALS COSMETICS FRANCE à payer à Madame X
les sommes suivantes :
- 5.000,00 euros brut au titre de rappels d’heures supplémentaires pour la période allant du 1er octobre 2018 au 31 décembre 2018 ;
- 500,00 euros brut au titre de congés payés y afférents,
- 2.500,00 euros au titre de dommages et intérêts pour le non-respect de la durée hebdomadaire de travail,
- 2.500,00 euros au titre de dommages et intérêts pour le non-respect de la durée quotidienne de travail et du non-respect du temps de repos,
- 3.000,00 euros de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 13.500,00 euros euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 13.403,28 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 1.340,32 euros de congés payés y afférents,
- 2.792,35 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;
Ordonne la remise d'un bulletin de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation employeur destiné à France Travail, conformes à la présente décision ;
RAPPELLE que les condamnations à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation en bureau de conciliation et celles à caractère indemnitaire, à compter de la présente décision ;
CONDAMNE la SAS RITUALS COSMETICS FRANCE au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
ORDONNE l'exécution provisoire ;
CONDAMNE la SAS RITUALS COSMETICS FRANCE aux dépens de l'instance.
Au total la salariée obtient 47 000 euros bruts
2.1) Sur la jonction
Il convient, en application de l'article 367 du code de procédure civile et dans un souci de bonne administration de la justice, de joindre le dossier RG 21/10506 au dossier RG 21/03271.
2.2) Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail
2.3) Sur la prise d'acte
La prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail. C'est au salarié qu'il incombe de rapporter la preuve des manquements invoqués à l'encontre de son employeur.
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture, qui entraîne la cessation immédiate du contrat de travail, produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
La prise d'acte met fin au contrat à la date d'envoi de la lettre de rupture, sous réserve des cas ou le salarié exécute un préavis à la suite de sa prise d'acte.
En l'espèce Madame X, qui a déclaré prendre acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur par lettre du 29 septembre 2021, reproche à ce dernier les faits suivants :
- des heures supplémentaires impayées,
- le dépassement des contingents d'heures supplémentaires,
- le non-respect par la société des temps de repos et durées maximales de travail,
- un travail dissimulé,
- une diminution salariale imposée,
- des agissements de harcèlement moral,
- des manquements à l'obligation de sécurité.
Il convient d'examiner les manquements invoqués.
2.3.1) Sur les rappels de salaires au titre des heures supplémentaires
Toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou le cas échéant à un repos compensateur équivalent. Sont des heures supplémentaires celles effectuées à la demande de l'employeur, ou à tout le moins avec son accord implicite, au-dela de la durée légale de travail telle qu'elle résulte de l'article L: 3121-27 du code du travail.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, en vertu de l'article L. 3171-4 du code du travail, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires.
En l'espèce, Madame X sollicite des rappels de salaires au titre de 51,96 heures supplémentaires structurelles non rémunérées et au titre de 438,11 heures supplémentaires impayées pour la période allant d'octobre 2018 à mars 2021.
2.3.2) Sur les heures supplémentaires dites structurelles
Madame X sollicite un rappel de salaire de 1.319,78 euros pour les heures supplémentaires qu'elle a accomplies entre la 35ème heure et la 39ème heure ainsi que le paiement des congés payés y afférents.
A l'appui de sa demande elle fait valoir que les bulletins de paye des mois d'octobre, novembre et décembre 2018 mentionnent une durée de travail de 151,68 heures pour un salaire de 3.083 euros, alors qu'elle travaillait 169 heures par mois.
La société défenderesse indique que les trois bulletins de paye des mois de 2018 comportent une erreur matérielle sur la durée de travail, qui a été rectifié dès le 1er janvier 2019 en intégrant deux lignes distinctes pour les 151,67 premières heures au taux de 18,24 euros et pour 17,77 heures supplémentaires au taux majoré de 20,23 euros.
Il résulte de l'article 6 du contrat de travail que les parties ont convenu d'une rémunération brute annuelle forfaitaire de 37.000 euros pour un horaire de 169 heures mensuelles soit 3.083,33 euros pour 39 heures par semaine.
