L'accident du travail est ainsi légalement caractérisé par la réunion de trois éléments :
- un fait accidentel, c'est-à-dire que l'accident repose sur la survenance d'un événement qui n'a pas nécessairement les caractéristiques d'un fait soudain, la soudaineté pouvant s’attacher soit à l’événement, soit à la lésion, mais dont la date est certaine, cette exigence ayant pour but d'établir une distinction fondamentale entre l'accident et la maladie laquelle est normalement le résultat d'une série d'événements à évolution lente et ne doit pas être rattachée au risque accident du travail,
- une lésion corporelle : c’est-à-dire que l'accident doit porter atteinte à l'organisme humain, physiquement ou psychiquement, peu important l'étendue et l'importance de la lésion ainsi que ses caractéristiques ;
- un lien avec le travail c’est-à-dire que l'accident doit être survenu par le fait ou à l'occasion du travail ; cela ne signifie pas toutefois que l'accident doive se dérouler sur le lieu et durant le temps de travail mais si tel est le cas, l'accident survenu au temps et au lieu de travail est présumé d'origine professionnelle.
La survenance de l'accident aux temps et lieu de travail a pour effet de le présumer imputable au travail, sauf preuve contraire d'une cause totalement étrangère au travail.
L’arrêt de la Cour d’appel infirme un jugement du tribunal judiciaire du 17 mars 2020.
1) FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que Monsieur X était salarié de la régie autonome des transports parisiens (désignée ci-après ‘la RATP’ ou ‘l’employeur’) depuis le 12 octobre 2004 en qualité d’opérateur de contrôle lorsque, le 22 octobre 2018, il a informé son employeur avoir été victime d’un accident survenu sur son lieu de travail que ce dernier a déclaré auprès de la caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP (ci-après désignée ‘la Caisse’ ou la ‘CCAS’) en ces termes «l'agent déclare : un voyageur m'est rentré dedans violemment, à foncer sur ma collègue et avec un autre collègue l'avons maîtrisé, ce qui m'occasionne des douleurs à l'avant-bras et à l'épaule droite > IAPR proposé » (sic).
Dans la partie réservées aux éventuelles réserves motivées, l’employeur ne formulait aucune observation.
Le certificat médical initial, établi le 22 octobre 2018 par le centre hospitalier de Neuilly-sur-
Seine, faisait mention des lésions suivantes : « douleur de l’épaule droite avec accentuation à la mobilisation active en élévation et en abduction ; douleur de l’avant-bras droit ; douleurs des orteils du pied droit sur les extrémités, avec érythème sur les 3è et 4è orteil ; céphalées ; anxiété ».
Un arrêt de travail initial était prescrit à M. X jusqu'au 28 octobre 2018, lequel sera régulièrement prolongé au titre d’un « traumatisme épaule droite » jusqu'au 10 novembre 2019.
Le 13 novembre 2018, la Caisse adressait à M. X deux courriers : le premier pour l’informer qu’elle n’était pas en mesure de statuer sur le caractère professionnel de l’accident déclaré et l’invitait à lui fournir des renseignements le déroulé précis des événements survenus le jour de l'accident ainsi que « tout élément de preuve à l'appui de ses déclarations
» ; le second pour l’informer qu’elle entendait recourir au délai complémentaire d’instruction
avant de statuer sur le caractère professionnel de son accident.
Le 28 novembre 2018, dans le cadre de la procédure d’instruction, la RAPT a adressé à la
Caisse un courrier contestant le caractère professionnel de l'accident ainsi rédigé :
Le 22/10/2018 à 13h30, Monsieur X déclare qu'un voyageur le bouscule violemment ainsi que sa collègue (Madame L.) et que la maîtrise de celui-ci avec un second collègue, lui occasionne des douleurs à l'avant-bras et
à l'épaule.
Or, les rapports d'information des agents présents pendant les faits affirment que le voyageur a bousculé 2 agents, Madame G. ainsi que Madame L., et que Monsieur X a décidé de rattraper le voyageur en fuite afin de le maîtriser.
Nous tenons à attirer votre attention sur l'absence de lien de subordination quant à l'activité exercée par le salarié lors de l'accident En effet, aucun agent n'est habilité à poursuivre un voyageur en fuite.
