Dans un arrêt très motivé (19 pages) du 11 mai 2023 de la Cour d’appel de Paris (Pole 6 chambre 5) une responsable comptable de Re:sources (Publicis) obtient en appel 87 000 euros au total pour discrimination salariale, traitement discriminatoire, défaut de mise en œuvre régulière de la prévoyance, violation de l’obligation de sécurité, harcèlement moral, licenciement nul.
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 11 mai 2023 est définif, les parties ne se sont pas pourvues en cassation.
1) EXPOSE DU LITIGE :
Par contrat de travail à durée indéterminée du 16 juin 2008, Mme X a été embauchée par la société Re:sources France en qualité de responsable de dossier.
En dernier lieu, elle exerçait les fonctions de responsable comptable, niveau 3.2, statut cadre.
Depuis le mois d’avril 2013, placée en invalidité catégorie 1, elle occupait ses fonctions à temps partiel et bénéficiait d’un forfait annuel de 112 jours de travail, pour une rémunération calculée au prorata de son temps de présence sur la base salaire de 3 747 euros brut pour une durée de travail à temps complet.
Le 1er septembre 2016, lors d’un entretien avec le directeur des ressources humaines, puis par courrier du 19 janvier 2017, Mme X a dénoncé les agissements de harcèlement moral et la discrimination en raison de son état de santé dont elle s’estimait victime.
Par courrier du 19 juin 2018, Mme X a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 5 juillet 2018 puis repoussé au 14 août 2018 et s’est vu notifier son licenciement pour insuffisance professionnelle le 28 août 2018.
La convention collective applicable à la relation de travail est celle de la publicité et la société Ressource France employait au moins 11 salariés.
Contestant son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 12 mai 2019 afin d’obtenir la nullité du licenciement et des dommages-intérêts pour discrimination, harcèlement moral, violation de l’obligation de sécurité, défaut de mise en œuvre de la prévoyance.
Par jugement du 22 mars 2021 auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Paris a débouté Mme X de l’ensemble de ses demandes.
Mme X a régulièrement relevé appel du jugement le 7 juin 2021.
2) MOTIVATION :
Dans son arrêt du 11 mai 2023 (Pole 6 Chambre 5), la cour d’appel de Paris, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
. Rejette la demande d’annulation du jugement,
. Infirme le jugement dans toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
. Condamne la société Re:sources France à verser à Mme X les sommes suivantes :
- 7 956 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour discrimination salariale,
- 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi pour traitement discriminatoire,
- 15 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour défaut de mise en œuvre régulière de la prévoyance,
- 2 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour violation de l’obligation de sécurité,
- 5 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour harcèlement moral,
. Prononce la nullité du licenciement,
. Condamne la société Re:sources France à verser à Mme X la somme de 45 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul,
. Dit que les intérêts au taux légal sont dus à compter de la présente décision,
. Ordonne à la société Re:sources France de remettre à Mme X un bulletin de paie récapitulatif, une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes à la présente décision,
. Condamne la société Re:sources France à rembourser à l’organisme concerné les indemnités de chômage éventuellement versées à Mme X depuis son licenciement dans la limite de six mois,
. Déboute Mme X du surplus de ses demandes,
. Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Re:sources France,
. Condamne la société Re:sources France aux dépens et à verser à Mme X la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
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2.1) Sur la nullité du jugement :
Mme X sollicite l’annulation du jugement en soutenant que les premiers juges ont statué et motivé leur jugement en des termes incompatibles avec l’exigence d’impartialité, en violation de l’article 6 & 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux termes duquel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial.
Elle reproche au conseil de prud’hommes d’avoir repris l’exacte position de l’employeur et affirmé des motivations strictement contredites par ses pièces et écritures traduisant de fait sa partialité, les premiers juges ayant pris fait et cause pour l’employeur. Elle dénonce les conditions de la tenue de l’audience de plaidoirie du 22 mars 2021 et son manque d’équité en soutenant que la décision a été prise sans examen des pièces communiquées avec un temps de parole limité pour elle et le Défenseur des droits, observant en outre que le président et directeur des ressources humaines de la société Re:sources est également président de l’une des chambres de la section encadrement du conseil de prud’hommes de Paris, élu sur une liste de l’organisation patronale du Medef comme l’était la présidente de la formation ayant statué.
Enfin, elle critique la motivation du jugement en ce qu’elle n’a pas tenu compte de ses pièces moyens et arguments.
La société Re:source France conclut au débouté en faisant valoir qu’en application de l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, l’impartialité d’un magistrat se présume jusqu’à preuve du contraire et qu’aucun élément ne permet de prouver les allégations de Mme X quant à l’absence d’examen des pièces par les premiers juges. Elle rappelle que ceux-ci ne sont pas tenus lorsqu’ils usent de leur pouvoir souverain d’appréciation de s’expliquer sur les éléments de preuve qu’ils décident d’écarter ni même de viser ces pièces.
Elle fait valoir qu’en réalité la critique de Mme X ne vise qu’à reprocher au conseil de prud’hommes d’avoir retenu que ses pièces ne démontrent pas la réalité de ses allégations.
Elle ajoute que Mme X n’apporte aucun élément de preuve sur le temps de parole de son conseil à l’audience qui aurait été limité et soutient enfin que le seul fait de l’appartenance d’un conseiller prud’homal à un syndicat n’est pas suffisant pour caractériser la partialité
dénoncée.
La cour rappelle qu’en application de l’article R. 1454–25 du code du travail, la décision du conseil de prud’hommes peut valablement être rendue à l’issue des débats.
Dès lors, Mme X ne peut se prévaloir de cette situation pour soutenir, sans l’établir par d’autres éléments concrets, que les premiers juges n’ont pas examiné les pièces du dossier.
Par ailleurs, elle n’apporte aucun élément pour prouver la partialité des juges lors de la tenue de l’audience de plaidoirie. Enfin s’agissant de l’appartenance syndicale de la présidente de la formation de jugement et du président de la société ressource France la cour rappelle qu’il résulte de l’article L 1457–1 du code du travail que la circonstance qu’un ou plusieurs membres d’un conseil de prud’hommes appartiennent à la même organisation syndicale que l’une des parties au procès n’est pas de nature à affecter l’équilibre d’intérêts inhérents au fonctionnement de la juridiction prud’homale ou à mettre en cause la partialité de ses membres.
Par ailleurs, si un jugement ne doit pas se borner au titre de sa motivation à reproduire sur tous les points en litige, à l’exception de quelques aménagements du style, les conclusions de l’employeur, il n’en demeure pas moins que le juge apprécie souverainement les éléments de faits qui lui sont présentés, qu’il peut reproduire certains paragraphes des conclusions de la partie à laquelle il est donné satisfaction dès lors que sa décision est motivée, comme c’est le cas en l’espèce et qu’il n’a pas à rentrer dans le détail des arguments des parties ni s’expliquer sur les pièces qu’il écarte.