L'examen des bulletins de paie révèle que la société a payé à Madame X un salaire de 3.083,33 euros aux mois d'octobre, novembre et décembre 2018 correspondant au salaire convenu de telle sorte que les heures supplémentaires « qualifiées de structurelles » ont été intégralement rémunérées.
La salariée sera déboutée de sa demande de rappel de salaire.
Sur les 438,11 heures supplémentaires
Madame X fait valoir que l'employeur est débiteur de la somme de 11.669,67 euros de rappel de salaire pour les 438,11 heures supplémentaires qu'elle affirme avoir effectuées d'octobre 2018 à mars 2021, outre la somme de 1.166,96 euros de congés payés y afférents.
A l'appui de sa demande, elle produit les décomptes quotidiens et hebdomadaires de ses heures de travail, avec l'indication de ses heures d'arrivée et de départ de l'entreprise, ainsi que ses heures de pauses pour la période concernée.
Ces décomptes sont complétés par de nombreux échanges de courriels entre la salariée et son employeur du ler octobre 2018 au 28 mars 2021.
Ainsi, Madame X fournit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
La société défenderesse allègue que la salariée n'a jamais sollicité l'autorisation préalable de son directeur pour effectuer des heures supplémentaires, conformément aux dispositions de l'article S du contrat de travail, que les éléments communiqués par la salariée sont insuffisamment probants et que la charge de travail de la salarié ne justifiait pas l'accomplissement d'heures supplémentaires. Cependant, elle n'apporte aucun élément probant concernant les horaires et le décompte des heures de travail, alors qu'il lui appartient d'établir les éléments nécessaires au décompte de la durée de travail.
Selon les décomptes produits la salariée commençait généralement ses journées de travail à 09h30 et terminait sa journée le plus souvent après 19h00, et parfois tard dans la soirée, avec une heure de pause quotidienne. Les échanges de courriels produits par la salariée attestent que
travail, que celle-ci adressait des mails à ses interlocuteurs en dehors des heures de travail usuelles notamment le soir.
Au regard de ces éléments, le Conseil relève que Madame X a effectué des heures supplémentaires dans une proportion moindre que sollicité, le conseil se bornant à retenir les 108 journées pour lesquelles des mails sont produits à l'appui des heures mentionnées sur les tableaux produits par la salariée.
Il convient de faire partiellement droit à la demande en paiement d'heures supplémentaires et de condamner la société RITUALS COSMETICS FRANCE au paiement de la somme de 5.000,00 euros brut au titre des heures supplémentaires et au paiement de la somme 500,00 euros
brut au titre des congés payés afférents.
2.3.3) Sur la demande de dommages et intérêts au titre du repos compensateur et sur la demande de congés payés
En application de l'article L. 3121-30 du code du travail, la contrepartie obligatoire en repos est due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires.
Madame X soutient qu'elle a accompli 199,58 heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de 220 heures au titre de l'année 2019 et 23h58 au-delà du contingent annuel au titre de l'année 2020 dont elle réclame le. paiement à hauteur d'une somme de 4.534,60 euros outre les congés payés afférents.
Eu égard à la solution du litige sur les heures supplémentaires, le Conseil considère que le dépassement allégué n'est pas établi de sorte que la demande d'indemnité à ce titre est rejetée ainsi que la demande de congés payés.
2.4) Sur le non-respect de la durée hebdomadaire de travail
Il résulte de l'article L3121-20 du code du travail que la durée maximale hebdomadaire de travail est de quarante-huit heures.
En l'espèce, la salariée sollicite la somme de 5.000 euros pour le non-respect de la durée maximale de travail.
L'employeur s'oppose à sa demande, sans produire le moindre élément en défense.
Il ressort des décomptes du temps de travail de la salariée que Madame X a excédé à huit reprises une durée maximale de 48 heures par semaine pour la période litigieuse, notamment la semaine du 5 novembre 2018 avec des horaires de 58h30, ou le 25 novembre 2029 avec des horaires de 50 heures.
