La mise à disposition du fonctionnaire

Publié le 13/04/2023 Vu 2 787 fois 0
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Un fonctionnaire ou un agent contractuel en CDI peut être mis à disposition d’une autre administration voire d’une association ou d’une entreprise. Le point sur un régime juridique précis.

Un fonctionnaire ou un agent contractuel en CDI peut être mis à disposition d’une autre administration voi

La mise à disposition du fonctionnaire

La mobilité des fonctionnaires et un enjeu majeur en terme de carrière, et, à ce titre, elle est très encouragée par les textes.

La mise à disposition, à ne pas confondre avec la mise en disponibilité, en est l’une des modalités.

Notons que le dispositif s’adresse aux fonctionnaires, naturellement, mais aussi aux agents publics contractuels en CDI (et uniquement en CDI) dans les trois fonctions publiques.

Qu’est-ce que la mise à disposition ?

La mise à disposition est une des modalités de la position d’activité par lequel le fonctionnaire ou l’agent public en CDI est réputé occuper son emploi, demeure dans son corps ou cadre d’emploi d’origine, continue à percevoir la rémunération correspondante, mais exerce ses fonctions hors de l’administration dans laquelle il a vocation à servir.

Contrairement au détachement, la mise à disposition n’est pas une position statutaire mais une modalité de la position d’activité. En effet, le fonctionnaire détaché exerce lui aussi son activité hors de son corps, mais il est payé par l’organisme d’accueil, là ou le fonctionnaire mis à disposition est payé par son administration.

La mise à disposition peut avoir lieu auprès des autres administrations (Etat, hôpital et collectivités territoriales), d’organismes publics ou privés contribuant à la mise en œuvre d’une politique publique, pour exercer des missions de service public, fondation ou association reconnue d’utilité publique, etc… Le spectre est assez large, et la porte largement ouverte vers les cieux du privé, dans la mesure où l’emploi conserve un lien avec le service public.

Notons qu’il existe aussi une mise à disposition en sens inverse, d’un salarié vers la fonction publique, dite mise à disposition « entrante ».

La nécessité d’un accord du fonctionnaire ou de l’agent public

La mise à disposition nécessite forcément l’accord du salarié.

Une convention tripartite est conclue, ou au moins entre l’administration et l’organisme d’accueil, auquel cas le fonctionnaire doit nécessairement être informé et peut refuser de donner son accord.

Un arrêté de mise à disposition est ensuite pris par l’administration d’origine.

Il est toujours possible de refuser la mise à disposition.

Le fonctionnaire ou agent public en CDI ne commet pas de faute en refusant de donner son accord (Conseil d’Etat, 21 Mai 2007, n°264174).

Il existe toutefois une hypothèse de mise à disposition imposée au fonctionnaire prévu à l’article L.444-1 du Code Général de la Fonction publique : il s’agit du cas d’un agent hospitalier en cas de transfert ou de regroupement d’activités impliquant plusieurs établissements de santé ou lorsqu’un ou plusieurs établissements confient à un groupement de coopération sanitaire la poursuite d’une activité.

Cette situation rappelle celle des transferts automatiques des contrats de travail en droit du travail applicable au secteur privé en cas de transfert/reprise.

L’administration d’origine, qui reste titulaire du pouvoir de nomination, peut à tout moment mettre fin à la mise à disposition sans l’accord de l’agent, pour des motifs tirés de l’intérêt du service. Cette notion d’intérêt de service peut trouver son fondement soit dans l’organisme d’origine, soit dans l’organisme d’accueil (Conseil d’Etat, 23 Juin 1993, n° 99047).

Dans cette affaire, un agent de l’AP/HP avait été mis à disposition de l’administration pénitentiaire pour officier dans l’hôpital des prisons, mais avait été indisponible pendant une longue période en raison de problèmes de santé. Sur la demande de l’administration pénitentiaire, le Directeur Général de l’AP/HP avait mis un terme à la mise à disposition, position validée par la juridiction administrative.

Ce régime de « révocation » de la mise à disposition n’est pas sans rappeler le régime de la révocation du détachement

La rémunération pendant la mise à disposition

Comme on l’a vu, la rémunération du fonctionnaire / contractuel en CDI mis à disposition est prise en charge par l’administration (en réalité, celle-ci est remboursée par l’organisme d’accueil, mais peu importe pour l’agent).

Il continue à percevoir les indemnités auxquelles il avait droit dans son emploi d’origine.

Par exemple, il a été jugé qu’un fonctionnaire de Préfecture, mis à disposition dans une Préfecture d’outre-Mer ne donnant pas droit à l’indemnité d’exercice des missions de préfecture, a le droit à cette indemnité en raison de son emploi en Préfecture en métropole au moment de la mise à disposition (Conseil d’Etat, 18 décembre 2008, n° 296122).

Une autre question s’est posée sur la problématique de la rémunération : quid de la prise en charge des sujétions particulières imposées par le nouvel emploi ? Cette interrogation s’est surtout posée dans le cadre d’une mise à disposition vers un établissement privé, fonctionnant sur des logiques différentes. Peuvent se poser des questions d’heures supplémentaires, par exemple. Qui paye ? L’administration ou l’entreprise ?

La réponse a été donnée par le Conseil d’Etat : c’est à l’entreprise de payer ces sujétions particulières.

En l’espèce, un administrateur civil du Ministère de l’Equipement avait été mis à disposition de l’ADEME, que le Code de l’Environnement qualifie d’établissement public à caractère industriel et commercial, soit de droit privé.

Dans la convention de mise à disposition figurait une clause attributive de compétence aux juridictions administratives.

Le requérant avait donc saisi la justice administrative aux fins de paiement des heures supplémentaires.

Le Tribunal Administratif et le Conseil d’Etat rejettent ses prétentions au motif que le paiement de ces fameuses heures supplémentaires « n’intéresse que les rapports entre le requérant et l’organisme auprès duquel il avait été mis à disposition ».

Ce dernier étant de droit privé, le Conseil d’Etat juge que la juridiction administrative n’est pas compétente (Conseil d’Etat, 18 mars 2005, n° 265143).

 

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Me Sylvain Bouchon

Avocat au Barreau de Bordeaux

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