Dès lors que le jugement critiqué ne révèle pas la partialité alléguée, la cour rejette la demande de nullité présentée.
2.2) Sur la discrimination alléguée :
Mme X soutient que pendant plus de huit ans elle a subi une discrimination fondée sur son état de santé qui s’est manifestée par :
- l’absence d’évolution salariale contrairement à ses collègues dans une situation identique
à la sienne et ce en dépit de ses demandes d’augmentation, en raison de la volonté délibérée de M. D de geler son salaire,
- le refus de la société d’adapter et de modifier son poste de travail conformément aux préconisations du médecin du travail et aux alertes de la salariée,
- le rejet injustifié de ses demandes de mobilité.
La société Re:sources France conclut au débouté en soutenant que Mme X n’a été victime d’aucune discrimination salariale en raison de son état de santé, qu’elle n’a subi aucune inégalité de traitement et a été traitée de la même façon que les salariés qui se trouvent dans une situation comparable à la sienne et qu’elle ne présente aucun élément de nature à établir l’existence d’une inégalité de traitement dès lors qu’elle a bénéficié d’augmentations de salaires et de primes régulières.
La cour rappelle que toute discrimination en raison de l’état de santé est prohibée par l’article L. 1132-1 du code du travail et qu’en application de l'article L.1134-1 du même code, en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné entant que de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il en résulte que lorsque le salarié présente des éléments de faits constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’une discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs qui y sont étrangers.
i) Sur l’absence d’évolution salariale :
Mme X fait valoir que depuis 2010 son salaire n’a jamais augmenté, contrairement à celui de ses collègues du même service, engagés en qualité de responsables et s’appuie sur ses bulletins de paie qui révèlent selon elle, qu’en 2010, elle avait un salaire de base de 3 290,97 euros et une indemnité “accord 35 heures” de 376,03 euros soit un salaire de base total de 3 667 euros brut, salaires qu’elle conservait en 2011 et 2012.
Elle soutient que si en 2013, par l’application d’une convention de forfait en jours illicite puisqu’elle ne l’a pas acceptée, elle a vu son salaire augmenter de 40 euros il s’agissait d’une compensation des heures supplémentaires dont elle a bénéficié à l’instar de tous ses collègues de sorte que son salaire mensuel brut de base est passé à 3 707 euros. Elle précise qu’en 2014, son salaire était calculé sur une base de 3 747 euros brut qu’il en était de même en 2015, en
2016 en 2017 et jusqu’au mois de juin 2018, mois à partir duquel son salaire a été augmenté de 50 euros.
Elle soutient que depuis 2012, elle sollicitait des augmentations en communiquant les mails en ce sens de 2012, 2013 et qu’elle se heurtait à la volonté délibérée de M. D, directeur du service de comptabilité générale de geler son salaire.
Elle communique un mail de sa part adressé à ce dernier le 26 juillet 2016 s’étonnant de cette situation ainsi qu’une attestation de sa supérieure hiérarchique, Mme V selon laquelle celle-ci demandait chaque année qu’une augmentation soit accordée à Mme X et que M. D rayait son nom de la liste en disant que c’était lui qui décidait “pour X ”;
Elle procède à une comparaison avec les bulletins de paie de 9 salariés placés dans une situation comparable à la sienne, en contrat de travail à durée indéterminée, avec une ancienneté et une expérience comparable ou inférieure à la sienne et des diplômes similaires dont il ressort selon elle que tous ont connu en 5 à 10 ans un pourcentage d’augmentation de salaire supérieur au sien et que son salaire, sur la base d’un temps plein, est inférieur à celui de 5 d’entre eux.
ii) Sur le refus de la société d’adapter et de modifier son poste de travail conformément aux préconisations du médecin du travail et à ses alertes,
Mme X fait valoir qu’au-delà de lui appliquer une convention de forfait sans son accord exprès la société n’a procédé à aucun recrutement pour pallier la réduction de son temps de travail et lui a affecté un binôme qui travaillait déjà à temps plein et fonctionnait déjà avec un autre binôme, se référant à l’attestation en ce sens de Mme V ainsi que sur le registre d’entrée et de sortie du personnel mais également les tableaux de synthèse des salariés du service de comptabilité générale qu’elle a établi.
Elle soutient qu’en réalité, la société continuait de lui confier des missions et une charge de travail correspondant à un temps plein pour les périodes de fin et de début de mois en lui attribuant la gestion comptable et fiscale de sociétés nécessitant de respecter des délais incompressibles et donc incompatible avec l’organisation d’un travail à temps partiel.
Elle se réfère au listing des tâches à effectuer pour les arrêtés comptables, à un courrier de la société de juin 2011 lui rappelant les délais incompressibles et sur les préconisations du médecin du travail prévoyant une étude de poste, de favoriser le télétravail et un allégement de la charge de travail.
iii) Sur le refus de lui accorder une mobilité :
Mme X fait valoir qu’à deux reprises sa demande de mobilité a été rejetée, une première fois en janvier 2015 alors qu’elle sollicitait son transfert dans le cadre du projet A sur un emploi de support et une seconde fois en février 2015 lorsqu’elle formulait une demande de mobilité volontaire auprès du service des Re:sources humaines versant au débat ses demandes de reclassement.
Cet ensemble de faits permet de présumer une discrimination en raison de l’état de santé de la salariée et il appartient à l’employeur de démontrer que les faits sont justifiés par des éléments objectifs qui y sont étrangers.
iv) Sur l’absence d’évolution salariale :
La société Re:source France fait valoir que depuis son embauche, dans un contexte de gel de salaire depuis 2009, Mme X a bénéficié de primes et d’augmentations individuelles de salaire à échéances régulières et, en dernier lieu, au cours de l’année 2018.
Elle soutient que dans le panel de comparaison avec 8 autres salariés dont Mme X fait état, 3 d’entre eux ne peuvent valablement être comparés avec elle dans la mesure où :
- l’une, Mme S, travaille sur la gestion de dossiers complexes et est en charge de
Publicis groupe SA maison-mère de Publicis avec de nombreuses déclarations spécifiques,
- un autre, M. G dispose d’un diplôme d’expert-comptable et un bagage universitaire supérieur
- la troisième Mme K a des fonctions de management et un niveau de diplôme supérieur équivalent à Bac + 4 ainsi qu’une ancienneté supérieure de huit ans à celle de Mme X.
S’agissant des 5 autres salariés, la société fait valoir que Mme D, si elle a une ancienneté inférieure à celle de Mme X dispose de diplôme supérieur mais la cour observe que la comparaison de son bulletin de salaire de décembre 2018 avec celui de Mme X en juin 2018 fait apparaître un salaire de base de 3 355,74 euros, inférieur à celui de Mme X.
