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Transaction et égalité de traitement : un salarié ne peut prétendre aux avantages tirés de transactions conclues par d’autres salariés (c. cass., 12 mai 2021, n°20-10.796)

Publié le 15/07/2021 Vu 2 482 fois 0
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Par un arrêt du 12 mai 2021, la Cour de cassation se prononce sur le principe d’égalité de traitement, lorsqu’il est invoqué pour revendiquer certains avantages issus d’une transaction conclue entre l’employeur et d’autres salariés.

Par un arrêt du 12 mai 2021, la Cour de cassation se prononce sur le principe d’égalité de traitement, lo

 Transaction et égalité de traitement : un salarié ne peut prétendre aux avantages tirés de transactions conclues par d’autres salariés (c. cass., 12 mai 2021, n°20-10.796)

 

Au visa de l’article 2044 qui définit la transaction comme étant « un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître », la Cour de cassation affirme que « le salarié ne peut invoquer le principe d’égalité de traitement pour revendiquer les droits et avantages d’une transaction conclue par l’employeur avec d’autres salariés pour terminer une contestation ou prévenir une contestation à naitre ».

1)      Faits

Une société a conclu le 27 août 2015, un plan de sauvegarde de l’emploi qui prévoyait dans son chapitre 8, le bénéfice d’une indemnité supra-conventionnelle pour les salariés quittant l’entreprise « dans le cadre du plan de départ volontaire externe, dont le poste est supprimé et qui acceptent un poste de remplacement en interne, dont le poste est supprimé et dont le licenciement ne peut être évité, qui sont transférés au service du repreneur d’un fonds de commerce dans les conditions de l’article L. 1224-1 du code du travail ».

De même, la société a prévu, dans le chapitre 9 du PSE, la suppression de l’équipe de nuit d’un entrepôt logistique, avec proposition, pour les salariés non licenciés, d’un poste en équipe de jour et versement, d’une indemnité exceptionnelle temporaire d’une durée de 12 mois pour compenser la perte des primes de nuit.

A cet effet, plusieurs salariés non licenciés ont donc accepté le poste en équipe de jour avec le versement de l’indemnité exceptionnelle temporaire prévue par le PSE, et ont revendiqué aussi le paiement de l’indemnité supra-conventionnelle prévue au chapitre 8 de ce même PSE.

L’employeur a donc proposé à ces salariés, la conclusion d’une transaction par laquelle ils renonceraient à toute action en justice et réclamation contre la société en l’échange du versement d’une indemnité transactionnelle.

Or, d’autres salariées ne faisant pas partie de cet accord ont réclamé ultérieurement le bénéfice de l’indemnité supra-conventionnelle prévue par le chapitre 8 du PSE, et plus particulièrement par la stipulation suivante : « aux salariés qui quittent l’entreprise dans le cadre du plan de départ volontaire externe, dont le poste est supprimé et qui acceptent un poste de remplacement en interne », en se fondant notamment sur le principe d’égalité de traitement.

L’employeur n’a néanmoins pas donné suite à cette demande.

Les salariées ont donc saisi le conseil des prud’hommes en paiement de l’indemnité supra conventionnelle ou bien d’une indemnité d’un montant équivalent à titre de dommages intérêts pour inégalité de traitement, et d’exécution déloyale du contrat de travail.

Le conseil de prud’hommes a alors accueilli partiellement la demande des salariées en ce qu’il a condamné la société au seul paiement d’une somme de 20 000 euros chacune pour manquement au principe d’égalité de traitement et non pas au paiement de l’indemnité supra conventionnelle prévue par le PSE.

Par conséquent, les salariées ont interjeté appel, mais par un arrêt du 15 novembre 2019, la cour d’appel de Bourges a confirmé la décision du conseil des prud’hommes de condamner la société à payer à chaque salariée des dommages et intérêts pour le préjudice résultant de l’inégalité de traitement et de l’exécution déloyale du contrat de travail.

En effet, la cour d’appel a estimé que l’employeur aurait dû proposer aux salariées, la conclusion d’une transaction comparable aux autres salariés qui étaient dans une situation semblable à la leur, dans la mesure où ils avaient aussi accepté une modification de leur contrat de travail et prétendu ensuite, avoir droit au paiement d’une indemnité supra-conventionnelle de licenciement conformément au PSE.

L’employeur s’est donc pourvu en cassation sur le fondement de l’article 2044 et du principe d’égalité de traitement.

2)      Moyen du pourvoi

L’employeur fait grief à l’arrêt de la cour d’appel de le condamner à payer diverses sommes, notamment pour violation du principe d’égalité de traitement.

L’employeur soutient principalement que le principe d’égalité de traitement n’est pas applicable en l’espèce, car il ne s’applique qu’aux avantages accordés aux salariés.

De ce fait, selon le moyen invoqué par l’employeur, la conclusion d’un accord transactionnel avec certains salariés prévoyant notamment le bénéfice d’une indemnité transactionnelle contre leur renoncement à agir en justice, ne constitue pas un avantage mais une contrepartie.

3)      La conclusion d’une transaction constitue-t-elle un avantage justifiant l’application du principe d’égalité de traitement entre les salariés placés dans une situation équivalente ? NON, répond la Cour de cassation.

La Cour de cassation répond par la négative et casse et annule l’arrêt de la cour d’appel

Au visa de l’article 2044 du code civil ainsi que du principe d’égalité de traitement, les juges de la Haute Cour rappellent respectivement que « la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître » et que le principe d’égalité de traitement n’est applicable, selon une jurisprudence constante, que lorsqu’il a pour objet des avantages concernant des salariés se trouvant dans une situation équivalente en termes d’ancienneté, de poste, et de modification du contrat de travail.

Par conséquent, la Cour de cassation affirme qu’ « un salarié ne peut invoquer le principe d’égalité de traitement pour revendiquer les droits et avantages d’une transaction conclue par l’employeur avec d’autres salariés pour terminer une contestation ou prévenir une contestation naître ».

En l’espèce, l’employeur n’avait donc pas à proposer aux salariées la conclusion d’un accord transactionnel, car quand bien même ce dernier octroie des avantages, il n’est pas en soi un avantage mais avant tout une contrepartie par laquelle la partie salariée renonce à son droit fondamental d’agir en justice.

Il s’agit là d’une décision particulièrement importante dans la mesure où peu de contentieux ont pour objet le principe d’égalité de traitement appliqué à une transaction à part un seul arrêt de la Cour de cassation rendu le 30 novembre 2011 (n°10-21.119).

La Cour de cassation réaffirme donc, en vertu de l’autorité de la chose jugée, sa décision rendue dix ans auparavant, qui restreint le champ d’application du principe d’égalité de traitement au détriment des salariés en même temps que de respecter les limites inhérentes au régime de la transaction qui s’analyse comme un contrat impliquant des concessions réciproques.

Source :

c. cass., 12 mai 2021, n°20-10.796

 

Frédéric CHHUM, Avocat à la Cour et Membre du Conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

Sarah BOUSCHBACHER juriste

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A propos de l'auteur
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Maître Frédéric CHHUM est membre du conseil de l'ordre des avocats de Paris (2019-2021). Il possède un bureau secondaire à Nantes et à Lille.

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