FAITS ET PROCEDURE
Depuis mars 2004, il travaille à temps partiel à hauteur de 89,08%, au sein de l’Etablissement Service Voyageur des Pays de la Loire. Sa mission consiste à remplacer les absences des agents de l’Etablissement Service Voyageur dans lequel il exerce ses fonctions.
M. A a été délégué du personnel titulaire du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2018.
M.A a fait l’objet de trois sanctions disciplinaires :
- Avertissement le 18 septembre 2017
- Blâme sans inscription le 1er août 2018 ;
- Mise à pied de 12 jours ouvrés à compter du 12 novembre 2018.
M. A a saisi le Conseil de prud’hommes par requête du 28 mai 2019 des demandes précisées plus haut. La société SNCF Voyageurs soutient que ces demandes ne peuvent être accueillies et sollicite reconventionnellement 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile ;
Le Conseil de Prud’hommes de Nantes, le juge départiteur statuant seul après avis des conseillers présents,
Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
ANNULE les sanctions disciplinaires suivantes :
- Avertissement du 18 septembre 2017,
- Blâme sans inscription du 1er août 2018,
- Mise à pied de 12 jours ouvrés du 12 novembre 2018,
CONDAMNE la société SNCF VOYAGEURS venant aux droits de la SNCF MOBILITES à payer à M. A les sommes de :
- 1.159,91 euros bruts à titre de rappel de salaire du fait de sa mise à pied ferme de 12 jours,
- 115,99 euros bruts au titre des congés payés afférents,
- 328,51 euros net de dommages-intérêts en raison du préjudice subi du fait des sanctions disciplinaires,
- 1.002,64 euros bruts à titre de rappel de salaire du fait de ses journées de délégation,
- 100,26 euros bruts au titre des congés payés afférents,
- 2.536,56 euros bruts à titre de rappel de 18 jours de congés payés,
- 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile,
Les dites sommes étant assorties des intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter de la notification du jugement pour les sommes à caractère indemnitaire ;
DEBOUTE M.A des demandes suivantes :
- Dommages-intérêts en raison du préjudice subi du fait de discrimination syndicale,
- Dommages-intérêts en raison du préjudice subi pour inégalité de traitement entre salarié à temps plein et salarié ) temps complet, rappel d’ »Indemnité locale » astreinte, exécution provisoire de l’intégralité du jugement ;
ORDONNE la remise par la SNCF VOYAGEURS à M.A d’un bulletin de paie récapitulatif conforme à ce jugement ;
Rappelle l’exécution provisoire de droit (salaire moyen mensuel de référence : 3.523 euros brut).
CONDAMNE la SNCF VOYAGEURS venant aux droits de la SNCF MOBILITES aux dépens.
1) SUR LES SANCTIONS DISCIPLINAIRES :
Au visa de l’article L2411-1 du Code de travail, la chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé par un arrêt du 22 juin 2011 qu’aucune modification de son contrat de travail ou de ses conditions de travail ne peut être imposée à un salarié protégé et qu’il appartient à l’employeur d’engager la procédure de licenciement en cas de refus du salarié de cette modification, en demandant l’autorisation de l‘inspecteur du travail ;
En l’espèce, M. A était titulaire d’un mandat lorsqu’il a refusé la modification de son contrat de travail consistant à accueillir et renseigner sur le quai les futurs passagers alors que son travail se déroulait jusque là principalement dans les wagons, à l’occasion d’un trajet. La fiche REFLEXE n°21 du 4 janvier 2016 précise que le chef de bord participe certes à l’accueil – embarquement mais qu’il entre ensuite, en service sur le train ayant fait l’objet accueil ; en circonscrivant sa mission à quai, l’employer a procédé à un changement de ses conditions de travail qui a en outre une incidence sur sa rémunération (absence de perception pour un travail à quai d’indemnités journalières d’accompagnement TGV, d’indemnités contrôle/ perception/ recouvrements).