Il en est de même pour M. A, qui disposent d’un master en comptabilité préparait en 2016/ 2017 le DSCG en candidat libre et bénéficiait en décembre 2018 ainsi qu’en justifie son bulletin de salaire d’un salaire de base de 3333,34 euros inférieur à celui de Mme X. Il en est de même pour M. G et Mme N. Mme K enfin n’est pas du même niveau que Mme P puisqu’elle est chef comptable niveau 3.3 et dispose d’une ancienneté plus importante que celle de Mme X.
La cour relève toutefois que la société n’est pas en mesure de justifier pourquoi avec un niveau d’ancienneté à peine supérieur remontant au 5 février 2007, M. G perçoit une rémunération qui s’élevait en juin 2018 à niveau de diplôme égal (bac+2) à un niveau de rémunération supérieur à celui de Mme X, soit 4 112,54 euros en juin 2018 et ce depuis le début de l’année 2018 alors qu’elle-même perçoit 3 747 euros depuis juin 2018, aucun élément du dossier justifiant qu’une différence d’ancienneté de deux années entraîne une différence de salaire de 400 euros.
Par ailleurs s’agissant de Mme S, il n’est pas justifié de la complexité particulière de ses dossiers, le seul fait qu’elle soit chargée de la comptabilité de la société Publicis group n’y suffisant pas en l’absence d’éléments objectifs venant le démontrer alors qu’elle bénficie d’un niveau de diplôme équivalent à celui de Mme X et que son ancienneté est de cinq ans moindre.
v) Sur l’absence d’augmentation de salaire de Mme X :
La société fait valoir qu’un gel des salaires a été instauré dès 2009, que le comité d’entreprise en a été avisé et que dès 2011, il a été annoncé que des augmentations individuelles seraient étudiées au cas par cas.
La société fait valoir que pendant cette période de gel des salaires, certains des collègues de Mme X ont été augmentés à titre individuel et exceptionnel au même titre qu’elle-même en 2013, et fait remarquer que lors d’une réunion du comité d’entreprise du 27 avril 2018 celui-ci a indiqué que certains collaborateurs n’avaient pas eu d’augmentation depuis plusieurs années.
La société justifie en produisant un compte-rendu du comité d’entreprise du 25 février 2009 qu’un gel de salaire a effectivement été annoncé et confirmé lors des réunions du 17 mars 2009 et du 21 juillet 2009. Toutefois, dès lors que ces mêmes comptes-rendus font état de dérogations la cour observe qu’il n’est pas justifié que les salariés qui étaient également en poste à cette époque-là comme M. G ou Mme K ont également subi un gel de leur salaire, alors qu’il ressort du courrier de Mme X en date du 22 juin 2011 que l’ensemble du service comptable a bénéficié d’augmentations de salaire grâce à la levée du gel en février dernier mais pas elle.
La cour relève en outre que dans un courrier du 11 mars 2013 lui annonçant l’augmentation de son salaire de base à 3 707 euros, la société explique à Mme X que cette augmentation correspond à l’intégration, dans sa rémunération mensuelle, de la somme de 40 euros correspondant à la monétisation de la moyenne des heures supplémentaires payées au cours des années 2009 et 2010, comme celle-ci le soutient et ne représente donc pas une augmentation individuelle de salaire.
Par ailleurs sur l’attestation de la supérieure de Mme X, la société soutient que cette attestation est sans valeur probatoire dans la mesure où Mme V est en litige avec elle en produisant la copie de sa convocation devant le bureau de conciliation en date du 4 mai 2016. L’existence de ce différend ne suffit pas cependant pas à ôter tout crédit à cette attestation alors que les commentaires portés par Mme V sur les comptes-rendus d’entretien annuel de Mme X font apparaître sa satisfaction du travail de celle-ci et qu’aucun élément objectif n’est produit pour en contredire le contenu.
vi) Sur le refus de la société d’adapter son poste de travail et de prendre en compte les
préconisations du médecin du travail :
La société Ressource fait valoir qu’elle a mis en œuvre des mesures en faveur de Mme X lui permettant d’exécuter son travail dans les meilleures conditions possibles conformément aux préconisations du médecin du travail en détaillant dans un tableau inséré dans ses écritures les mesures prises, notamment un allègement de sa charge de travail et l’intervention d’un binôme, (M. De D) se référant expressément aux entretiens d’évaluation de celui-ci qui font apparaître cette assistance ainsi qu’à un tableau dont l’origine n’est pas connue ni justifée faisant apparaître qu’entre 2017 et 2018 Mme X a passé 1131 écritures contre 1618 pour M De D.
Elle se réfère également à l’attestation de Mme W qui explique que la gestion comptable de la société M confiée à Mme P de janvier 2015 à novembre 2018 ne représentait, selon elle, qu’une ou deux journées de travail par arrêtés mensuels. À cet égard la cour observe que Mme X le conteste en produisant le planning de clôture mensuelle résumant les tâches et étapes de clôture qui se déroulent, pour cette société, sur cinq jours.
La société verse encore aux débats des copies d’écran de validation des comptes sur 36 périodes comptables faisant apparaître que Mme X est apparue dans moins de la moitié des cas sur les années 2016 à 2018 et de moins en moins au fil des ans de sorte que selon elle, est ainsi prouvée une charge de travail de moins en moins importante.
Cependant à cet égard la cour relève avec Mme X qu’aucun élément objectif ne vient corroborer ces chiffres et que par ailleurs, pendant l’année 2018, Mme X n’a travaillé que jusqu’en juin, a été arrêtée du 23 mars au 3 juin et du 26 février au 11 mars de sorte que les chiffres sont le reflet de ces absences. Par ailleurs, la société effectue une comparaison avec une autre responsable comptable, également en temps partiel, démontrant que la taille des agences de son portefeuille a diminué de même que le total des actifs qu’elle gérait. La cour relève toutefois que ce tableau qui ne concerne pas Mme X est inopérant pour justifier que les préconisations du médecin du travail ont été respectées. Enfin, la cour relève que l’employeur n’apporte aucune justification au fait que la journée de télétravail dont le médecin du travail demandait qu’elle soit « favorisée » en décembre 2017 n’a pas été mise en place sans que l’employeur justifie des raisons qui s’y opposaient et qu’il ressort d’un mail adressé le 11 décembre 2017 par M. D qu’il estimait que cela engendrerait des difficultés supplémentaires, compte tenu notamment de la situation précaire du fait des nombreuses absences de la salariée et ce, alors que le 6 mai 2016 Mme V écrivait à M. D qu’il fallait reparler du binôme « X/Z » qui fonctionne mais qui ne permet pas toujours à Mme X de terminer le reporting, ce dont il ressort que la salariée restait soumise à des impératifs de délais.
vii) Sur les refus de mobilité :
L’employeur fait valoir que lorsqu’en janvier 2015 Mme X a demandé à intégrer de manière permanente le service chargé de mettre en place le RP A, elle a été reçue par le responsable mais aucun poste n’était disponible dans la mesure où la migration française était terminée lorsqu’elle a formulé sa demande, ce qui est confirmé par le propre mail de Mme X en date du 24 février 2015 par lequel elle fait état du refus qui lui a été opposé. Le refus est donc justifié par des éléments objectifs étrangers à la discrimination alléguée.
