La liquidation judiciaire de la société du dirigeant caution comme moyen de défense contre la banque

Publié le Modifié le 29/03/2017 Vu 111 442 fois 158
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Suite au prononcé de la liquidation judiciaire de sa société, quelles dettes sociales le dirigeant caution est-il tenu de payer en exécution de ses engagements de garantie tel qu'un cautionnement ?

Suite au prononcé de la liquidation judiciaire de sa société, quelles dettes sociales le dirigeant caution

La liquidation judiciaire de la société du dirigeant caution comme moyen de défense contre la banque

Un dirigeant ou une société peut être amené à souscrire des contrats de crédit ou obtenir des autorisations de découvert auprès d’établissements bancaires pour exercer et développer leur activité commerciale (achat de fonds de commerce, de parts sociales, de locaux commerciaux, financement de besoin de trésorerie en compte courant, etc ...).

Le cas échéant, le dirigeant doit souvent garantir à titres personnel et solidaire le paiement des dettes de la société qu'il dirige, et ce notamment au moyen d’un acte de cautionnement.

Or, cet engagement bancaire consistant à garantir de ses deniers le payement de la dette sociale en cas d’incapacité financière de la société est risqué financièrement pour le dirigeant caution ou ceux qui s'engagent en tant que telle à ses côtés.

En effet, le cautionnement donné par le dirigeant peut être mis en œuvre suite au redressement et/ou à la liquidation judiciaires de sa société et l’obliger personnellement au paiement de sommes parfois très importantes.

Cependant, selon la jurisprudence, les personnes qui se sont portées caution doivent savoir qu'il existe de nombreux arguments permettant de faire annuler leur engagement.

Aussi, le 4 novembre 2014, la Cour de cassation a refusé de condamner un dirigeant caution au paiement de la totalité de la dette sociale réclamée par l’établissement bancaire (Cass, Com, 4 novembre 2014, n°12-35357).

En l’espèce, une société avait conclu plusieurs contrats de prêt auprès d'une caisse du Crédit Agricole.

Or, la société a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires.

Dans ce contexte, la banque a déclaré sa créance à hauteur de 359.175, 62 euros et a assigné à ce titre le dirigeant caution solidaire de la société en exécution de ses cautionnements.

Alors que la Cour d’appel a condamné le dirigeant caution au paiement de la créance déclarée, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel en jugeant que :

  • d’une part, « (…) en l’absence d’une clause contraire, dont l’existence n’était pas alléguée en l’espèce, la déchéance du terme résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal n’avait d’effet qu’à l’égard de celui-ci et était sans incidence sur la situation de la caution poursuivie en paiement, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».  
  • d’autre part, « (…) sans rechercher si ces créances étaient échues le (jour de l’ouverture du redressement judiciaire), la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».

Autrement dit, si le prononcé de la liquidation judiciaire entraîne l’obligation de payer immédiatement et en sa totalité la dette sociale, à défaut de clause contraire, cette exigibilité de la dette sociale est uniquement opposable à la société débiteur principal et non au dirigeant caution.

En effet, en cas d’appel en garantie, le dirigeant caution est seulement tenu au paiement des dettes exigibles, c’est-à-dire impayées au jour de l’ouverture du redressement judiciaire de sa société, mais encore faut-il que les éléments de preuve produits par la banque soit exempts de critique. 

Pour mémoire, l’article 2290 du code civil dispose que :

« Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses.

Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses.

Le cautionnement qui excède la dette, ou qui est contracté sous des conditions plus onéreuses, n'est point nul : il est seulement réductible à la mesure de l'obligation principale. »

En outre, selon l’article L. 622-22, alinéa 1er, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, aujourd’hui repris à l’article L.643-1 du même code :

« Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues ».

En l’espèce, en se fondant sur les mêmes textes, la Haute Cour a rappelé les principes selon lesquels :

  • le jugement qui prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances qui n'étaient pas échues à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire ;
  • la déchéance du terme convenu, résultant du prononcé de la liquidation judiciaire du débiteur principal, n'a d'effet qu'à l'égard de celui-ci et ne peut pas être étendue à la caution, à défaut de clause contraire.

Ainsi, concrètement, la banque doit établir et justifier à la caution le montant de la somme due par la société sans pouvoir utilement invoquer une déclaration de créances établie dans le cadre de la procédure collective de la société pour s'y référer.

L'analyse des documents produits par la banque peut permettre de découvrir des problèmes de décompte de la créance et que le montant de la somme demandée en paiement n'est pas justifiée.

Au cas d'espèce, grâce à cet argument, le dirigeant caution n’a donc pas été condamné au paiement de la totalité de la créance réclamée par la banque initialement.

Par conséquent, grâce aux règles propres aux procédures collectives, le dirigeant caution peut s’opposer valablement, le cas échéant, à une demande en paiement de la banque d’un montant supérieur à celui de la dette sociale qu’il doit garantir en exécution de ses engagements.

NB : Afin d'approfondir le sujet des moyens de défense dont disposent les cautions poursuivies en paiement par la banque, je vous invite à lire mon article publié ICI.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
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1 Publié par Visiteur
18/04/2017 04:07

Bonjour maître

Mon mari à fermer sa société par liquidation judiciaire depuis le 16/01/2017 il sait porter cauton solidaire de 20000e à ce jour le dossier et chez le huisser sur le document la banque demande des frais en plus de 1500e
Ma question est de savoir si on peut faire appel
Mon mari étant au chômage actuellement
Merci pour votre aide

2 Publié par Maitre Anthony Bem
18/04/2017 08:05

Bonjour Galau,

Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un jugement de condamnation mais plutôt d'un commandement de payer ou d'une assignation en justice, de sorte que vous pourriez utilement vous défendre le cas échéant afin de tenter de faire annuler votre dette en principal et accessoires.

Cordialement.

3 Publié par Visiteur
23/04/2017 19:22

Bonjour,

Le délai qu'a la banque pour se retourner contre une caution démarre -t-il au jugement de clôture de la liquidation de la société ou au jugement de liquidation judiciaire ?
pourquoi parlez vous parfois d'un délai de 2 ans ?
Cordialement.

4 Publié par Maitre Anthony Bem
23/04/2017 21:12

Bonjour diall,

Selon la jurisprudence, la déclaration de la créance de la banque au passif de la liquidation judiciaire de la société débitrice principale interrompt le délai de la prescription à l'égard de la caution solidaire.

Cet effet interruptif prolonge jusqu'à la date du jugement de clôture de la liquidation judiciaire le délai de prescription de l'action quinquennale en paiement contre la caution par la banque.

Le délai de prescription de deux ans était celui applicable avant le revirement jurisprudentiel de février 2016.

Pour différentes raisons, il conviendrait de revenir à ce délai de deux ans.

Je m'y attache au travers de mes dossiers.

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
19/05/2017 16:27

Bonjour maitre,

J'ai en projet de monter une entreprise,
petite question si j'emprunte 100000 euros à la banque et que au bout de la premiere année, il me reste donc 85000 en gros à rembourser mais mon activité ne marche pas et je suis donc obligé de deposer le bilan et de mettre fin à l'activité..

quid des 85000 restants ? qui les rembourses est ce que ce sera à ma charge ou pas du tout je ne prend aucun risques sinon celui du moral ..

merci d'avance
CDT
Guillaume

6 Publié par Maitre Anthony Bem
19/05/2017 19:13

Bonjour Guillaume,

Si votre activité ne marche pas et que vous êtes obligé de deposer le bilan, la dette de la société sera due par la caution si un cautionnement à été pris en garantie de remboursement du prêt par la banque.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
19/05/2017 21:54

Merci pour la réponse !!

La caution est forcément une personne physique ? Oú cela peut être une somme payée en plus à la banque tous les mois que justement à l'image d'une assurance, elle rembourse si y'a un soucis tél que celui évoqué plus haut ?

8 Publié par Maitre Anthony Bem
20/05/2017 07:12

Bonjour Guillaume,

La caution est très souvent une personne physique mais il peut s'agire aussi d'une personne morale, au cas par cas.

Cordialement.

9 Publié par Visiteur
22/05/2017 09:07

Bonjour,
Gérant d'une SARL on a bénéficié d’un financement par découvert bancaire, garantie par la caution personnelle et solidaire donnée de ma femme. Les bilans 2016 sont remis à la banque, la situation financière de la SARL continue à se dégrader, des pertes sont constatées. La banque décide de mettre fin au découvert. La SARL est en procédure de sauvegarde, quelles arguments peut opposer la caution au banquier?

10 Publié par Visiteur
22/05/2017 13:45

Bonjour,
Je souhaiterais avoir quelques renseignements.
Mon mari a été commerçant en nom propre pendant 2 ans. Pour l'achat du fonds de commerce et du matériel nécessaire à son activité, il a souscrit à un prêt bancaire. Etant mariés sous le régime de la communauté de biens j'étais donc d'office inscrite sur ce prêt.
Je précise que je n'intervenais pas dans l'activité commerciale de mon mari étant salariée depuis des années dans une Société. Je n'avais pas le statut de conjoint collaborateur.
Une assurance auprès de la BPI avait été souscrite au moment du prêt.
Suite de grandes difficultés financières mon mari a été contraint de rendre son local commercial et arrêter son activité commerciale.
Le prêt n'a pu être honoré suite à la cessation d'activité de mon époux.
Une liquidation judiciaire est en cours auprès du Tribunal de Commerce dans le cadre des dettes contractées.
La banque ayant attribuée ce prêt me menace désormais, par voie d'huissier, de saisie sur compte et me réclame à moi seule le paiement de l'intégralité de ce prêt.
Je souhaite savoir si cela est normal et fondé ou simplement une tentative d'intimidation.
Je précise que tout ces échanges sont téléphoniques et que nous n'avons (mi mon mari, ni moi même) été convoqués auprès d'un tribunal...
Je vous remercie pour votre réponse.
Cordialement,

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