L’employeur ne pouvait donc répondre aux refus du salarié qu’en engageant une procédure de licenciement nécessitant une autorisation administrative et non par la procédure disciplinaire habituelle qui n’est pas soumise à l’accord préalable de l’inspection du travail ;
En conséquence, il y a lieu d’annuler les sanctions qui punissent un refus, justifié par le statut du salarié, de voir modifier ses conditions de travail et de condamner l’employeur à rembourser les jours de travail non payés pendant la mise à pied.
M. A ayant été privé de la somme de 1.159,91 euros bruts, outre les congés payés afférents d’un montant de 115,99 euros bruts, le Conseil de prud’hommes condamne la SNCF MOBILITES à lui payer la somme de 1.159,91 euros bruts, outre les congés payés afférents d’un montant de 115,99 euros bruts, à titre de rappel de salaire du fait de sa mise à pied.
2) SUR LES DOMMAGES ET INTERETS POUR PREJUDICES CONSECUTIFS AUX SANCTIONS :
Outre la perte de salaire qui a fait supra l’objet d’un rappel, le salarié sollicite des dommages et intérêts faisant valoir qu’il a subi un préjudice résultant de la perte de primes à savoir : La prime de travail accompagnant trains ; la prime de travail activité commerciale trains ; une prime de travail activité commerciale renforcée S1/S2 ; l’indemnité journalière d’accompagnement TGV ainsi, en cas de voyages successifs, une indemnité journalière complémentaire ; l’indemnité de contrôle/ perception/ recouvrements ; l’indemnité de travail de nuits roulants ; une indemnité de travail dimanche et fêtes roulants l’allocation de déplacement roulants et un complément d’allocation de déplacement roulants, cette somme représentant selon le demandeur en moyenne 90,96 euros bruts par jour ;
Cependant dans ses conclusions (page 7), il assure que la non-affectation sur un train roulant génère une perte de salaire journalière de 18,82 euros, il y a donc lieu d’évaluer son préjudice lié ) perte de prime à hauteur de 225 euros, étant rappelé que les dommages et intérêts ne sont pas payables en euros brut.
Le salarié fait également valoir qu’il n’aurait pu accéder à un déroulement de carrière attendu du fait de ces sanctions.
Pour en justifier, il soutient qu’il résulte de la liste des agents en notation éligibles à l’accès à la position supérieure C-13, que parmi ces agents, 11,96 étaient éligibles au passage en position C-13 , correspondant aux 26% prévus par l’article 1.1.2 du statut RH0001 (pièces 43 et 44 salarié), qu’il était classé à la 20ème place dans l’ordre d’attende pour les notation de mars 2018, que 11 agents ont été promus en position C-13 en mars 2018, ce qui le positionnait 9ème pour l’année 2019 et qu’il aurait donc dû être promu en position C-13 à compter di mois d’avril 2019, ce qui n’a pas été le cas.
M.A soutient avoir constaté en commission de notations que tout agent s’étant vu notifier une sanction disciplinaire l’année précédente n’est pas retenu pour l’avancement. M.A prétend avoir subi à ce titre une perte de chance de voir sa rémunération augmentée de 3%, soit de 55,70 euros bruts par mois depuis avril 2019 par comparaison avec les bulletins de paie d’un collègue de travail chef de bord passé de la position C-12 à C-13. (pièce 44 salarié)
Cependant l’automaticité de la promotion, qui échappe pour partie à l’ancienneté d’inscription, n’est pas établie, l’article 13.4 ----- chapitre 6 du statut RH 0001 applicable disposant que les agents positionnés sur un avancement sont sélectionnés par moitié au choix de la Direction, et l‘autre moitié sur le critère de la priorité de telle sorte que la perte de chance est donc non justifiée au vu des simples constations du salarié sur l’incidence de sanctions.
En conséquence, ce préjudice n’est pas retenu par le Conseil de prud’hommes.