Par ailleurs l’employeur reste taisant sur la demande formulée par Mme X en février
2015 dans ce même mail par lequel elle propose sa candidature dans le cadre de la création d’un nouveau service « centre d’expertise».
En définitive, la cour considère que Mme X justifie de l’absence d’évolution de son salaire pendant plusieurs années sans que l’employeur ne soit en mesure d’établir que, comme il le prétend, cette stagnation correspondait à un gel de salaire de l’ensemble des salariés dont la situation était comparable à celle de Mme X, de ce que son salaire était inférieur à celui de deux salariés de même niveau qu’elle, de ce qu’elle a fait l’objet d’un refus de mobilité non justifié et de ce que les préconisations du médecin du travail quant au respect de son temps partiel, à l’allégement de sa charge et l’instauration d’un télétravail n’ont pas été respectées. Dès lors que l’employeur n’est pas en mesure de démontrer que ces faits sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, celle-ci est caractérisée.
2.3)Sur le harcèlement moral :
Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
L’article L.1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il en résulte que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble laissent présumer l’existence d’un harcèlement moral et dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs qui y sont étrangers.
Mme X soutient que pendant plus de huit ans elle a subi des agissements de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie consécutifs à ses problèmes de santé et matérialisés par les actes suivants :
- blocage de ce de l’évolution de sa rémunération,
- refus d’adaptation de son poste de travail conformément aux préconisations du médecin du travail,
- charge de travail et mission incompatibles avec la préservation de son état de santé,
- absence de prise en compte de ses alertes,
- refus de régulariser un avenant de passage à temps partiel déterminant les dates et jours de travail et les bulletins de paie,
- refus injustifié de ses demandes de mobilité interne,
- comportement humiliant et dégradant de M. D,
- affichage dans les locaux d’un procès-verbal de réunion de comité d’entreprise diffamante et l’accusant d’abus de droit,
- refus de lui accorder une journée de télétravail et retrait de son matériel informatique portable,
- exclusion du petit-déjeuner trimestriel du service de comptabilité générale.
Le blocage de l’évolution de la rémunération, le refus d’adapter le poste de travail conformément aux préconisations du médecin du travail, la charge de travail incompatible avec la préservation de l’état de santé, l’absence de prise en compte des alertes et le refus injustifié d’une demande de mobilité interne de Mme X ont été considérés comme établis par la cour comme il a été vu précédemment.
S’agissant du refus d’établir un avenant au contrat de travail consacrant le temps partiel thérapeutique de Mme X, celle-ci indique avoir obtenu, plus de quatre ans après sa mise en invalidité, un rendez-vous avec le responsable de la paie pour régulariser la situation au regard de ses bulletins de paie qui ne faisaient pas apparaître la somme perçue au titre de la sécurité sociale. Elle indique que lui a été soumise une proposition d’avenant faisant mention de façon erronée qu’elle travaillait à mi-temps depuis le 9 novembre 2016.
Enfin, elle s’appuie sur un courriel de sa part du 29 juin 2017 faisant état du désaccord sur la date de début du passage à temps partiel et d’une proposition d’avenant régularisé à laquelle aucune suite n’était donnée.
Les faits sont donc matériellement établis.
Sur le comportement humiliant de M. D, Mme X fait valoir qu’à partir de 2016 lorsque M. D est devenu son supérieur direct et jusqu’en 2018, elle n’a plus eu d’entretiens annuels d’évaluation, que celui-ci se montrait très intrusif et lui demandait plusieurs fois par jour où elle en était que lorsqu’elle lui a remis des documents le 22 mars 2018 pour relecture et validation il a ouvert le dossier et le lui a jeté en disant “c’est déjà fait”. Elle explique qu’elle en a ressenti un choc et a été hospitalisée dès le lendemain. La cour observe qu’aucun élément matériel ne vient établir les allégations de la salariée relative au comportement humiliant de M. D à son égard mais que cependant il n’est pas justifié des entretiens d’évaluation pour 2016 et 2017
Sur l’affichage dans les locaux d’un procès-verbal de réunion du comité d’entreprise l’accusant d’abus de droit, Mme X fait valoir que le 20 septembre 2016, à la suite de son entretien, elle a été contactée par M. L et qu’une réunion s’est tenue en présence de Mme P qui a attesté de ce que M. L avait indiqué que les enquêtes diligentées par le CHSCT n’aboutissaient jamais en faveur de la personne harcelée, qu’il avait dit qu’il était conscient du harcèlement que subissait Mme X et qu’il lui a indiqué qu’il valait mieux qu’elle annule la demande d’enquête qu’elle avait faite, lui proposant d’organiser une nouvelle réunion avec un médiateur ce qu’elle avait accepté.
Elle explique qu’elle a dû être hospitalisée pendant deux semaines et qu’à son retour le 18 novembre 2016, elle a été avisée qu’un procès-verbal d’une réunion avait été affiché à tous les étages et que son nom y été expressément cité dans des conditions diffamatoires. Elle verse aux débats la note que lui a remise l’employeur faisant état de ce que le CHSCT refusait de diligenter une enquête et l’attestation de Mme P.
Sur l’exclusion du petit-déjeuner trimestriel du service de comptabilité générale
Mme X fait valoir que cette rencontre programmée le 12 février 2018 a été décalée au lendemain, jour non travaillé pour elle, de sorte qu’elle n’a pu y assister et verse aux débats le mail de M. D du 8 février 2018 annonçant cette modification.
Ces faits pris dans leur ensemble laissent présumer des agissements de harcèlement moral et il appartient à l’employeur de démontrer qu’ils sont justifiés par des éléments objectifs qui sont étrangers.
Pour le blocage de l’évolution de sa rémunération, le refus d’adaptation de son poste de travail conformément aux préconisations du médecin du travail, la charge de travail et les missions incompatibles avec la préservation de son état de santé, l’absence de prise en compte de ses alertes, la cour a retenu que l’employeur n’était pas en mesure de justifier que les faits étaient justifiés par des éléments étrangers à toute discrimination et il ne démontre pas davantage qu’ils sont étrangers aux agissements de harcèlement moral dénoncés.
Pour le refus de régulariser un avenant de passage à temps partiel déterminant les dates et jours de travail et la régularisation des bulletins de paie, l’employeur fait valoir que Mme X a bien poursuivi son activité dans le cadre d’un temps partiel mais que sa rémunération a été maintenue sur la base d’un temps plein pour la période 2011 à 2016 de sorte que l’absence de régularisation d’un contrat de travail écrit à temps partiel ne lui a pas porté préjudice.