Il en résulte que Madame X est fondée à solliciter la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour le non-respect de la durée hebdomadaire maximale de travail.
2.5) Sur le non-respect de la durée quotidienne de travail et sur la demande d'indemnité pour le non-respect du temps de repos quotidien
Madame X sollicite la condamnation de la société à lui verser 5.000 euros de dommages et intérêts pour non-respect de la durée quotidienne de travail et 5.000 euros pour non-respect du temps de repos quotidien.
Aux termes de l'article L.3121-18, la durée quotidienne de travail ne peut excéder 10 heures.
Aux termes de l'article L.3131-1 du code du travail, tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives.
En l'espèce, il ressort de l'examen du tableau des heures de travail, qu'à de multiples reprises les horaires de travail quotidiens et les temps de repos quotidiens n'ont pas été respectés.
Le conseil estime au vu de ces éléments et des éléments médicaux versés aux débats que la salariée a subi un préjudice qui sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 2.500 euros. en réparation tout à la fois du non-respect du repos quotidien et du non-respect de la durée quotidienne maximale de travail.
2.6) Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé
Il résulte des dispositions des articles L 8221-5 et L 8223-1 du code du travail que le fait, pour l'employeur, de mentionner intentionnellement sur le bulletin de paie du salarié un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli est réputé travail dissimulé et ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires.
En l'espèce, il résulte des développements qui précèdent que les bulletins de paie de Madame X mentionnent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.
Cependant, la salariée n'a pas réclamé le paiement de ses heures supplémentaires sur les matrices de l'entreprise et le caractère intentionnel n'est pas avéré, de sorte que le travail dissimulé n'est pas établi.
Le demande sera en conséquence rejetée.
2.7) Sur le rappel de salaires au titre du taux horaire et la demande de congés payés subséquente
Madame X soutient que la SAS RITUALS COSMETICS FRANCE aurait appliqué un taux horaire sous-évalué à compter de l'année 2019 et sollicite en conséquence un rappel de salaire qu'elle fixe à 10.132,66 euros, outre les congés payés afférents.
Cependant la salariée fonde ses calculs sur la base des trois fiches de paye des mois d'octobre, novembre et décembre 2018 dont les indications sont erronées, pour en déduire un taux horaire qui ne correspond pas au contrat de travail.
Par suite, les demande de rappel de salaire et de congés payées de Madame X
seront rejetées.
2.8) Sur le harcèlement moral
L'article L.1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L'article L.1154-1 du même code dispose que, en cas de litige, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Si cette présomption est établie, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Dès lors, il convient dans un premier temps de vérifier la matérialité des faits précis et concordants établis par le salarié permettant, dans leur ensemble, de présumer l'existence d'un harcèlement moral avant d'étudier, le cas échéant dans un second temps, les éléments objectifs étrangers à tout harcèlement apportés par l'employeur et justifiant sa décision.
En l'espèce, Madame X met en cause les agissements de son employeur à son égard constitutifs selon elle d'un harcèlement moral et invoque plusieurs faits au soutien de son argumentation :
- une entrave à l'évolution professionnelle : cette allégation n'est étayée par aucun élément probant. Contrairement à ce que soutient la salariée sa rémunération n'a pas été diminuée par l'employeur et aucun élément ne démontre que l'employeur aurait failli à un engagement de réévaluer son salaire,
- une ambiance de travail nocive: la réalité de cette allégation qui ne repose que sur les affirmations de la salariée n'est pas démontrée,
- des reproches sans fondement de sa hiérarchie : la salariée produit un échange de mails du lundi 08 janvier 2021 aux termes duquel il lui est fait grief de ne pas avoir signalé immédiatement une fuite d'eau qu'elle aurait constatée le vendredi 05 janvier. A la lecture de cet échange, il n'est pas établi que ces observations soient dénuées de fondement, aucune contestation n'ayant été élevée par la salariée avant l'introduction du présent litige. Il est également fait grief à l'employeur d'un mail par lequel Madame Sandrine Mignaux la supérieure hiérarchique de la salariée s'étonne de son absence à 10h40 alors qu'elle se trouvait en arrêt maladie. Toutefois, la salariée n'établit pas avoir informé l'employeur de son arrêt avant l'envoi du mail de madame Mignaux qui était dès lors fondée à interroger la salarié sur cette absence. Les faits allégués de reproches infondés ne sont donc pas établis,
- une surcharge de travail : ainsi que mentionné plus haut, la salariée établit qu'elle devait effectuer fréquemment des heures supplémentaires ce qui atteste d'un importante charge de travail,
- Une altération de la santé physique et mentale de la salariée : ces faits sont établis par les arrêts de travail et documents médicaux versés aux débats mentionnant un état de burn out en 2020 et en 2021.