Enfin, M. A ayant été affecté à l’accueil – embarquement sur cinq journées entre septembre 2017 et mars 2018, affectation qu’il a refusée, soutient sans être contredit par l’employeur qu’il ne se serait pas vu proposer un embarquement pour ces journées de travail et qu’il a donc perçu un salaire ne comprenant pas les primes liées à l’embarquement à bord des trains.
Le Conseil de prud’hommes ayant jugé plus haut qu’il ne pouvait lui être imposé une modification de ses conditions de travail du fait de son statut, il appartenait à l’employeur à qui le salarié avait expressément rappelé cette impossibilité, de l’affecter sur son service ordinaire et non de le salarier sans service à accomplir, ce qui a privé M. A d’une part de sa rémunération, à savoir au titre de l’indemnité d’accompagnement TGV de 8,34 euros, de l’indemnité journalière complémentaire de 8,12 euros par jourx5, la somme de 94,10 euros bruts, outre les congés payés afférents d’un montant de 9,41 euros bruts (18,82 euros x 5).
Le salarié fait valoir enfin qu’il aurait subi un préjudice « moral » et de « réputation » important du fait des sanctions ; toutefois il ne justifie par aucune pièce l’étendue de ces préjudices.
Au vu de ces éléments et des préjudices retenus, le Conseil de prud’hommes condamne la SNCF VOYAGEURS venant aux droits de la SNCF MOBILITES à payer à M. A la somme de 328,51 euros net au titre de dommages - intérêts en raison du préjudice subi du fait des sanctions.
3) SUR LA DEMANDE DE RAPPEL AU TITRE DE L’INDEMNITE DE « REGULARISATION » :
Alors que les agents commerciaux des trains percevaient une indemnité variable au titre de la régularisation à bord des trains des voyageurs ayant oublié leur carte de réduction commerciale SNCF qui équivalait à 10% du montant de l’amende facturée, (pièce 47 salarié) l’employeur a supprimé à compter du 2 août 2017 cette indemnité et a attribué en compensation une indemnité forfaitaire mensuelle intitulée « Indemnité locale », calculée selon lui sur la base de la perception mensuelle moyenne des indemnités de régularisation perçues par les agents entre mai 2015 et avril 2016. (pièce 45 salarié)
L’employeur ayant estimé de 25 à 50 euros par mois l’indemnité de régularisation sur la période de référence, (pièce 45) a précisé à M. A qu’il percevrait une indemnité locale mensuelle de 30 euros du 1er août 2017 au 30 juin 2018, puis de 15 euros du 1er juillet au 31 décembre 2018, avant d’être supprimée définitivement, (pièce 45) le salarié demande un rappel de l’indemnité antérieure faisant valoir que la modification de la structure de cette indemnité, puis sa diminution et suppression constitueraient une modification de la rémunération de M.A, et que son accord aurait dû être sollicité en tant que délégué du personnel.
L’employeur rétorque que cette indemnité était liée à une sujétion particulière qui a disparue puisque désormais l’abonné dépourvu de la justification de son abonnement n’écope pas d’une amende particulière de ce fait, le contrôleur pouvant vérifier d’une autre manière la régularité de l’abonnement, ce qui lui permet d’échapper au mouvement d’humeur de l’abonné qui n’est plus sanctionné alors qu’il s’est acquitté d’un abonnement. Il soutient qu’il ne s’agit donc pas d’une part de la rémunération ;
En l’espèce, même si les agents commerciaux des trains procèdent toujours au contrôle des cartes de réduction commerciale et, le cas échéant, à la régularisation des amendes si l’abonnement n’est pas effectif, ils n’ont plus à dresser d’amendes pour des personnes pourtant régulièrement abonnées, cette sujétion a donc effectivement disparu pour l’ensemble des contrôleurs. Par ailleurs, cette prime n’était pas contractualisée et si une modification, même minime, de la rémunération, constitue une modification du contrat de travail, il n’en est rien si la tâche à laquelle est attachée une prime de nature collective n’est pas exécutée (exemple lorsqu’une tache a disparu : Cass. soc. 16-3-2011 n°08-42.671 FS-PB).