La cour relève toutefois que l’employeur ne justifie pas des raisons objectives pour lesquelles la situation de Mme X n’a pas été régularisée.
Sur le refus injustifié de la seconde demande de mobilité interne, la cour a relevé précédemment que l’employeur n’était pas en mesure de justifier des raisons objectives pour lesquelles la mobilité interne de Mme X a été refusée.
Sur le comportement humiliant et dégradant de M. D, la cour considère que si ces faits ne sont pas matériellement établis, il n’en demeure pas moins que l’employeur n’est pas en mesure de justifier pour quelles raisons objectives étrangères à tout élément de harcèlement Mme X n’a pas été évaluée entre 2016 et 2018.
Sur l’affichage dans les locaux d’un procès-verbal de réunion de comité d’entreprise diffamante et l’accusant d’abus de droit, l’employeur fait valoir que le comité d’entreprise a décidé de lui-même de ne pas poursuivre d’enquête à la suite de l’alerte effectuée par Mme X sur le harcèlement moral en parlant d’abus de droit dans son procès-verbal, que les membres du CHSCT ont décidé à l’unanimité de ne pas poursuivre l’enquête et que cet avis a été partagé par les membres du comité d’entreprise , ainsi que cela ressort des procès-verbaux communiqués et que le procès-verbal de la réunion du comité d’entreprise du 14 septembre 2016 a été affiché par le secrétaire du comité d’entreprise le 18 novembre 2016 avant qu’il n’y substitue le même procès-verbal anonymisé à la suite de la réaction de plusieurs salariés.
L’employeur justifie ainsi l’affichage par des éléments extérieurs, étrangers à tout agissements de harcèlement moral.
Sur le refus de lui accorder une journée de télétravail et le retrait de son matériel informatique portable, l’employeur fait valoir que les missions de Mme X étaient incompatibles avec le télétravail en raison de l’amélioration de l’efficience de la fonction comptable avec une meilleure gestion des absences et des remplacements et une gestion plus efficace de l’évolution des nombreux applicatifs acceptables.
Il soutient que la mise en place du télétravail aurait entraîné un véritable risque pour la sécurité des données financières alors que le travail sur site permettait une plus grande garantie et que la charte du télétravail au sein du groupe Publicis prévoit que sont notamment éligibles les salariés en capacité d’organiser par eux-mêmes leur activité en télétravail et dont le temps de travail est supérieur ou égal à 80 %. S’agissant du matériel informatique nécessaire pour l’accès à distance il a été retiré Mme X car son accès à distance a été supprimé.
L’employeur ne justifie cependant pas ainsi par des éléments objectifs à tout élément de harcèlement moral pourquoi le matériel informatique et la possibilité d’exercer en télétravail a été supprimée à Mme X alors qu’elle en bénéficiait depuis plusieurs années et que le médecin du travail le préconisait.
Sur l’exclusion du petit-déjeuner trimestriel du service de comptabilité générale, la cour observe que l’employeur n’apporte aucune explication des motifs de ce changement de sorte qu’il n’établit pas que le décalage du petit-déjeuner est justifié par des éléments objectifs étrangers à tout agissements de harcèlement moral.
En définitive, il résulte de ce qui précède que l’employeur échoue à démontrer que tous les faits matériellement établis par la salariée qui pris dans leur ensemble laissaient supposer des agissements de harcèlement moral étaient en réalité justifiés par des éléments objectifs qui y étaient étrangers. Dès lors le harcèlement moral est caractérisé.
2.4)Sur la rupture du contrat de travail :
2.4.1 ) Sur la nullité du licenciement :
Mme X sollicite la nullité du licenciement en faisant valoir que celui-ci est fondé sur son état de santé car l’employeur l’a délibérément empêchée de la mettre en mesure d’exécuter correctement ses missions contractuelles en lui confiant des missions incompatibles avec l’organisation de son temps partiel lui imposant de travailler un jour sur deux et en ne mettant pas en œuvre les préconisations du médecin du travail.
Elle soutient que les griefs exposés dans la lettre de licenciement ne sont pas constitués ou sont directement en lien avec les absences liées à son état de santé. Enfin elle fait valoir que l’insuffisance professionnelle a été curieusement révélée au bout de huit ans alors qu’aucun reproche professionnel ne lui avait jamais été fait auparavant.
L’employeur conclut au débouté, faisant valoir que l’insuffisance professionnelle de la salariée est caractérisée et illustrée par les exemples cités dans la lettre de licenciement et ce alors qu’un soutien a été apporté à Mme X dans le cadre de son mi temps thérapeutique qui aurait dû lui permettre de mener bien ses tâches dans le respect des préconisations du médecin du travail.
La cour rappelle qu’en application de l’article L. 1132-4 du code du travail, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en raison d’une discrimination est nul.
La lettre de licenciement faisant état de l’insuffisance professionnelle de la salariée, il convient dans un premier temps d’examiner si les faits sont caractérisés afin d’apprécier le caractère discriminatoire du licenciement.
L'incompétence ou l'insuffisance professionnelle d'un salarié se manifeste par sa difficulté à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté et peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement si elle fait l'objet d'une appréciation objective.
Il n'est pas nécessaire que l’inadaptation à l’emploi ou l’incompétence du salarié se soient traduites par une faute. Il importe cependant que les insuffisances alléguées par l’employeur se soient manifestées par des éléments extérieurs, par des anomalies de nature à entraver la bonne marche de l’entreprise, et susceptibles de vérifications objectives.
2.4.2) Sur les insuffisances relevées par l’employeur :
1- Sur le non-respect des consignes pour l’établissement des comptes annuels :
La lettre de licenciement fixant les limites du litige est rédigée dans les termes suivants :
« Par mail du 25 janvier 2018, votre responsable hiérarchique, le directeur comptable, a adressé à l’ensemble du service des instructions précises, avec, notamment, la liste des éléments à préparer, en vue de l’audit relatif à l’établissement des comptes annuels 2017 (bilan, compte de résultat, annexe, rapport de gestion), en précisant que l’ensemble des documents devait être finalisé avant le 28 février 2018 (sachant que la réalisation de ces documents de travail nécessite de l’ordre de 5 à 6 jours de travail). À cette date, vous n’aviez préparé aucun des éléments requis. Vous n’aviez pas commencé à travailler sur les comptes annuels avant la date butoir du 28 février 2018 ; par ailleurs, à votre retour d’arrêt de travail, le 11 mars dernier, vous avez supprimé, sans raison, les projets préparés pendant votre absence et recommencé le travail depuis le début. Les documents sur lesquels vous avez travaillé contenaient, en outre, des anomalies. En conséquence :
la plupart des questions des commissaires aux comptes a été traitée par vos
collègues (votre binôme) ou par votre responsable hiérarchique ;
cela a entraîné un surcoût de l’audit. ».
L’employeur dans ses écritures reprend les termes de la lettre de licenciement.