De plus, suite aux contradictions des témoignages, nous émettons des doutes sur les faits énoncés par Monsieur X.
Le 13 décembre 2018, la CCAS a informé M. X de la clôture de l'instruction de son dossier et de la possibilité de venir le consulter avant qu’une décision soit prise sur l’origine professionnelle de son accident, laquelle devait intervenir à compter du 27 décembre 2018.
Finalement, par courrier du 28 décembre 2018, la CCAS notifiait à M. X son refus de prendre en charge, au titre du risque professionnel, l'accident déclaré le 22 octobre 2018 aux motifs que « les éléments fournis lors de l'enquête administrative n'ont pas permis d'établir l'existence d'un fait accidentel survenu le 22/10/2018 ».
M. X a contesté cette décision devant la commission de recours amiable puis, à défaut de décision explicite, il a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Paris, devenu tribunal judiciaire au 1er janvier 2020.
Par jugement du 17 mars 2020, le tribunal a :
- déclaré recevable mais mal fondé le recours de M. X ;
- dit n'y avoir lieu à reconnaissance de l'accident invoqué au 22 octobre 2018 ;
- rejeté l'intégralité des demandes formées par M. X ;
- débouté M. X de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. X aux dépens.
Le jugement a été notifié aux parties le 9 juin 2020 et M. X en a régulièrement interjeté appel auprès de la présente cour par déclaration au greffe le 29 juin 2020.
Les parties ont alors été convoquées à l’audience du conseiller rapporteur du
6 septembre 2023, date à laquelle, faute de conciliation possible, elles ont plaidé.
M. X, assisté de son Conseil, a repris le bénéfice de ses conclusions n°3 et demandé
à la cour de :
- dire son appel de recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 17 mars 2020 en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à reconnaissance de l'accident invoqué au 22 octobre 2018, rejeté l'intégralité de ses demandes et l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau, M. X demande à la cour de :
- annuler la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable,
- annuler la décision de la caisse de coordination des assurances sociales de la RATP du
28 décembre 2018 refusant de reconnaître le caractère professionnel de son accident survenu
le 22 octobre 2018,
- reconnaître le caractère professionnel de l’accident dont il a été victime le 22 octobre 2018,
- le renvoyer devant la caisse de coordination des assurances sociales de la RATP pour la liquidation des droits résultant de cette prise en charge au titre de la législation professionnelle ;
- condamner la caisse de coordination des assurances sociales de la RATP à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la caisse de coordination des assurances sociales de la RATP aux dépens éventuels.
La caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP, représentée par son Conseil, reprenant oralement le bénéfice de ses conclusions, demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 17 mars 2020 et, en conséquence,
- débouter M. X de toutes ses demandes, étant mal fondées,
- confirmer la décision du 12 octobre 2018 [ndlc : lire 28 décembre 2018] qui a refusé de prendre en charge à titre professionnel de la déclaration d'accident du travail pour des faits allégués du 22 octobre 2018,
- condamner M. X à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
Après s’être assuré de l’effectivité d’un échange préalable des pièces et écritures, la cour a retenu l’affaire et mis son arrêt en délibéré au 27 octobre 2023.
M. X fait grief au tribunal d’avoir considéré que son accident ne relevait pas de la législation sur les risques professionnels alors que toute lésion survenue aux temps et lieu du travail doit être considérée comme résultant d'un accident du travail, sauf s'il est rapporté la preuve que cette lésion a une origine totalement étrangère au travail.
Il explique que, le 22 octobre 2018 à 13h30, alors qu’il procédait au contrôle de titres de transport à la station Charles de Gaulle Etoile avec deux de ses collègues, Mme L. et Mme G., il a été percuté par un usager sans titre qui tentait de prendre la fuite.
L’individu l’a heurté au niveau de l’épaule droite ce qui lui a valu un arrêt de travail jusqu’au 25 janvier 2019 et une ITT de 30 jours dans le cadre de l’enquête pénale.
M. X reproche également au tribunal d’avoir jugé que les lésions médicalement constatées le 22 octobre 2018 relevaient d’un état antérieur alors que la présomption d'imputabilité au travail de l'accident survenu au temps et au lieu de travail ne peut être écartée que par la preuve que cet accident est dû à une cause étrangère au travail ou que les lésions relèvent exclusivement d’une cause totalement étrangère au travail.