Au vu de ces éléments, le conseil relève que seuls les faits relatifs à la charge de travail importante de la salariée, la contraignant à effectuer des heures supplémentaires et à une dégradation de son état de santé sont établis. Pris dans leur ensemble, l'accomplissement d'heures supplémentaires et la constatation d'une altération de l'état de santé de Madame X ne sont toutefois pas de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral en l'absence de démonstration de faits précis et concordants.
Madame X sera en conséquence déboutée de sa demande indemnitaire au titre du harcèlement moral et de sa demande au titre d'un licenciement nul.
Sur le manquement à l'obligation de sécurité
En application de l'article L 4121-1 du code du travail, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité dont il doit assurer l'effectivité.
Le non-respect des durées maximales de travail, des temps de repos obligatoires; ajouté au défaut de justification par l'employeur de mesures de prévention du harcèlement moral, à l'absence de réaction face à la dénonciation par la salarié d'agissements de harcèlement moral le 23 février 2021 sont constitutifs de manquements à l'obligation de sécurité de l'employeur.
Ces carences justifient l'allocation de dommages-intérêts à hauteur de 3.000 euros à la salariée.
Il résulte de l'ensemble de ces observations des manquements de l'employeur à ses obligations relatives au paiement des heures de travail, aux temps de repos et à la durée du travail, à la sécurité. Ces faits sont d'une gravité telle qu'ils empêchaient la poursuite du contrat de travail et justifiaient la prise d'acte.
La prise d'acte doit donc produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
3) Sur les conséquences du licenciement
3.1) Sur le salaire de référence
Au vu de la solution du litige et du rappel de salaire alloué au titre des heures supplémentaires le salaire mensuel moyen de Madame X le plus favorable s'évalue sur la base des douze derniers mois de salaire à hauteur de la somme de 4.467,76 euros:
3.2) Sur l'indemnisation du licenciement
Madame X, justifie de 3 années d'ancienneté et l'entreprise emploie habituellement plus de 11 salariés. En application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, la salariée est fondée à obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à une somme comprise entre 3 et 3,5 mois de salaire.
Elle ne justifie pas de sa situation professionnelle postérieure au licenciement.
Au vu de cette situation, du montant de la rémunération, il convient d'évaluer son préjudice à
13.500,00 euros.
Il convient de condamner la société RITUALS COSMETICS FRANCE au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de trois mois de salaire, sur le fondement des clauses du contrat de travail, soit la somme de 13.403,28 euros bruts, ainsi que les congés payés afférents, soit 1.340,32 euros bruts.
Il convient d'allouer à Madame X une indemnité légale de licenciement de 2792,35 euros.
4) Sur les demandes accessoires
Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les condamnations à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation en bureau de conciliation et celles à caractère indemnitaire, à compter de la présente décision.
Madame X ne justifiant pas de la perception d'allocations de chômage il n'y a pas lieu d'ordonner d'office à l'employeur de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées.
Au vu des solutions apportées au litige, il y a lieu d'ordonner la remise d'un bulletin de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation employeur destiné à France Travail, conformes à la présente décision, sans que le prononcé d'une astreinte ne s'avère nécessaire.
La société défenderesse sera condamnée au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande à ce titre.
Dès lors qu'elle succombe, la société défenderesse sera condamnée aux dépens.
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
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