De son côté, Mme X fait valoir qu’elle a été en arrêt de travail à compter du 26 février 2018, qu’elle devait dans le même temps procéder à la clôture des comptes de janvier 2018 dont le reporting était fixé au 7 février 2018 ce qui représentait quatre jours de travail, qu’elle avait trois jours pour les tâches courantes liées aux règles comptables et qu’elle a été hospitalisée le 20 février 2018 de sorte qu’il lui était matériellement impossible de répondre à cette demande.
La cour relève que la société ne contredit en rien ses allégations et n’apporte aucune preuve contraire.
2- Sur le non-respect des consignes et erreurs relevées dans l’établissement du rapport de gestion :
La lettre de licenciement fixant les limites du litige est rédigée dans les termes suivants :
« Dans le cadre de l’établissement des comptes annuels, il vous incombait de préparer le rapport de gestion des entités relevant de votre périmètre d’intervention, (pour mémoire vous avez en charge la seule société M) pour le 28 février au plus tard.
N’ayant rien préparé à cette date, c’est votre responsable hiérarchique qui s’est attelé à cette tâche et qui a adressé le document attendu au directeur financier de l’agence le 1er mars dernier en vous mettant en copie des échanges. Le 2 mars dernier, le directeur financier vous a renvoyé, ainsi qu’à votre responsable hiérarchique, le projet mis à jour.
Sans prendre en compte les précédents échanges et le document qui avait déjà été établi, vous avez préparé un nouveau document avec de nombreuses anomalies qui ne figuraient pas dans les versions précédentes :
variation incorrecte des charges de personnel (+ 8,4 % au lieu de +19,5 %) ;
information sur le délai de paiement non conforme à la nouvelle réglementation ;
information incorrecte sur le résultat (22 623 euros au lieu de 22 632 euros)
information incorrecte sur le résultat distribuable (630 805 euros au lieu de
622 234 euros).
De telles anomalies peuvent non seulement entraîner un refus de certification des comptes par les commissaires aux comptes mais peuvent également être constitutives d’un délit de présentation de bilan inexact, passible de sanctions. L’absence de suivi des instructions et la soumission tardive des éléments ont entraîné, en outre, un report de la charge de travail sur votre binôme et votre responsable hiérarchique, nécessitant une intervention de leur part afin de tenir les délais fixés. »
Dans ses écritures, l’employeur se réfère à son mail du 1er mars 2018 adressé à Mme
L lui transmettant le projet de compte de M pour 2017 il communique également le rapport de gestion avec des corrections manuscrites.
De son côté, Mme X met en avant son arrêt maladie à compter du 26 février. Elle soutient qu’elle n’avait pas reçu de consigne et que le contrôle du document et la correction d’erreurs n’a rien d’anormal. La cour relève cependant que l’arrêt maladie de Mme X est intervenu en fin de période seulement et qu’elle ne justifie pas des raisons pour lesquelles, à son retour elle a préparé un document ne tenant pas compte de ce qui avait été préparé pendant son absence.
Les faits sont donc retenus.
3- Sur l’absence d’établissement des arrêtés mensuels reporting pour les mois de décembre 2017, janvier 2018 et mai 2018 et anomalies relevées dans les travaux préparatoires du reporting de janvier 2018 :
La lettre de licenciement est rédigée dans les termes suivants :
“Dans le cadre de vos missions, vous êtes tenue d’établir mensuellement un reporting (établissement du bilan, compte de résultat et tableau annexe) sur les comptes de la société dont vous avez la charge. Ce reporting doit être effectué au plus tard le cinquième jour ouvré du mois qui suit le mois concerné via le logiciel de reporting « HFM ». Vous n’avez achevé aucun des arrêtés sur les périodes suivantes :
reporting de décembre 2007 (établi le 11 janvier 2018 par votre collègue) ;
reporting de mai 2018 (établi le 7 juin 2018 par votre collègue).,
reporting de janvier 2018 (absence de finalisation des travaux préparatoires pour l’établissement de ce reporting, erreurs relevées dans ces documents préparatoires et rectifiés par l’un de vos collègues le 7 février dernier.
Une fois de plus, c’est votre collègue qui a dû effectuer cette tâche à votre place. »
L’employeur produit au soutien des reproches qu’il forme à l’encontre de la salariée un document intitulé “promotion du reporting HFM” et le planning “one click” de Mme X dont celle-ci soutient qu’il ne suffit pas à prouver qu’elle n’établissait pas les arrêtés mensuels dès lors qu’en réalité, elle les élaborait mais que compte tenu de ses jours de travail à mi-temps c’est son binôme qui les validait et les enregistrait dans l’outil.
Par ailleurs, elle fait valoir que que compte tenu de l’alternance de sa présence au sein de la société les mardis et jeudi une semaine et les lundis mardi et jeudi l’autre semaine, il lui arrivait d’intervertir les jours de travail ce dont elle justifie en produisant le mail de sa part adressé à M. D le 4 janvier 2018 et la réponse de celui-ci lui donnant son accord. Par ailleurs, la cour observe que le planning individuel de Mme P à ne tient pas compte de l’alternance des jours travaillés et non travaillés de sorte qu’il n’est pas le reflet exact de la quantité des jours de travail qu’elle assurait dans le cadre de son mi-temps thérapeutique.
Enfin Mme X fait valoir que le dernier jour de chaque clôture des comptes mensuels et annuels M. D valide le reporting après avoir contrôlé et signé le bilan et que la plupart du temps, ce jour correspondait avec un jour elle ne travaillait pas se référant à un mail de sa part du 4 mai 2017 où elle indique que le reporting de M est terminé. En conséquence de ce qui précède, la cour considère les éléments produits insuffisants pour caractériser les reproches formulés par l’employeur.
4- Sur le non-respect des délais d’envoi du reporting IFR15 (nouvelles normes comptables relatives aux revenus) :
La lettre de licenciement indique « Compte tenu de l’application au niveau du groupe d’une nouvelle norme comptable « IFRS 15) », il vous a été demandé par courriel du 31 juillet 2017 d’envoyer pour la société relevant de votre périmètre, un reporting relatif à cette norme pour le 1er septembre 2017. Après avoir été relancée par votre responsable hiérarchique par courriel du mois d’octobre 2017, vous avez envoyé ce reporting en retard, le 13 février 2018". L’employeur se réfère dans ses écritures à un mail du 23 octobre 2017 dans lequel il demande à l’ensemble du service de communiquer les données à renseigner de sorte que la cour en conclut avec la salariée que le retard était général. Les faits ne sont donc pas retenus.
5- Sur la saisie incorrecte des informations pour le reporting CSRGRI:
La lettre de licenciement est rédigée dans les termes suivants : « Par courriel du mois de janvier 2018, il vous a été demandé de renseigner et de communiquer un certain nombre d’informations relatives au « CSRGRI » (normes relatives à la responsabilité sociale des entreprises). Le 22 février dernier, vous avez été informée par le contrôleur de gestion de l’agence que les informations relevant de votre périmètre n’avaient pas été correctement saisies dans le logiciel de reporting du groupe, alors qu’il vous suffisait de reporter les données communiquées par votre responsable hiérarchique le 30 janvier 2018, dans l’outil dédié.”
