Monsieur X, qui effectuait un stage d'apprentissage à la navigation à voile organisé par la Société nautique de l'Estaque Mourepiane (SNEM) et dirigé par M. Y..., ayant été grièvement blessé lors d'une manoeuvre d'empannage, a assigné la SNEM, la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), assureur de cette dernière, en paiement de diverses sommes en réparation de son préjudice.
Monsieur X a été débouté par la Cour d’Appel d’Aix en Provence a débouté le stagiaire.
Il s’est pourvu en cassation.
Dans un arrêt du 4 juin 2014, la Cour de cassation rejette le pourvoi du stagiaire.
1) L’argumentaire du stagiaire est basé sur 4 fondements
Monsieur X faisait grief à la Cour d’Appel d’Aix en Provence de l’avoir débouté de sa demande d'indemnisation formée contre la SNEM et son assureur la MAIF aux 4 motifs suivants.
1°) L'organisateur d'une activité sportive est tenu d'une obligation de sécurité à l'égard de ses clients ; que si cette obligation est en principe une obligation de moyens à l'égard des participants ayant un rôle actif dans l'activité sportive pratiquée, elle devient une obligation de résultat lorsque l'activité sportive est dangereuse et que le participant est novice, puisque sa participation est alors limitée.
En l'espèce, Monsieur X rappelait qu'il était un novice en matière de navigation à voile et que le stage au cours duquel il a été grièvement blessé était un stage d'apprentissage ; qu'il faisait également valoir que la manœuvre d'empannage était dangereuse car elle pouvait être d'une extrême violence par vent fort.
Ainsi la SNEM était tenue envers lui d'une obligation de sécurité de résultat ; qu'en décidant le contraire, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la qualité de novice de Monsieur X et la nature dangereuse de la manœuvre d'empannage par vent fort étaient de nature à caractériser une obligation de sécurité de résultat à la charge de la SNEM, en l'absence de rôle réellement actif de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1135 et 1147 du code civil.
2°) L'organisateur d'une activité sportive est tenu, en ce qui concerne la sécurité des participants, d'une obligation de moyens appréciée avec plus de rigueur lorsqu'il s'agit d'un sport dangereux.
Sa faute est établie lorsqu'il ne respecte pas les préconisations de sécurité de ce sport.
Qu'en l'espèce, Monsieur X faisait valoir que, selon les critères d'évaluation pour la délivrance du brevet d'Etat 1er degré de voile, il était précisé que le candidat devait savoir faire respecter et enseigner les règles de sécurité, ce qui imposait notamment d'alerter les participants débutants du risque de choc avec la bôme ou l'écoute lors d'un empannage par vent frais et d'insister sur l'interdiction de bouger pendant la manœuvre.
La cour d'appel s'est bornée à relever que Monsieur X n'établissait pas qu'une place moins dangereuse aurait pu lui être attribuée et que l'équipage avait été averti des risques inhérents à l'empannage « pour avoir la veille réalisé des exercices d'empannage ».
Qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. Y avait interdit à son équipage de débutants de bouger pendant la manœuvre d'empannage par vent frais, après les avoir averti du risque de blessure grave ou mortelle lié à une telle manœuvre dans de telles conditions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1135 et 1147 du code civil.
3°) Monsieur X faisait valoir en outre que, par un vent de force 6, avec un équipage composé notamment de débutants, il est recommandé, pour des raisons de sécurité, de ne pas empanner.
Qu'en se bornant à affirmer que les conditions météorologiques n'étaient pas mauvaises, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. Y...aurait dû s'abstenir de procéder à un empannage, avec un équipage composé pour l'essentiel de débutants, par vent de force 6, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1135 et 1147 du code civil.
4°) Monsieur X faisait encore valoir qu'une solution sûre et efficace pour limiter, voire supprimer les risques liés à un empannage violent, consistait dans la pose d'un frein de bôme, et que la SNEM, en présence de débutants, aurait dû prévoir la mise à disposition d'un bateau équipé d'un tel dispositif.
Qu'en ne recherchant pas si la SNEM avait manqué à son obligation de sécurité en ne prévoyant pas un dispositif de frein de bôme, s'agissant d'un équipage composé essentiellement de débutants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1135 et 1147 du code civil.
2) Le moniteur de sport est tenu d’une obligation de sécurité de moyens ; il est mis hors de cause
Dans l’arrêt du 4 juin 2014, la Cour de cassation rejette le pourvoi du stagiaire. La Cour de cassation valide aussi le comportement du moniteur de sport qui avait respecté son obligation de sécurité.
Elle relève qu'un moniteur de sport est tenu d'une obligation de sécurité de moyens.
Elle ajoute que :
- d'une première part, que les conditions météorologiques n'étaient pas mauvaises, que M. Y avait tenu compte d'un vent de secteur ouest de force 5-6, en réduisant la grand'voile de deux ris, et que la manoeuvre d'empannage, qui faisait expressément partie des apprentissages proposés dans le stage, avait été pratiquée plusieurs fois par l'équipage la veille comme le jour même de l'accident, et était adaptée au niveau de la victime ;
- D’une seconde part, le moniteur avait assigné une place à chaque équipier, M. X...étant à tribord côté écoute de grand'voile, emplacement qui ne présentait pas de dangerosité particulière ;
- D’une troisième part, l'équipage avait reçu les consignes nécessaires pour effectuer l'empannage avant que le skipper ne demande : « Parés pour empannés ? », et que Monsieur X, qui avait pris part aux opérations préalables à la manoeuvre, s'était soudainement déplacé pour saisir une manivelle se plaçant ainsi sur la zone de passage du palan ;
La Cour de cassation ajoute que « la cour d'appel qui n'était pas tenue de répondre à de simples arguments non assortis d'une offre de preuve, a pu déduire de ces constatations et énonciations que Monsieur X n'établissait pas que M. Y eût commis une faute ni que la SNEF eût manqué à son obligation de sécurité de moyens, justifiant ainsi légalement sa décision ».
Frédéric CHHUM Avocat à la Cour
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