Il considère que la Caisse n’ayant pas fait cette démonstration, le tribunal devait reconnaître le caractère professionnel de son accident. Il relève que le refus de prise en charge est d’autant moins justifié que ses deux collègues, agressées au même moment, ont bénéficié de cette législation.
La Caisse rétorque qu’il appartient à M. X, à qui incombe la charge de la preuve, d’établir l’existence d’un fait accidentel, ce qu’il échoue à faire. Elle relève que les témoignages de ses collègues ne corroborent pas ses déclarations sur les circonstances de l’accident en ce qu’aucun ne fait mention que le contrevenant l’aurait bousculé pour prendre la fuite ni même ne mentionne qu’il aurait été violemment percuté.
Au contraire, l’enquête a conclu que seuls deux agents avaient été bousculés à savoir Mme G. et Mme L. Elle estime en outre que les explications de M. X ne sauraient être considérés comme véridiques puisqu’il à fait l'objet d'une révocation pour « propos mensongers » portés dans un rapport accusant un de ses collègues.
La Caisse soutient encore que M. X n’a été blessé que parce qu’il s’est volontairement soustrait au lien de subordination qui le liait à son employeur en transgressant les règles fixées par celui-ci et qui interdit d’interpeller un voyageur en délicatesse.
Enfin, la Caisse entend faire valoir que M. X a reconnu devant le conseil des prud’hommes s’être déjà blessé antérieurement au niveau de l'épaule.
Cette antériorité de la pathologie semble, selon la Caisse, corroborer le diagnostic posé par le médecin ayant reçu M. X le 22 octobre 2018 qui a relevé « une probable pathologie de la coiffe des rotateurs droits nécessitant un avis spécialisé ultérieur » sans pour autant établir un lien entre la pathologie et l'accident déclaré. Elle en déduit que la lésion présentée correspond exclusivement à la manifestation d'un état antérieur évoluant pour son propre compte et constitutif d'une cause étrangère au travail, ainsi que le confirme son médecin-conseil.
Si M. X soutient que la lésion dont il souffrait en 2018 ne concernait pas l'épaule droite mais l'épaule gauche, cela ne repose que sur ses propres déclarations et ne concerne pas l’accident survenu en 2005 au cours duquel il s’était blessé à l’épaule.
2) Motivation de l’arrêt de la Cour d'appel de Paris du 27 octobre 2023
La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire ;
. Déclare l’appel de M. X recevable ;
. Infirme le jugement rendu le 17 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
. Juge que l’accident dont a été victime M. X le 22 octobre 2018 est un accident du travail ;
. Dit que la caisse de coordination des actions sociale de la RATP devra prendre en charge, au titre du risque professionnel, l’accident survenu le 22 octobre 2018 au préjudice de M. X ;
. Condamne la caisse de coordination des actions sociale de la RATP à verser à M. X la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
. Condamne la caisse de coordination des actions sociale de la RATP aux dépens de la
première instance et de l’appel.
***
Il sera rappelé que la RATP dispose d'un régime spécial de sécurité sociale régi par le décret n° 2004-174 du 23 février 2004 modifié par le décret n° 2014 - 1538 du 18 décembre 2014 et par le décret n° 2015-1181 du 30 décembre 2015 ayant réformé le système spécial de sécurité sociale mis en place depuis 1950 et a organisé la caisse de coordination aux assurances sociales.
L'article 4 du décret du 23 février 2004 dispose qu’il est institué une caisse de coordination aux assurances sociales de la régie autonome des transports parisiens chargée de la couverture des risques maladie maternité invalidité décès accident du travail et maladies professionnelles.
La CCAS de la RATP dispose de statuts dont elle s’est dotée en application de l’article 7 du décret précité ainsi que d'un règlement intérieur et il appartient aux juridictions de faire application des dispositions spécifiques régissant ce régime spécial de sécurité sociale.