En conséquence, le Conseil de prud’hommes déboute M. A de sa demande au titre du paiement de l’indemnité locale à hauteur de l’ancienne indemnité de régularisation.
4) SUR LA DISCRIMINATION SYNDICALE :
4.1) Demande de rappel d’indemnité compensatoire de représentation
L’article L1132-1 du Code du travail dispose qu’aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, en raison de son exercice d’un mandat électif.
Il résulte des articles L. 2143-17, L.2315-3, L.324-7 et L.4614-6 du Code du travail que le temps alloué à un représentant du personnel pour l’exercice de son mandat est considéré comme temps de travail et payé à l’échéance normale. Le salarié protégé ne doit donc subir aucune perte de rémunération du fait de l’exercice de sa mission.
Par un arrêt du 4 mars 1976, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que lorsque le représentant du personnel bénéficie de prime en raison de ses conditions de travail, l’employeur doit continuer à les lui verser pendant l’exercice de son mandat, alors même qu’il n’est plus soumis à ces conditions de travail s’agissant d’une prime de productivité (Cass. Soc., 4 mars 1976, n°74-40538) ou d’une indemnité de déplacement forfaitaire constituant en fait un complément de salaire (Cass. Soc, 11 mars 2009, n°08-40 132). Le représentant du personnel ne peut être privé du fait de l’exercice de mandat, du paiement d’une indemnité forfaitaire compensant une sujétion particulière de son emploi qui constitue un complément de salaire. Tel est le cas, par exemple d’une indemnité d’habillage (Cass. Soc, 13 octobre 2004, n°02-47.725) ou d’une prime de douche (Cass. Soc, 2 juin 1992, n°88-45.662).
De même, le salarié doit percevoir ses commissions (Cass. Soc, 29 mai 2001, n°98-45.758) ; l’employeur devant calculer cette part variable en se référant au montant moyen des commissions perçues pendant les semaines précédentes (Rép. Min. n°1381, JOAN Q. 23 mars 1963).
En l’espèce, le salarié fait valoir qu’il doit percevoir son salaire habituel et notamment les primes destinées à compenser les sujétions particulières qui constituent un complément de salaire alors qu’au titre de délégué du personnel titulaire pour la période 1er janvier 2015 au 31 décembre 2018, M. A a perçu, pour chaque journée de délégation syndicale, une indemnité compensatoire de représentation (ICR), au taux journalier forfaitaire de 17,84 euros (pièce 50 salarié).
L’employeur soutient que cette indemnité correspond au montant de l’ICR applicable aux salariés de la filière commerciale trains ayant une qualification C, tel que M. A et est fondée sur la moyenne des indemnités correspondant à un métier et une qualification, en l’occurrence la filière commerciale trains et la qualification C.
Certes les dispositions d’un accord prévoyant de compenser la perte subie au titre des commissions qui auraient été perçues si le salarié concerné n’avait pas exercé de mandat en appliquant aux heures de délégation un taux horaire théorique notamment fixé en fonction de la moyenne des commissions perçues par les commerciaux ont été reconnues comme valables par un arrêt de la Cour de cassation en date du 4 juin 2014 (n°13-16 423).
Toutefois la distinction opérée en l’espèce par l’employeur selon que l’agent est rattaché à un roulement habituel et perçoit alors le montant des indemnités et des gratifications qu’il aurait perçues pour le service normalement prévu ou que l’agent est rattaché ) un service plus aléatoire tel M. A qui intervient en remplacement d’absence qui reçoit un montant journalier théorique correspondant à sa filière et à sa qualification (article 3.1.2) nécessiterait d’être justifiée par l’employeur au moyen d’une part d’un décompte précis des modalités de service du demandeur afin de savoir s’il est de manière habituelle appelé à effectuer un remplacement pendant ces jours de travail ou s’il est seulement d’astreinte ) son domicile et d’autre part des modalités de calcul de la moyenne forfaitaire.
