Le délai et les conditions d’application de la prescription acquisitive immobilière trentenaire

Publié le 03/11/2014 Vu 473 494 fois 504
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Le délai de la prescription acquisitive immobilière est en principe trentenaire, c'est-à-dire de 30 ans.

Le délai de la prescription acquisitive immobilière est en principe trentenaire, c'est-à-dire de 30 ans.

Le délai et les conditions d’application de la prescription acquisitive immobilière trentenaire

L’usucapion ou prescription acquisitive est le fait pour le possesseur d’un bien immobilier (appartement, maison, terrain, immeuble, etc …) d'acquérir juridiquement un droit réel (droit de propriété) sur ce bien, après l'écoulement d'un certain délai durant lequel il s’est comporté comme le propriétaire, sans en avoir le titre.

A cet égard, l’article 2272 du Code civil dispose :

« Le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans. »

Ce délai de trente ans de la prescription acquisitive immobilière s’applique lorsque deux séries de conditions sont réunies :

- la possession du bien doit être caractérisée (I)

- et le possesseur doit être de mauvaise foi (II)

I. Une possession caractérisée du bien immobilier

La prescription acquisitive trentenaire est caractérisée lorsqu’elle répond à un certain nombre de conditions tenant à la possession de l’immeuble.

En effet, l’article 2261 du Code civil dispose que :

« pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ».

A cet égard, la Cour de cassation a jugé que :

« la prescription acquisitive n’a ni pour objet ni pour effet de priver une personne de son droit de propriété ou d’en limiter l’exercice mais confère au possesseur, sous certaines conditions, et par l’écoulement du temps, un titre de propriété correspondant à la situation de fait qui n’a pas été contestée dans un certain délai ; que cette institution répond à un motif d’intérêt général de sécurité juridique en faisant correspondre le droit de propriété à une situation de fait durable, caractérisée par une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire. » (Cass. civ. III, 12 octobre 2011, n° 11-40.055)

Par conséquent, pour pouvoir prescrire, la possession doit donc être :

- continue : c’est-à-dire être « exercée dans toutes les occasions comme à tous les moments où elle devait l’être après la nature de la chose possédée, sans intervalles anormaux assez prolongés [pas plus de 1 an ] pour constituer des lacunes et rendre la possession discontinue. » (Cass., 11 janvier 1950)

- paisible : autrement dit, le possesseur ne doit pas appréhender le bien immobilier par la force, la violence ou encore par une voie de fait. Ainsi, l’article 2263 du code civil prévoit que « Les actes de violence ne peuvent fonder non plus une possession capable d’opérer la prescription. La possession utile ne commence que lorsque la violence a cessé.»

- publique : elle doit être connue de tous et ne doit pas être dissimulée.

- non équivoque : le possesseur doit manifester sans ambiguïté son intention de se comporter comme le propriétaire.

- exercée à titre de propriétaire : les locataires, dépositaires, usufruitiers et toutes autres personnes qui détiendraient précairement le bien ou le terrain sont juridiquement dans l’impossibilité de se prévaloir valablement d’une quelque prétention sur le fondement de la prescription acquisitive.

Enfin, il convient de relever que la bonne foi du possesseur n’est pas une condition pour acquérir au bout de 30 ans.

La cour de cassation définit la bonne foi  comme étant la croyance de l’acquéreur du bien, au moment de l’acquisition, de tenir la chose du véritable propriétaire. (Cass. Civ. III, 18 janvier 1972)

La bonne foi permet simplement de gagner du temps sur la prescription acquisitive du bien immobilier et de permettre au possesseur de n’attendre qu’un délai de 10 ans au lieu de 30 ans pour acquérir ledit bien.

II. Un possesseur de mauvaise foi

La prescription trentenaire ne s’applique que lorsque le possesseur est de mauvaise foi.

Or, si la bonne foi est présumée, le possesseur est considéré comme étant de mauvaise foi dès lors qu’il occupe les lieux en sachant qu’il n’est pas le titulaire du droit qu’il exerce.

Cette situation se présente notamment lorsque le possesseur ne bénéficie d’aucun titre de propriété ou lorsque son titre n’est pas considéré comme régulier.

Dés lors que le possesseur est de mauvaise foi, il se voit alors appliquer le délai de prescription de droit commun (30 ans).

Toutefois, pour mémoire, le fait d’être de mauvaise foi n’a aucune incidence sur la prescription acquisitive et ne pourrait venir remettre en cause la possibilité pour le possesseur de prescrire.

En ce sens, les règles de la prescription acquisitive en matière immobilière dérogent aux règles en matière de droit contractuel.

En effet, la particularité du mécanisme de la prescription acquisitive en matière immobilière réside dans le fait que même en étant de mauvaise foi, il n’est nullement interdit au possesseur de devenir propriétaire de l’immeuble par usucapion.

Surtout, l’article 2258 du Code civil prévoit qu’on ne peut opposer à celui qui invoque le bénéfice de l’usucapion « l’exception déduite de la mauvaise foi ».

Par conséquent, une personne qui, sans disposer d’un quelconque titre de propriété, a occupé pendant au moins une durée de trente ans un bien immobilier ou un terrain, en sachant qu’elle n’en était pas propriétaire, peut, au terme de ce délai, en devenir le propriétaire par la voie de l’usucapion et au détriment du propriétaire légitime du bien.

Pour ce faire, le possesseur du bien immobilier en question devra faire reconnaître son droit de propriété par voie judiciaire.

En effet, la prescription acquisitive sur un bien immobilier ne s’applique pas automatiquement.