Ce faisant, l'article 75 de son règlement intérieur est une transposition à droit constant par le régime spécial de sécurité sociale de la RATP, de la règle de principe édictée par l'article
L. 411-1 du code de la sécurité sociale selon laquelle « est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise » et de la présomption d'imputabilité qui en découle, l’article 79 du même Règlement précisant que « l’accident survenu à un agent, au temps et au lieu du travail, est présumé comme imputable au service. Cette présomption est simple. La preuve contraire peut donc être rapportée par la Caisse ».
L'accident du travail est ainsi légalement caractérisé par la réunion de trois éléments :
- un fait accidentel, c'est-à-dire que l'accident repose sur la survenance d'un événement qui n'a pas nécessairement les caractéristiques d'un fait soudain, la soudaineté pouvant s’attacher soit à l’événement, soit à la lésion, mais dont la date est certaine, cette exigence ayant pour but d'établir une distinction fondamentale entre l'accident et la maladie laquelle est normalement le résultat d'une série d'événements à évolution lente et ne doit pas être rattachée au risque accident du travail,
- une lésion corporelle : c’est-à-dire que l'accident doit porter atteinte à l'organisme humain, physiquement ou psychiquement, peu important l'étendue et l'importance de la lésion ainsi que ses caractéristiques ;
- un lien avec le travail c’est-à-dire que l'accident doit être survenu par le fait ou à l'occasion du travail ; cela ne signifie pas toutefois que l'accident doive se dérouler sur le lieu et durant le temps de travail mais si tel est le cas, l'accident survenu au temps et au lieu de travail est présumé d'origine professionnelle.
La survenance de l'accident aux temps et lieu de travail a pour effet de le présumer imputable au travail, sauf preuve contraire d'une cause totalement étrangère au travail.
Néanmoins, il appartient à celui qui invoque le jeu de la présomption d’établir au préalable les circonstances exactes de l'accident autrement que par de simples affirmations et de prouver que la lésion est apparue au temps et au lieu de travail.
A défaut de présomption d'imputabilité, il appartient à la victime d'apporter la preuve, par tous moyens, notamment par des présomptions graves, précises et concordantes, au sens de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
- de la matérialité du fait accidentel,
- de sa survenance par le fait ou à l'occasion du travail,
- du lien de causalité entre les lésions et le fait accidentel,
les seules affirmations de la victime non corroborées par des éléments objectifs étant insuffisantes.
Il est constant en l’espèce que M. X était employé en qualité d’opérateur de contrôle au sein de la RATP.
Une déclaration d'accident du travail a été établie le 23 octobre 2018 par l'employeur, laquelle faisait état d'un accident survenu la veille dans les circonstances suivantes : « l'agent déclare
: un voyageur m'est rentré dedans violemment, à foncer sur ma collègue et avec un autre collègue l'avons maîtrisé, ce qui m'occasionne des douleurs à l'avant-bras et à l'épaule droite ».
Le jour des faits, le 22 octobre 2018, les horaires de travail de M. X étaient de
11 heures 45 à 19 heures 19. La déclaration d'accident du travail enseigne que l’accident contesté se serait produit à 13 heures 30, c’est-à-dire dans le temps du travail.
Il n’est pas contesté par ailleurs que M. X se trouvait sur son lieu de travail au moment du fait accidentel allégué.
S’agissant du fait accidentel, il résulte des déclarations de M. X devant les services de police qu’étant en mission de contrôle des titres de transports, il a été amené à contrôler un individu lequel, après avoir indiqué qu’il n’en disposait pas, a profité de l’ouverture d’une porte de sortie pour s’enfuir, le bousculant à l’épaule droite pour y parvenir.
Ces déclarations ont été maintenues au cours de l’enquête administrative et, contrairement à ce que soutient la Caisse, ses explications n’ont pas varié.
Si, comme le relève la Caisse, aucun témoin n’évoque une agression dans l’acception habituelle qui peut être donnée à ce terme, tous confirment l’existence d’une bousculade ou, à tout le moins, d’un contact physique entre le contrevenant et M. X. M. T. atteste ainsi que le client « pousse alors la porte confort, dans le même instant, mon binôme civil
[M. X] ainsi que M. P. le maîtrise avec la force juste et nécessaire » ce que M. P. confirme en attestant que « suite au comportement du client, Monsieur X rattrape le client en le maîtrisant par derrière ». Pour sa part, Mme L. précise que « le client a été maîtrisé par X (...) qui a été blessé à l'épaule et avant-bras droit ». Enfin, il n’est pas sans intérêt de rappeler que M. X s'est rendu au centre hospitalier immédiatement après les faits afin d'être examiné.
Le certificat médical initial établi le jour même des faits par le centre hospitalier de Neuilly établit la réalité des lésions, à savoir « des douleurs de l'épaule droite avec accentuation à la mobilisation active en élévation et en abduction ; douleur de l'avant-bras droit ; douleurs des orteils du pied droit sur les extrémités, avec érythème sur les 3è et 4è orteil », lesquelles sont parfaitement compatibles avec la version des faits donnée par M. X.
Il est établi de surcroît que l'accident a été connu par l'employeur immédiatement après les faits d’autant que deux préposés ont transporté M. X à l’hôpital.
Il résulte ainsi de ce qui précède un ensemble d’éléments graves, précis et concordants attestant de la survenance d'un événement soudain, imprévu, consistant en une bousculade, survenu à une date certaine, le 22 octobre 2018 à 13 heures 30, par le fait ou à l'occasion du travail, connu immédiatement de l'employeur et constaté par plusieurs témoins, dont il est résulté immédiatement une lésion corporelle, à savoir un traumatisme à l’épaule droite, médicalement constatée.
Dès lors, dans ses rapports avec la Caisse, M. X établit la matérialité de l'accident au temps et au lieu du travail, de sorte que la présomption d'imputabilité trouve à s'appliquer, présomption que la Caisse ne peut renverser qu’en démontrant que la lésion constatée a résulté exclusivement d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte ou d'une cause totalement étrangère au travail étant rappelé que la présomption demeure lorsque l'accident a pour effet d'entraîner l'aggravation ou la manifestation d'un état pathologique préexistant qui n'occasionnait pas par lui même d'incapacité de travail avant que ne survienne l'accident.
Or, la cour ne peut que constater que la Caisse échoue à démontrer que la lésion serait la conséquence exclusive d’une pathologie préexistante.
Si son médecin-conseil indique dans un note établie à l’intention du tribunal, que « l'affection déclarée (douleurs épaule droite) le 22 octobre 2018 par M. X est une manifestation spontanée d'une pathologie antérieure (lésion présentée lors d'un A T en
2005). Cette pathologie préexistante et évoluant pour son propre compte est donc sans lien avec les faits déclarés le 22 octobre 2018 et constitue une cause étrangère au travail », ces allégations ne sont pas de nature à exclure le rôle du travail dans la survenue de la pathologie ou sa dolorisation à défaut de fournir de précisions sur l’accident de 2005 et la nature des lésions dont auraient souffert M. X à sa suite.
Par contre, à la lecture de la fiche récapitulative des prestations fournies qu’elle produit (pièce 3), la cour constate que l’intéressé n’a bénéficié d’aucun arrêt de travail à la suite de l’accident de 2005. Ce dernier produit pour sa part deux certificats médicaux établissant que s’il a effectivement déjà souffert d’une pathologie à l’épaule, en 2013, sa blessure était à l'épaule gauche.
La Caisse ne démontre pas davantage que M. X se serait soustrait volontairement au lien de subordination l’unissant à son employeur puisque, comme il vient de l’être démontré, il a été blessé à l’occasion d’un contrôle de voyageur. Et il importe peu que le salarié « ait poursuivi le contrevenant en violation des instructions de son employeur », ce qui n’est au demeurant pas établi, ce fait ne s’analysant nullement en une soustraction volontaire d’un lien de subordination dès lors qu’il est exécuté dans le cadre des missions qui sont confiées au salarié et de surcroît dans l’intérêt de l’employeur.
Il y a donc lieu de dire que M. X a été victime d'un accident du travail le 22 octobre 2018 qui doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
En l’espèce, la Caisse qui succombe supportera les dépens de première instance et d’appel, étant précisé que l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale a été abrogé par le décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l'aide sociale, dont l'article 17 III prévoit que les dispositions relatives à la procédure devant les juridictions sont applicables aux instances en cours.
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
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