La loi sur la sécurisation de l'emploi modifie l'article L 1235-1 du code du travail, des barèmes sont mis en place pour non pas sécuriser l'emploi mais plutôt pour sécuriser l'employeur qui pourra "provisionner" une somme presque certaine pour un litige. Il pourra évaluer les risques...
Cet article est ainsi rédigé :
« En cas de litige, lors de la conciliation prévue à l'article L. 1411-1, l'employeur et le salarié peuvent convenir ou le bureau de conciliation proposer d'y mettre un terme par accord. Cet accord prévoit le versement par l'employeur au salarié d'une indemnité forfaitaire dont le montant est déterminé, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles, en référence à un barème fixé par décret en fonction de l'ancienneté du salarié.
Le procès-verbal constatant l'accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail prévues au présent chapitre.
A défaut d'accord, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie.
Si un doute subsiste, il profite au salarié. »
Le décret fixant le montant de l'indemnité qui peut être proposé par le Conseil de Prud'hommes a été publié le 7 août 2013: ICI. C'est une reprise pure et simple des barèmes qui ont été négociés dans l'accord ANI.(par exemple salarié ancienneté entre 0 et 2 ans : 2 mois de salaire- entre 8 et 15 ans : 8 mois de salaire...).
Ce barème ne serait qu'indicatif mais risque -t-il de ne pas devenir automatique ?
A la publication de ces barèmes, il est légitime de s'interroger comme l'a fait mon Confrère Steve DOUDET dans la semaine sociale LAMY, est-ce la fin de la conciliation, du juge conciliateur ? Comme l'a relevé Patrick HENRIOT (formation SAF sur loi sécurisation de l'emploi) le rôle du juge conciliateur ne serait-il réduit qu'à celui de passeur de plat ?
En effet le bureau de conciliation doit avoir un rôle actif, il doit s'efforcer à amener les parties à un accord... en proposant une somme fixée à l'avance, son rôle est réduit à néant !
Le risque de la mise en place de ces barèmes c'est qu'il ne soient plus simplement indicatifs mais qu'ils deviennent automatiques et ceci jusqu'au bureau de jugement !
Le barème est critiquable, le seul critère pris en compte est l'ancienneté. Or, pour évaluer un préjudice, il est nécessaire de tenir compte d'autres critères tel que l'âge, les charges de famille, les circonstances de la rupture...
Pour finir, ce barème a été clairement mis en oeuvre pour sécuriser l'employeur mais aussi pour désengorger les conseils de prud'hommes. Au lieu de donner des moyens humains et matériels aux juridictions, on règle le problème autrement, on indique aux juges ce qu'ils doivent proposer au détriment des intérêts du justiciable !
Je ne pense pas que ce barème aidera à réduire le flux des dossiers.
En effet, les avocats ne conseilleront pas dans tous les dossiers d'accepter le barème "indicatif".
En outre, le salarié a besoin de discussion et d'une vraie conciliation. Agir devant le Conseil de Prud'hommes n'est pas seulement une question d'argent, c'est souvent une question d'honneur.
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