La revendication par le possesseur d’un droit de propriété sur un bien immobilier par la voie de l’usucapion  pourra se faire de deux manières :

- soit en engageant une action judiciaire pour faire constater que le bien immobilier lui est acquis,

- soit en opposant à l’action en revendication engagée contre lui par le véritable propriétaire du bien immobilier, une fin de non-recevoir tirée de la prescription acquisitive.

À cet effet, le possesseur devra être en mesure de prouver qu’il a parfaitement rempli toutes les conditions visées précédemment et ce pendant toute la période où il a « possédé » le bien immobilier.

La preuve de la possession du bien immobilier peut être faite par tous moyens et notamment par témoignages et attestations.

La prescription acquise a un effet rétroactif de sorte que le possesseur est considéré comme propriétaire du bien immobilier rétroactivement depuis le jour où il a occupé ledit bien.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris

01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1435 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Visiteur
13/06/2016 21:51

bonjour maitre

étant l'ainée mon grand père a payé pendant plus de 30 ans les impôts locaux d'une maison qui était dans l'indivision...et inhabité..par la suite il a dit a mon père si cela l'intéressait de la mettre en état et de payer les impôts a sont tour..mon père a fait cela pendant plus de 10 ans..entretemps mon grand père est décédé et les cousin de mon père on trouvé a dire que mon père avait la dite maison.sur ce fait mon père a vider la maison mais a toujours garder les clé et payé les impôts saut pendant 3 ans ou l'on j'ai fait un changement car il restait toujours un frère a mon grand et je lui ai fait adressé les impôts a son adresse et il m'a trouvé a dire car il ne voulais pas les payer..entretemps (4 a 5 ans après)il est mort et c'est mon père qui a repris la suite du règlement des impôts après la mort de son oncle..en sachant qu'il y avait un arriéré de 2 ans d'impayés que mon père a réglé et qu'il continue toujours de payé a ce jour. comment procéder et la loi des 30 ans nous est elle favorable..
dans l'attente de vous lire je vous remercie par avance..et si il vous faut plus de renseignements me le dire je peut vous téléphoner.
cordialement

2 Publié par Visiteur
16/06/2016 17:56

bonjour Maître,

Peut-il y avoir usucapion d'un bâtiment construit sans permis de construire dans les années 50 sur jardin, partie commune à jouissance exclusive, dans un immeuble en copropriété?
Cordialement.

3 Publié par Visiteur
18/06/2016 12:36

Bonjour Maître,

Depuis + de 30 ans nous entretenons un terrain communal, qui à l'époque était un ancien dépotoir que nous avons nettoyer. A ce jour peut-on prétendre être les propriétaires et quelles sont les démarches a effectuer.

4 Publié par Visiteur
20/06/2016 21:33

Bonjour Maître,
Je viens d'acheter une maison en zone rurale dans un hameau, devant la maison une terrasse engazonée soutenue par un mur fait il y a plus de 30 ans.Mon voisin me dit qu'en regardant le cadastre une partie de la terrasse lui appartient. Mes vendeurs ont joui de cette terrasse depuis plus de 30 ans, l'acte de vente a été signé le 31 mars 2016. Quand est-il de l'usucapion ?

5 Publié par Maitre Anthony Bem
20/06/2016 21:45

Bonjour SD,

Je crains qu'il ne puisse pas y avoir d'usucapion d'un bâtiment construit sans permis de construire du fait que la partie est commune mais surtout car le droit d'usage est à jouissance exclusive dans un immeuble en copropriété.

Cordialement.

6 Publié par Maitre Anthony Bem
20/06/2016 21:50

Bonjour ZAMIE,

Je crains que vous ne puissiez pas valablement revendiquer la préscription acquisitive dont pouvez bénéficier vos vendeurs.

Il faudrait idéalement procéder à des recherches jurisprudentielles plus approfondies sur votre situation personnelle afin de lever tout doute.

Cordialement.

7 Publié par Maitre Anthony Bem
20/06/2016 21:53

Bonjour bigchief,

Je vous confirme que vous pouvez prétendre à l'usucapion sur ce terrain communal si vous disposez d'éléments de preuve de l'entretien de ce terrain.

Le cas échéant, il faut saisir le tribunal de grande instance par voie d'avocat.

Cordialement.

8 Publié par Visiteur
21/06/2016 15:13

Bonjour mètre je sui installé depuis 1978 sur un terrain communale avec l électricité à mon non c'est interin de jardins ouvrier que j'occupe et entretien avec mai s enfants la mairie veux me faire partir répondez-moi
Merci

9 Publié par Maitre Anthony Bem
21/06/2016 21:23

Bonjour Rude,

Je crains qu'à défaut de procédure initiée de votre part aux fins d'usucapion du terrain devant le tribunal de grande instance, vous ne puissiez pas revendiquer quelque droit de propriété sur celui-ci.

Cordialement.

10 Publié par Visiteur
22/06/2016 13:39

Maître,
Je tiens a vous remercier, car vous m'avez répondu peu de temps après ma demande.
"Je vous confirme que vous pouvez prétendre à l'usucapion sur ce terrain communal si vous disposez d'éléments de preuve de l'entretien de ce terrain."
Ceci est votre réponse, j'ai fais en 1983,une demande en mairie pour entretenir ce terrain, ma demande a été validée par le conseil municipal, depuis nous l'entretenons ainsi qu'une partie du ruisseau qui s'écoule juste a proximité du terrain, et nous sert de stockage pour le bois. Si je comprends bien , je formule ma demande en mairie en AR avec copie du PV du conseil de l'époque. Merci par avance pour la réponse, Maître....Avec toutes mes sincères salutations.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1435 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles