Contestation de l'acte de signification de jugement par huissier pour vices ou irrégularités

Publié le Modifié le 05/11/2015 Vu 155 087 fois 63
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La notification viciée d'un jugement par un huissier de justice permet-elle de faire appel après le délai de recours ou de contester les saisies ?

La notification viciée d'un jugement par un huissier de justice permet-elle de faire appel après le délai d

Contestation de l'acte de signification de jugement par huissier pour vices ou irrégularités

Le 13 novembre 2014, la Cour de cassation a jugé que « l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités ne fait pas courir le délai de recours » (Cour de cassation, deuxième chambre civile, 13 novembre 2014, N° de pourvoi: 13-24547). 

Autrement dit, un acte de signification de décision de justice d'un huissier peut ne pas être valable. 

Par voie de conséquence, les mesures d'exécution des décisions de justice peuvent être viciées en cas d'irrégularités de l'acte de notification ou signification. 

La signification est un synonyme de notification, cette dernière est le terme générique. 

En pratique, les décisions de justice doivent être signifiées, par voie d'huissier, pour faire partir les délais de recours ou être exécutées et données lieu à des mesures de saisies sur la personne condamnée. 

Concrètement, cela consiste à faire remettre un acte en mains propres à cette dernière. 

Il importe peu que la personne ait été "touchée" c'est à dire que l'acte lui ait été réellement remis, en cas d'absence ou de déménagement.

Cependant, l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte vicie celui-ci. 

Lorsque l'information de la voie de recours ouverte, son délai et ses modalités ne sont pas correctement indiqués, le délai de recours ne court pas et un appel est toujours possible. 

Autrement dit, la décision n'est pas définitive et les saisies qui seraient éventuellement pratiquées peuvent donner lieu à contestations. 

En effet, l'article 528 du code de procédure civile dispose que :

« Le délai à l'expiration duquel un recours ne peut plus être exercé court à compter de la notification du jugement, à moins que ce délai n'ait commencé à courir, en vertu de la loi, dès la date du jugement.

Le délai court même à l'encontre de celui qui notifie. »

De plus, l'article 680 du code de procédure civile dispose que :

« L'acte de notification d'un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé ; il indique, en outre, que l'auteur d'un recours abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile et au paiement d'une indemnité à l'autre partie. »

En l'espèce, la société Banque Rhône-Alpes a engagé une procédure de saisie immobilière contre des époux débiteur d'une dette. 

Le juge de l'exécution a annulé la saisie pratiquée sur ces débiteurs, par décision du 8 août 2012 (la date a son importance pour ce qui suit). 

En effet, la banque disposait, de par la loi, d'un délai de 15 jours pour faire appel de cette décision. 

Chaque jour compte ...

Or, la banque a interjeté appel du jugement le 14 décembre 2012, soit plus 100 jours après le délai légal.

Il s'est donc posé aux juges la question de savoir si l'appel de la banque était tardif ou non.

En effet, l'acte de signification du jugement indiquait que le recours devait être formé devant la cour d'appel de Grenoble au lieu de la cour d'appel de Dijon. 

Cette erreur a-t-elle empêchée un recours et de faire courir le délai d'appel ?

Pour les juges d'appel, l'appel était irrecevable compte tenu que la banque, qui avait saisi la cour d'appel de Dijon, n'avait pas été trompée par les erreurs matérielles contenues dans la signification. 

La cour d'appel avait donc jugé que le recours formé après l'expiration du délai de quinze jours à compter de la signification du jugement était tardif

Cependant, la cour de cassation a casse et annule l'arrêt d'appel.

En effet, l'indication erronée d'une voie de recours entache de nullité la signification de la décision litigieuse. 

Il résulte de cette décision que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement sur la voie de recours ouverte ou ses modalités empêche de faire courir le délai d'appel. 

Ainsi, l'acte de signification d'un jugement affecté d'irrégularités rend valable l'appel tardif, malgré qu'il soit postérieur à l'expiration du délai légal imparti après la signification du jugement. 

En outre, il convient de souligner que la nullité de la notification pour vice de forme peut être invoquée même sans avoir à rapporter la preuve de l'existence d'un quelconque grief.

Il n'est donc pas nécessaire de prouver que le défaut de la mention ait pu faire grief à celui qui l'invoque. 

La seule erreur est autosuffisante pour vicier la signification. 

Ainsi, lorsque l'acte de signification d'un jugement est affecté d'irrégularités, telle la mention d'une juridiction erronée, la notification est nulle et le délai de recours ne court pas. 

La portée de cet arrêt est importante pour les personnes faisant l'objet de mesures d'exécution, telles que des saisies bancaires, sur salaires, mobilières ou immobilières, dans la mesure où :

  • le débiteur peut, le cas échéant, introduire un recours malgré le dépassement du délai d'appel et faire suspendre l'exécution des ;
  • en l'absence de la partie concernée, cette dernière peut faire jouer le non-respect de l'obligation légale de signifier la décision de justice dans le délai de six mois afin d'empêcher toutes voies d'exécution en vertu de celle-ci. 

Autrement dit, les parties peuvent valablement s'emparer d'une simple erreur matérielle pour prétendre à la recevabilité de leur appel et ainsi contester les saisies pratiquées. 

Par conséquent, les parties doivent vérifier que le procès-verbal de notification de l'huissier comporte :

  • les modalités de recours correctes ;
  • la désignation de la bonne juridiction devant laquelle le recours doit être exercé ;
  • le délai de recours. 

Seule l'assistance d'un avocat forgé aux mesures d'exécution permet de s'assurer que ces mentions soient correctes et donc que l'acte soit valable pour, le cas échéant, le contester en justice. 

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
Avocat à la Cour
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1 Publié par PC_de_l'Ain
05/03/2020 22:33

Maître,

Bravo et un grand merci pour cet excellent article. J'ai été victime d'un jugement passé "derrière mon dos" pour autoriser la vente d'une maison sous-évaluée et bizarrement devenue vide dans une affaire de succession fortement litigieuse. Le tribunal (Senlis) savait que j'avais demandé l'aide juridictionnelle à Senlis, qu'il a transmise à Bourg-en-Bresse, et qu'aucun avocat territorialement compétent n'avait encore été désigné. Le B.A.J. de l'Ain avait désigné un avocat de Bourg-en-Bresse pour me défendre dans l'Oise ! J'ai donc redemandé la désignation d'un avocat dans l'Oise, ce que le tribunal de Senlis savait, et aucun avocat territorialement compétent n'est désigné depuis maintenant depuis 2 ans. Mais j'ai veillé à renouveler mon dossier de demande d'A.J. et à envoyer des réclamations. La partie adverse (ma soeur escroc), son notaire véreux et ses 2 avocates ont essayé de profiter du fait que 1° je n'avais pas encore d'avocat désigné, et 2° je suis de surcroît malade et handicapée, avec de faibles ressources pour traverser la France et aller moi-même sur place à l'hôtel.

Coup de théâtre : dans la signification du jugement, l'huissier a noté que le jugement était " par défaut " et indiqué que je pouvais faire opposition auprès du même tribunal (Senlis) dans un délai d'un mois - ce que j'ai fait en demandant à nouveau l'aide juridictionnelle, ce qui bloque tout et dérange tout le monde dans le contexte de la grève des avocats. Maintenant le tribunal de Senlis me répond sur un ton jubilatoire que ce jugement (qui fait la liste de mes prétendus manquements car je signalais à chaque démarche que la demande d'aide juridictionnelle et la demande de désignation d'un avocat étaient en cours - et ordonne l'exécution provisoire de ce jugement, c.à.d. la vente immédiate de la maison) ne peut être frappé d'opposition car il est prétendument " réputé contradictoire " alors que les 32 pièces jointes de la partie adverse ne m'ont jamais été envoyées, malgré un " oubli " suivi d'une demande de ma part par recommandé. L'huisser prétend qu'il aurait fallu que je fasse appel auprès de la Cour d'appel d'Amiens dans un délai d'un mois à compter de la signification, et donc d'après eux c'est prétendument trop tard.

