Pour définir ce qu’est un habitat inclusif, le plus simple consiste à indiquer ce qu’il n’est pas. L’habitat inclusif n’est pas un établissement médico-social, si bien que l’ingénierie de l’autorisation n’est pas applicable en tant que telle. Il ne saurait donc être question ni d’autorisation ni d’habilitation à l’aide sociale.
L’habitat inclusif est défini par la Loi comme un habitat destiné aux personnes âgées et handicapées qui font le choix, à titre de résidence principale, d’un mode d’habitation regroupé, entre elles ou avec d’autres personnes, assorti d’un projet de vie sociale et partagée.
L’habitat inclusif est possible dans le cadre d’une colocation d’un logement meublé ou non meublé, ou un ensemble de logements autonomes destinés à l’habitation, meublés ou non.
Le contrat est donc un bail.
L’habitat inclusif constitue donc une troisième voie entre le domicile et l’établissement, en permettant aux personnes âgées d’accéder à un logement autonome en milieu ordinaire, avec des services associés, au premier titre desquels les services d’aide à domicile.
Or, cette relation entre SAAD et habitat inclusif n’est pas sans poser de multiples interrogations pratiques.
Ce qui est certain
Le SAAD ne peut pas bénéficier du forfait habitat inclusif. Le forfait habitat inclusif permet de financer le projet de vie sociale et partagée. Il ne doit pas être assimilé à un accompagnement médico-social de compensation du handicap ou de perte d’autonomie.
Le SAAD ne peut pas être porteur de projet. Mais le gestionnaire d’un SAAD peut parfaitement gérer un habitat inclusif, à condition d’opérer une stricte distinction du budget et du fonctionnement des deux structures.
Ce qui est incertain : la question du SAAD intégré
En théorie, un habitat inclusif ne peut pas proposer de service d’aide à domicile intégré directement au projet, en raison du principe du libre-choix des habitants.
Il n’est donc pas possible pour un porteur de projet d’assortir la signature du bail d’un contrat clé en main avec intervention d’un service d’aide à domicile particulier.
Mais en pratique, c’est une pratique tentante. Est-ce illégal pour autant ?
Tout d’abord, pour un porteur de projet qui serait par ailleurs gestionnaire d’un SAAD, avec gestion administrative et financière différente du SAAD, il suffit de recueillir l’accord écrit de la personne pour être accompagné par ce service au moment de la conclusion du bail ou de l’intégration de l’habitat et qu’il est libre de ne plus être suivi par ce SAAD, sans pour autant que sa présence dans l’habitat soit menacée.
Ces précautions permettent de sauvegarder l’essentiel, à savoir le principe du libre-choix de l’habitant.
Plus complexe est la question du porteur de projet qui n’est pas gestionnaire d’un SAAD. Peut-il faire intervenir un SAAD seulement dans son habitat ? Autrement dit peut-il intégrer un SAAD à l’habitat inclusif ?
La réponse a priori est négative mais elle est à nuancer avec le droit de l’autorisation médico-sociale.
En effet, le SAAD est un établissement médico-social qui doit être autorisé. Jusqu’au 31/12/2022, le SAAD est autorisé selon une procédure dérogatoire. Il n’est pas soumis à la procédure d’appel à projets et demande donc directement l’autorisation auprès du Président du Département.
Le Département, naturellement, peut refuser l’autorisation (mais les motifs de refus sont précis et limités) mais rien n’empêche un SAAD de solliciter une autorisation circonscrite à un habitat inclusif.
Mais quelle que soit la configuration, le risque juridique est important. Un habitat inclusif qui fonctionnerait avec un SAAD intégré court un risque important de requalification en ESSMS.
Quelle différence existerait-il entre un Habitat inclusif / SAAD et une structure accueillant des personnes handicapées majeurs (surtout en l’absence de cahier des charges) ? Entre un Habitat inclusif / SAAD et une PUV voire un EHPAD ? Comment serait garanti le libre choix des prestataires dans le cas d’un SAAD intégré ?
La question du SAAD intégré est donc source d’incertitude faut de sécurisation juridique, tant du point de vue du porteur de projet, que du SAAD lui-même et du Département, qui refuserait, ou autoriserait un SAAD intégré ou qui entendrait ensuite procéder à une requalification.
Me Sylvain Bouchon
Avocat au barreau de Bordeaux
Droit médico-social
https://www.bouchon-avocat.fr/cabinet/presentation
bouchonavocat@gmail.com