Par ailleurs il n’est pas justifié que les primes viennent en compensation de dépenses qu’exposent réellement et nécessairement les salariés lors de leur activité plutôt qu’en compensation de tâches.
L’employeur à qui il incombait d’établir qu’il avait bien respecté la règle de maintien de traitement pour un salarié protégé, n’ayant pas justifié de ces éléments, il y lieu d’accueillir la demande du salarié de se voir accorder pour les journées de délégation sa rémunération habituelle.
M. A justifie avoir perçu un salaire de 11.848,65 euros bruts pour 396 journées de travail en service effectif, soit un salaire journalier de 11.848,65 / 396 = 29,92 euros bruts. L’indemnité perçue est donc inférieure de 12,08 euros bruts par jour.
M. A a ainsi été privé du paiement de 12,08 x 83 jours = 1. 002,64 euros bruts à titre de salaire du fait de ses journées de délégation, outre les congés payés afférents à hauteur de 100,26 euros buts (pièces 49 et 51).
En conséquence, le Conseil de prud’hommes condamne la SNCF VOYAGEURS venant aux droits de la SNCF MOBILITES à payer à M. A la somme de 1. 002,64 euros bruts à titre de rappel de salaire du fait de ses journées de délégation, outre les congés payés afférents à hauteur de 100,26 euros bruts.
4.2) Demande de dommages et intérêts ;
Le salarié sollicite la condamnation de l’employeur à lui verser la somme de 5.000 euros nets à titre de dommages – intérêts du fait de la discrimination syndicale cependant il ne justifie pas du préjudice autre que celui financier déjà réparé par la condamnation supra.
Le salarié est donc débouté de cette demande de dommage et intérêts.
5) SUR LES CONGES PAYES :
L’article L3141-3 du Code du travail dispose que le « salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur ».
L’article L.3141-9 du Code du travail précise que les dispositions relatives à al durée du congé ne portent pas atteinte aux stipulations des conventions et des accords collectifs de travail ou des contrats de travail, ni aux usages qui assurent des congés payés de plus longue durée.
Le Statut régissant les congés des agents permanent dispose que ceux-ci n’acquièrent pas 2,5 jours ouvrables de congés par mois (soit 30 jours ouvrables) mais bénéficient dès le début de l’année civile (et non du 1er juin au 31 mai) d’un crédit congés de 28 jours ouvrés.
Le salarié expose que l’employeur ne lui accorderait pas l’intégralité de ses jours de congés payés contrevenant ainsi à une disposition d’ordre public.
L’employeur fait valoir en premier lieu que les textes régissant les congés en son sein, pris en application du statut sont donc à caractère administratif et que, dès lors, seule la juridiction administrative est compétente pour se prononcera sur la légalité d’un acte administratif.
Cependant le salarié ne demande pas au Conseil de prud’hommes de se pencher sur les dispositions du statut mais sollicite qu’il lui soit fait application des articles L3141-3 et L.3141-9 et des textes prohibant la discrimination du Code du travail et non du statut de la SNCF instaurant une différence.
Par plusieurs arrêts en date du 13 novembre 2008 (n°07-43126 à 07-43158), la Cour de cassation a jugé « qu’en cas de décompte des congés payés en jours ouvrés, qu’il s’agisse de jours ouvrés dans l’entreprise, ou de jours ouvrés par le salarié, il appartient à l’employeur de démontrer, au titre de la durée des congés payés, que le salarié a bénéficié du nombre de jours ouvrables de congés payés auxquels il a droit en application de dispositions légales, ou conventionnelles les régissant ; qu’un salarié travaillant à temps partiel doit bénéficier du même nombre de jours ouvrables de congés payés qu’un salarié à temps complet ».
En l’espèce, M.A est employé à temps partiel à 89,08%.
Il ne bénéficie que de 25 jours de congés payés par an alors que ses collègues à temps complet ont 28 jours ; compte tenu des textes applicables proscrivant une différence de traitement au regard du temps partiel, le salarié doit avoir dès le début de l’année civile (et non du 1er juin au 31 mai) un crédit congés de 28 jours ouvrés ou 30 jours ouvrables si cette disposition est plus favorable que celle du statut.
La SNCF VOYAGEURS fait valoir que « lorsque M.A veut prendre 1 semaine de congés, il ne pose en réalité que 4 jours et demi de congés payés, c’est-à-dire le nombre de jours ouvrés habituellement travaillés et que dès lors, en bénéficiant de 25 jours de congés payés, M. A bénéficie en réalité de plus de 5 semaines de congés payés, au même titre que les agents à temps complet ». Cependant il ne résulte d’aucun texte d’ordre public que le décompte des congés payés doive s’exprimer en semaine, les dispositions légales ne mentionnant que les jours ;
Par conséquent, le Conseil des prud’hommes condamne la SNCF VOYAGEURS venant aux droits de la SNCF MOBILITES à payer à M.A la somme de (18 x 140,92 euros) soit 2. 536,56 euros bruts à titre de rappel de 18 jours de congés payés pour les années 2016 à 2021.
6) SUR LES DOMMAGES-INTERETS POUR PREJUDICE DU FAIT DE L’INEGALITE DE TRAITEMENT :
L’égalité entre les personnes, et par conséquent entre les salariés est un droit fondamental proclamé aussi bien par la Déclaration des droits de l’Homme de 1789 que par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. La Cour de cassation a posé ce principe « à travail égal, salaire égal » en retenant « que l’employeur est tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés de l’un ou l’autre sexe, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ».
En l’espèce, M. A fait valoir qu’il aurait été victime d’une inégalité de traitement vis-à-vis des salariés employés à temps plein au regard de la réduction de son nombre de jours de congés payés au prorata de son temps partiel.
Certes il a été jugé supra que son droit à congés avait été réduit en contrevenant à une disposition d’ordre public cependant si jusqu’au 13 avril 2016, la Cour de cassation considérait que certains manquements commis par un employeur causaient en eux-mêmes nécessairement préjudice au salarié, ouvrant ainsi droit au versement de dommages intérêts, et cela indépendamment du préjudice réellement subi par le salarié, dorénavant, la Cour de cassation revient, en droit du travail à une application des règles de la responsabilité civile où la partie lésé doit justifier de l’existence du préjudice qu’elle allègue et exige que le salarié fasse la démonstration, pièces à l’appui, du préjudice qu’il a réellement subi, qui est évalué souverainement par les Juges du fond. Faute de satisfaire à cette exigence, il ne percevra aucune indemnisation.
En l’espèce, le salarié ne verse pas de pièces pour justifier du préjudice résultant des faits retenus ; le Conseil de prud’hommes déboute le salarié de sa demande de dommages et intérêts en l’état des pièces versées au dossier.
7) SUR LA REMISE DE BULLETINS DE PAIE CONFORMES AU JUGEMENT
Afin de permettre au salarié l’exercice de ses droits sociaux, il y a lieu d’ordonner la remise par la SNCF VOYAGEURS à M. A d’un bulletin de paie récapitulatif conforme à ce jugement sans qu’il soit justifié d’assortir cette injonction d’une astreinte.
8) SUR LE CALCUL DES INTERETS :
Au regard du caractère alimentaire du salaire, il y a lieu de dire que les condamnations prononcées sont assorties des intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter de la notification pour les sommes à caractère indemnitaire.
9) SUR L’EXECUTION PROVISOIRE :
Aucun élément ne justifie de déroger à la règle relative à l’exécution provisoire en droit social ; le salaire moyen mensuel de référence est de 3. 523 euros brut.
10) SUR L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE ET LES DEPENS :
L’employeur succombant est condamné aux dépens et à verser au salarié la somme de 1. 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et est débouté de sa demande à ce même titre.
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
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