Donc votre article me sauve vraiment la mise - et calme mes angoisses depuis que j'ai reçu la lettre de Senlis. Je vais redemander l'aide juridictionnelle dans les jours qui viennent pour interjeter appel auprès de la Cour d'appel d'Amiens. Malheureusement tout cela fait perdre beaucoup de temps, mais je préfère me battre à fond pour faire valoir mes droits et les escroqueries de ma soeur, ce qui augmentera ma part d'héritage. Tout vient à point à qui sait attendre.

Je vous remercie infiniment pour votre article. Pour moi, il vaut de l'or. Je vous souhaite une très belle carrière - et plus tard une retraite digne du travail et des compétences des avocats (de certains d'entre eux en tous cas ;-)

2 Publié par Jjohn
14/09/2020 15:46

onjour Maître,
Deux questions au demeurant simplistes pour un Avocat.

1- Une LS m'envoyant un extrait des minutes du Greffes est-elle considérée comme une signification "officielle" m'informant du verdict de mon jugement civil ?
2- Sachant que j'ai la conviction que mes droits ont été bafoués (cela arrive-t-il à d'autres?), dois-je déjà faire appel ou puis-je aller directement en cassation ?
ps
Ce Tribunal (ex-TI) donc en procédure orale, et le jugement ne mentionne pas nombre (11) de documents pourtant fort utiles à débouter largement la partie adverse. Je suis perplexe. Avant de consulter, je voulais votre rapide point de vue.
cordialement
Jjohn

3 Publié par AleKS
21/07/2023 16:38

Bonjour Maître, suite à un AVP en 1979( j' ai loupé mon bac.. traumatisme crânien fracture du condyle multiples contusions qui m'ont pourri ma vie m'ont fait arrêter mon exercice d'infirmière libérale puis mon activité salariée de chargée de développement en application médicales en 2011 pour invalidité catégorie 2 puis à présent en retraite forcée à 62 ans pour "inaptitude totale" . mon affaire est passé au tgi puis cour d'appel puis somme d'appel contesté par l'"assurance adverse et porté en cour de cassation en 2022. mon avocate m'a alorsprévenue que dés la reception d'un courrier je devais desuite lui scanner vu que le délai pour répondre etait court . depuis Un huissier se serait présenté le 28 décembre 2022 à une ancienne adresse ( appartement vendu le 18 juin 2019) qu'il ya aurait déposé un avis de passage ( impossible ) et cet huissier se serait également présenté dans la même journée à mon appartement ( hall d'entrée avec digicode et visophone ) où j'étais présente puisque justement j’ai alitée pour une forte grippe et avec visite d'un ami pour m'aider.
Cet huissier n'est ni venu ni n'a déposé d'avis de passage (impossible dans mon ancienne résidence puisque même s'il pouvait rentrer, il n'y a PAS de boite aux lettres à mon NOM et le facteur n’ aurait pas pu déposer une lettre simple ( et où est le récépissé de "n’habite pas à l'adresse indiquée " pour cette vieille adresse) ) prétendument envoyée par l'huissier à ces deux adresses .
N'ayant pas eu connaissance de cet envoi je suis dans l'impossibilité de pouvoir répondre dans les 2 mois à cette signification et je dois abandonner mon combat contre la partie adverse suite à un accident pour lequel je suis en invalidité catégorie 2 depuis 2012 et en retraite pour inaptitude totale à l’âge de 62 ans sans tous mes trimestre avec un suivi en Centres anti douleur , paralysie , algie de la face cervicalgies ... je suis dépitée tout s'écroule à cause d'un travail baclé d'une personne assermentée que faire ? je vous remercie vraiment de votre aide. Respectueusement. Alexandra

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