La cour observe que le mail du 30 janvier 2018 signalant ses erreurs à Mme X n’est
pas communiqué. Les faits ne sont donc pas retenus.
6 – Sur la saisie incorrecte de la déclaration de TVA 2018 :
La lettre de licenciement fixant les limites du litige indique :« Dans le cadre de vos missions, vous êtes en charge des déclarations fiscales (CVAE, TVA). À cet égard, vous êtes tenue de déclarer mensuellement la TVA pour les sociétés de votre périmètre (en l’espèce la société M). Lors de la déclaration de TVA de février 2018, vous avez imprimé une extraction du logiciel comptable SAP qui indiquait un montant de TVA déductible d’un montant de 10 902 euros. Vous avez reporté à tort ce montant dans la rubrique « vente, prestation de services » au lieu de « TVA déductible », ce qui a conduit, à tort, à reverser au Trésor public un montant de TVA de 10 902 euros. Là encore, votre responsable hiérarchique a dû faire rectifier cette erreur par une personne de votre équipe”.
L’employeur s’appuie sur un mail de M. D en date du 13 avril 2018 informant Mme X de ce qu’il faisait régulariser sur mars 2018 le montant de la TVA déductible déclarée en TVA collectée. Mme X fait valoir que son supérieur avait validé et signé cette déclaration avant de la transmettre au Trésor ce à quoi l’employeur répond avec raison qu’il n’avait pu la signer dès lors que la déclaration était télétransmise par Mme X. Les faits sont donc retenus.
7- Sur le calcul erroné de la CVAE (contribution à la valeur ajoutée des entreprises) dues
au titre de 2017 :
La lettre de licenciement fixant les limites du litige est rédigée dans les termes suivants :
« Vous avez été informée, par courriel des mois d’août et novembre 2017 par le directeur fiscal et votre supérieur hiérarchique, d’un changement de taux pour le calcul de la CVAE exigible (le taux variant désormais en fonction de la société ; s’agissant de la société M le taux applicable est désormais de 0,30 %), compte tenu des évolutions législatives intervenues en la matière. Dans les comptes que vous avez préparés au 31 décembre 2017, vous n’avez pas respecté ses consignes et avez appliqué un mauvais taux (application du taux de 5 % qui s’appliquait avant cet évolution législative). Votre supérieur hiérarchique vous a alors demandé de rectifier cette erreur lors du versement final du solde de CVAE au Trésor public, mais c’est votre collègue qui a dû faire les rectifications. »
La société indique que par mail d’août et novembre 2017 Mme X a été informée par le directeur fiscal et le supérieur hiérarchique du changement de taux pour le calcul de la CVAE exigible. Mme X fait valoir qu’elle avait inscrit une provision dans les comptes comptables lesquels ont été validés sans que personne ne lui signale l’erreur.
Par ailleurs, elle fait valoir que lorsqu’il a été demandé de corriger l’erreur, en avril 2018, elle était en arrêt maladie et que c’est pour cette raison que son binôme a dû effectuer la déclaration. Enfin elle souligne que les mails d’août et novembre 2017 censés l’informer de la modification du taux ne sont pas communiqués. La cour constate qu’effectivement la société n’est pas en mesure de justifier que Mme X avait été informée de la modification du taux et qu’il ressort de son planning individuel qu’elle était effectivement absente pour maladie ou pour congés durant le mois d’avril. Les faits ne sont donc pas retenus comme permettant d’objectiver l’insuffisance professionnelle de la salariée.
Enfin, s’agissant des modalités de la demande de congés qui auraient été erronées, la cour relève que le non-respect de la procédure allégué n’est pas démontré à défaut du justificatif de la procédure à suivre et qu’en tout état de cause, il ne démontre pas l’incapacité de la salariée à accomplir ses missions professionnelles.
Dès lors au vu de ce qui précède la cour considère que l’insuffisance professionnelle de
Mme X qui n’a fait l’objet d’aucune remarque avant son licenciement n’est pas établie, les faits retenus ne suffisant pas à caractériser l’incapacité de la salariée à accomplir sa tâche.
En conséquence, dès lors que la cour a retenu que Mme X avait fait l’objet d’une discrimination en raison de son état de santé et que son licenciement n’est pas justifié par une cause réelle et sérieuse, il en résulte qu’il a été prononcé en raison de son état de santé et il doit donc être annulé. Le jugement est infirmé en ce qu’il a débouté Mme X de sa demande d’annulation du licenciement.
3) Sur les conséquences de la nullité du licenciement :
Il résulte de l’article L. 1235–3–1 du code du travail que l’article L. 1235–3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est discriminatoire. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité à la charge de l’employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Mme X sollicite la condamnation de l’employeur à lui payer la somme de 80 000 euros nets à titre d’indemnité pour licenciement nul faisant valoir qu’elle avait 58 ans et 10 ans d’ancienneté lors de son licenciement, que le 10 mai 2019 son invalidité a été fixée
à la catégorie 2, qu’elle a été profondément humiliée par les circonstances de son licenciement qui a porté atteinte à sa dignité, à sa santé et à sa réputation professionnelle, qu’elle n’a jamais pu retrouver d’emploi et qu’aujourd’hui âgée de 62 ans, sa pension d’invalidité a été automatiquement convertie en pension de retraite, faisant valoir que celle-ci aurait été plus élevée si elle avait pu continuer à travailler.
La société Re:source demande à la cour de limiter le montant de l’indemnité allouée à Mme X.
Eu égard à l’ancienneté de la salariée dans l’entreprise (10 ans), à son âge au moment du licenciement (née en 1960), au montant de ses salaires des six derniers mois, aux circonstances du licenciement, à ce que Mme X justifie de sa situation postérieure à la rupture, la cour condamne la société Re:sources à lui verser la somme de 45 000 euros suffisant à réparer son entier préjudice.
Le jugement est infirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande.
4) Sur les demandes financières :
4.1) Sur les dommages-intérêts pour discrimination salariale :
Mme X sollicite la condamnation de l’employeur à lui verser la somme de 19 344 euros net de dommages-intérêts pour discrimination salariale qu’elle calcule selon la méthode Clerc sur la base de la différence entre le salaire moyen du panel de comparants et le sien avant son licenciement qu’elle évalue à 310 euros en 2017.
La cour, au vu des chiffres produits et ne prenant en compte que la différence de rémunération avec les salariés placés dans une situation comparable avec celle de Mme X, comme il a été vu ci-dessus, évalue le préjudice salarial de celle-ci à la somme de 7 956 euros.
Le jugement est infirmé en ce qu’il a débouté Mme X de ce chef de demande.
4.2) Sur les dommages-intérêts en réparation du préjudice moral :
Mme X sollicite une somme de 30 000 euros en faisant valoir qu’elle a souffert d’une absence de reconnaissance de ses qualités professionnelles, une mise à l’écart, un refus d’aménager son poste de travail et une stigmatisation en raison de son état de santé.
La cour ayant retenu la discrimination alléguée au regard de l’état de santé de la salariée condamne la société Re:sources à lui verser une somme de 10 000 euros suffisant à réparer son entier préjudice.
4.3) Sur l’indemnité pour défaut de mise en oeuvre régulière de la prévoyance :
Mme X rappelle qu’ à partir de mai 2013, elle a été déclarée invalide de première catégorie et percevait à ce titre une pension d’invalidité tout en continuant à travailler à temps partiel pour la société Re:sources.
Elle explique qu’en application du contrat de prévoyance conclu par l’employeur avec l’organisme Klesia, elle devait percevoir une pension d’invalidité au titre de la prévoyance, ce contrat prévoyant une garantie invalidité ayant pour objet le paiement d’une rente fixée en pourcentage du traitement de base soit 80 % , diminuée d’un quart pour les salariés classés en invalidité première catégorie, comme elle. Ce contrat précisait que le salarié classé en invalidité pouvait cumuler la rente invalidité versée par la sécurité sociale, la rémunération versée par l’employeur et la rente servie par l’institution de prévoyance à condition que le total de l’ensemble des ressources ne soit pas supérieur aux salaires nets perçus par lui au cours des 12 derniers mois précédant le sinistre.
Elle soutient qu’en application de ces dispositions, elle aurait dû continuer à percevoir un niveau de salaire net équivalent à celui qu’elle percevait avant son passage à temps partiel du fait de l’invalidité. Elle reproche à la société Re:sources d’avoir directement perçu la rente depuis le mois de juin 2013 sans jamais en faire figurer le montant sur ses bulletins de paie de paie à l’exception de trois mois en 2013.
Elle explique que son salaire de base à temps plein été maintenu mais qu’il en était déduit illicitement le montant de la pension d’invalidité qu’elle percevait de la part de la sécurité sociale pour retenir la rémunération brute soumise à charges sociales de sorte que la durée effective du travail n’apparaissait pas et que la société manipulait illicitement sa paie afin qu’elle bénéficie d’un maintien de salaire global d’environ 85 % de son salaire brut antérieur seulement alors qu’en application des garanties de la sécurité sociale et des garanties complémentaires, elle aurait dû bénéficier d’un maintien de son salaire net antérieur.
La société Re:sources s’oppose à la demande en faisant valoir que contrairement à ce que prétend la salariée, le calcul qu’elle effectuait (rémunération mensuelle brute à temps plein - rente invalidité versé par la sécurité sociale) était plus avantageux que celui qui aurait dû être effectué : (rémunération brute mensuelle à temps partiel plus rente servi par la prévoyance) et qu’ainsi, elle a perçu plus de 3 000 euros brut de plus que ce qui aurait dû être versé aux en par une stricte application du contrat de prévoyance et conclut au débouté.
La cour observe toutefois que, comme le soutient Mme X, il ressort des dispositions des garanties prévoyances qu’elle avait droit à une pension d’invalidité équivalente à 80 % de son traitement annuel de base, réduit d’un quart puisqu’elle était en invalidité catégorie 1, sans que le montant cumulé de ses revenus : pension invalidité sécurité sociale, plus pension invalidité de la prévoyance, plus salaire ne puisse excéder le salaire net perçu antérieurement.
Il ressort des bulletins de salaires et pièces communiqués que Mme X percevait 1 873 euros brut au titre du salaire du fait de son mi-temps, 814,70 euros au titre de la rente invalidité de la sécurité sociale et 1 795, 80 euros net au titre de la prévoyance.
Comme ce cumul dépassait le salaire net antérieur, la pension versée par l’organisme de prévoyance aurait dû être réduite à proportion du salaire net perçu antérieurement de sorte que Mme X aurait dû en percevoir l’équivalent.
La cour considère en conséquence que contrairement à ce que prétend l’employeur sa méthode de calcul n’a pas entraîné un surcroît de rémunération pour Mme X et condamne en conséquence la société Re:sources à lui payer à titre d’indemnité pour perte de salaire une somme de 15 000 euros suffisant à réparer son préjudice.
Le jugement est infirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande.
4.4) Sur les dommages-intérêts pour harcèlement moral :
Mme X réclame la condamnation de l’employeur à lui verser une somme de 30 000 euros de dommages-intérêts en faisant valoir que ses conditions de travail ont contribué à la dégradation de son état de santé.
Eu égard à la solution du litige, la cour ayant retenu que Mme X avait subi des agissements de harcèlement moral, il en est résulté pour elle un préjudice distinct de celui qu’elle a subie en raison de la discrimination.
La société Re:sources est condamnée à verser à la salariée la somme de 5 000 euros de dommagesintérêts suffisant à réparer son entier préjudice. Le jugement est infirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande.
4.5) Sur la violation de l’obligation de sécurité :
L’employeur tenu d’une obligation de sécurité envers ses salariés en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise doit en assurer l’effectivité. Le non-respect des règles relatives aux visites médicales qui concourent à la protection de la santé et de la sécurité des salariés constitue un manquement à son obligation de sécurité. Ne méconnait pas son obligation, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les
mesures prévues par les article L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
L’article L. 1152-4 prévoit quant à lui que “l’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.”
Mme X fait valoir que l’employeur en ne respectant pas les préconisations du médecin du travail en ne prenant pas en compte ses alertes a contribué à la dégradation de son état de santé.
La société Re:sources conclut au débouté.
L’employeur n’étant pas en mesure de justifier du respect des préconisations du médecin du travail, a commis un manquement à l’obligation de sécurité dont il est tenu envers la salariée.
Le préjudice subi par Mme X, distinct de celui résultant de la discrimination et du harcèlement moral sera suffisamment réparé par l’allocation d’une somme de 2 000 euros.
La société Re:sources est condamnée au paiement de cette somme et le jugement est infirmé en ce qu’il a débouté Mme X de ce chef de demande.
4.6) Sur les autres demandes :
Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature indemnitaire sont dus à compter de la présente décision.
La société Re:sources doit remettre à Mme X un bulletin de paie récapitulatif, une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes à la présente décision sans qu’il soit nécessaire de prononcer une astreinte. La demande en ce sens est rejetée.
En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, la société Re:sources est condamnée à rembourser à l’organisme concerné les indemnités de chômage éventuellement versées à Mme X depuis son licenciement dans la limite de six mois.
La société Re:sources France, partie perdante est condamnée aux dépens et doit indemniser Mme X des frais exposés par elle et non compris dans les dépens à hauteur de la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, sa propre demande sur ce même fondement étant rejetée.
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
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