Lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, l'employeur ne peut prononcer un licenciement pour un motif autre que l'inaptitude, peu important qu'il ait engagé antérieurement une procédure de licenciement pour une autre cause.
C’est ce qu’affirme la cour de cassation dans un arrêt du 8 février 2023, n°21-16.258.
1) Faits et procédure
Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 11 mars 2021), M. [T], engagé à compter du 16 mai 1989 par la société Flamarc (la société) aux droits de laquelle vient la Société des cendres, exerçait, dans le dernier état de la relation contractuelle, les fonctions de responsable secteur Rhône-Alpes.
Il a été placé en arrêt de travail à compter du 21 octobre 2016.
Le 24 janvier 2017, la société a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 7 février 2017.
A l'issue d'une visite de reprise du 6 février 2017, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte à son poste en un seul examen et précisé que son reclassement au sein de l'entreprise ou du groupe n'était pas envisageable.
Par lettre du 16 février 2017, la société a procédé au licenciement du salarié pour faute lourde.
Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.
2) Moyen
Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes indemnitaires et salariales au titre de la mise à pied conservatoire et de la rupture du contrat de travail alors que son licenciement, intervenu le 16 février 2017, était fondé sur une faute grave, quand un licenciement pour faute ne pouvait pas être prononcé postérieurement à l'avis d'inaptitude définitive délivré par le médecin du travail le 6 février 2017.
3) Réponse
Au visa des articles L. 1226-2 et L. 1226-2-1 du code du travail, dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
Il en résulte que ces dispositions d'ordre public font obstacle à ce que l'employeur prononce un licenciement pour un motif autre que l'inaptitude, peu important que l'employeur ait engagé antérieurement une procédure de licenciement pour une autre cause.
Pour débouter le salarié de ses demandes indemnitaires et salariales au titre de la mise à pied conservatoire et de la rupture du contrat de travail, l'arrêt retient que la circonstance que l'inaptitude définitive du salarié à occuper son emploi ait été constatée par le médecin du travail le 6 février 2017, ne privait pas la société de se prévaloir d'une faute lourde de son salarié au soutien du licenciement qu'elle a estimé devoir prononcer à l'issue de la procédure disciplinaire qu'elle avait initiée le 24 janvier précédent.
En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le salarié, déclaré inapte, avait été licencié pour un motif autre que l'inaptitude, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
4) Analyse
Lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, l'employeur ne peut prononcer un licenciement pour un motif autre que l'inaptitude, peu important qu'il ait engagé antérieurement une procédure de licenciement pour une autre cause
Le 24 janvier 2017, le salarié avait été convoqué à un entretien de licenciement fixé au 7 février 2017.
Le 6 février 2017, il avait été déclaré inapte.
Dès lors, l’entreprise aurait dû procéder à un licenciement pour inaptitude et ne pouvait pas le licencier pour faute lourde.
Cette décision doit être approuvée.
Source
c. cass. 8 février 2023, n° 21-16.258
https://www.courdecassation.fr/en/decision/63e34cce500dc805de37cd9d
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
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