La liquidation judiciaire de la société du dirigeant caution comme moyen de défense contre la banque

Publié le Modifié le 29/03/2017 Vu 111 464 fois 158
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Suite au prononcé de la liquidation judiciaire de sa société, quelles dettes sociales le dirigeant caution est-il tenu de payer en exécution de ses engagements de garantie tel qu'un cautionnement ?

Suite au prononcé de la liquidation judiciaire de sa société, quelles dettes sociales le dirigeant caution

La liquidation judiciaire de la société du dirigeant caution comme moyen de défense contre la banque

Un dirigeant ou une société peut être amené à souscrire des contrats de crédit ou obtenir des autorisations de découvert auprès d’établissements bancaires pour exercer et développer leur activité commerciale (achat de fonds de commerce, de parts sociales, de locaux commerciaux, financement de besoin de trésorerie en compte courant, etc ...).

Le cas échéant, le dirigeant doit souvent garantir à titres personnel et solidaire le paiement des dettes de la société qu'il dirige, et ce notamment au moyen d’un acte de cautionnement.

Or, cet engagement bancaire consistant à garantir de ses deniers le payement de la dette sociale en cas d’incapacité financière de la société est risqué financièrement pour le dirigeant caution ou ceux qui s'engagent en tant que telle à ses côtés.

En effet, le cautionnement donné par le dirigeant peut être mis en œuvre suite au redressement et/ou à la liquidation judiciaires de sa société et l’obliger personnellement au paiement de sommes parfois très importantes.

Cependant, selon la jurisprudence, les personnes qui se sont portées caution doivent savoir qu'il existe de nombreux arguments permettant de faire annuler leur engagement.

Aussi, le 4 novembre 2014, la Cour de cassation a refusé de condamner un dirigeant caution au paiement de la totalité de la dette sociale réclamée par l’établissement bancaire (Cass, Com, 4 novembre 2014, n°12-35357).

En l’espèce, une société avait conclu plusieurs contrats de prêt auprès d'une caisse du Crédit Agricole.

Or, la société a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires.

Dans ce contexte, la banque a déclaré sa créance à hauteur de 359.175, 62 euros et a assigné à ce titre le dirigeant caution solidaire de la société en exécution de ses cautionnements.

Alors que la Cour d’appel a condamné le dirigeant caution au paiement de la créance déclarée, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel en jugeant que :

  • d’une part, « (…) en l’absence d’une clause contraire, dont l’existence n’était pas alléguée en l’espèce, la déchéance du terme résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal n’avait d’effet qu’à l’égard de celui-ci et était sans incidence sur la situation de la caution poursuivie en paiement, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».  
  • d’autre part, « (…) sans rechercher si ces créances étaient échues le (jour de l’ouverture du redressement judiciaire), la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».

Autrement dit, si le prononcé de la liquidation judiciaire entraîne l’obligation de payer immédiatement et en sa totalité la dette sociale, à défaut de clause contraire, cette exigibilité de la dette sociale est uniquement opposable à la société débiteur principal et non au dirigeant caution.

En effet, en cas d’appel en garantie, le dirigeant caution est seulement tenu au paiement des dettes exigibles, c’est-à-dire impayées au jour de l’ouverture du redressement judiciaire de sa société, mais encore faut-il que les éléments de preuve produits par la banque soit exempts de critique. 

Pour mémoire, l’article 2290 du code civil dispose que :

« Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses.

Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses.

Le cautionnement qui excède la dette, ou qui est contracté sous des conditions plus onéreuses, n'est point nul : il est seulement réductible à la mesure de l'obligation principale. »

En outre, selon l’article L. 622-22, alinéa 1er, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, aujourd’hui repris à l’article L.643-1 du même code :

« Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues ».

En l’espèce, en se fondant sur les mêmes textes, la Haute Cour a rappelé les principes selon lesquels :

  • le jugement qui prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances qui n'étaient pas échues à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire ;
  • la déchéance du terme convenu, résultant du prononcé de la liquidation judiciaire du débiteur principal, n'a d'effet qu'à l'égard de celui-ci et ne peut pas être étendue à la caution, à défaut de clause contraire.

Ainsi, concrètement, la banque doit établir et justifier à la caution le montant de la somme due par la société sans pouvoir utilement invoquer une déclaration de créances établie dans le cadre de la procédure collective de la société pour s'y référer.

L'analyse des documents produits par la banque peut permettre de découvrir des problèmes de décompte de la créance et que le montant de la somme demandée en paiement n'est pas justifiée.

Au cas d'espèce, grâce à cet argument, le dirigeant caution n’a donc pas été condamné au paiement de la totalité de la créance réclamée par la banque initialement.

Par conséquent, grâce aux règles propres aux procédures collectives, le dirigeant caution peut s’opposer valablement, le cas échéant, à une demande en paiement de la banque d’un montant supérieur à celui de la dette sociale qu’il doit garantir en exécution de ses engagements.

NB : Afin d'approfondir le sujet des moyens de défense dont disposent les cautions poursuivies en paiement par la banque, je vous invite à lire mon article publié ICI.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
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1 Publié par Maitre Anthony Bem
07/11/2018 18:23

Bonjour Jo,

Je vous confirme que vous devrez en effet continuer de payer le prêt qui ne s'eteindra pas avec la liquidation.

Cordialement.

2 Publié par Visiteur
11/11/2018 12:05

Bonjour Maître,
J'ai clôturé mon activité qui était en régime social simplifiée en 17/02/ 2015 avec un découvert de 9000 euros.aujourd'hui en 11/11/2018 la banque me poursuit trois ans plus tard!!! . Il s'agissait d'un découvert autorisé et un prêt.jen'ai pas de caution personnel
Que puis je faire?
Je vous remercie pour toutes vos réponses et votre aide

3 Publié par Visiteur
17/11/2018 06:38

Bonjour Maître,
J'ai prêté une somme de 22 500,00 € à un restaurateur par le biais de 3 chèques en 2012, 2013 et 2014, Libellés au nom de sa Société (SAS) sans "reconnaissance de dettes".

Cette Société est en liquidation judiciaire depuis mai 2018. j'étais une cliente régulière avec ma maman (décédée entre temps)et ce restaurateur était en difficulté financière (jeune entrepreneur) pour payer l'URSSAF et autres charges sociales.
Ayant donc eu connaissance de cette Liquidation Judiciaire, j'ai essayé de contacter le gérant, par téléphone et par Mail afin de régler la situation à l'amiable, mais sans réponse de sa part.
Il me restait donc un moyen de passer par "l'injonction de payer" tant au Tribunal d'Instance qu'au Tribunal de Grande Instance, mais mes 2 demandes ont été rejetées.
Comment puis-je récupérer mon argent?
Ma naïveté, mon excès de confiance risque de me faire perdre une partie de mes économies après de nombreuses années de dur labeur et d'énormes privations, dans le but de subvenir à certains besoins, lors de ma retraite datant de 2013.

Je ne souhaite en aucun cas, abuser de votre précieux temps, mais je vous remercie de prendre connaissance de mon infortune.
Très cordialement

4 Publié par Maitre Anthony Bem
17/11/2018 07:18

Bonjour Bouboul,

Sans acte de reconnaissance de dette conclu avec la société bénéficiaire et celle-ci étant en cours de procédure collective, vous ne disposez d’aucune chance de recouvrer quoi que ce soit par la voie judiciaire à son encontre.

Il vous faut donc trouver une solution amiable, si possible, avec le « jeune entrepreneur ».

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
05/12/2018 18:09

Bonsoir Maître

Je suis actuellement l'un des 3 associés (30%) et directeur d'une sas. N'ayant plus d'actif nous souhaitons arrêter l'activité. Nous avons à ce jour uniquement une dette bancaire (aucune autre créance). Il nous reste environ 11000€ à rembourser sur un crédit de 15000€. Nous sommes caution solidaire à 33% chacun et BPI 50% du crédit.
Je souhaiterais envisager le remboursement de ma part mais mes associés préfèrent partir en LJ.
Mon problème est qu'à ce jour j'ai un nouveau projet et que j'ai besoin de contracter un nouveau crédit bancaire.
Existe t il une solution pour ne pas effrayer les banques pour mon projet futur sachant que je souhaite être de bonne foi et payer mon dû ?
Je vous remercie d'avance pour votre support.
Bien cordialement

6 Publié par Sezny
10/03/2019 16:31

Bonjour .caution solidaire signée par mon.mari et moi même (60000€)par personne de façon plus que limite par le banquier qui se présente sans rv dans notre agence de location de voitures
C'est cela à été fait très vite ( en laissant partir en priorité les médecins et chirurgiens )qui devaient voir leur malades
Le banquier repart avec les 3 exemplaires du fameux document
La foule étant partie , japelle la personne qui venait de décrocher une promotion à Lyon.Elle me dit avec un aplomb déconcertant je ne peux plus rien faire, je serais resté à st Étienne je pouvais déchirer les 2 cautions .voilà la triste histoire
La liquidation fut prononcée quelques jours plus. DEPUIS cette date je harcèlee par mcs recouvrement qui ponctionne mes deux comptes
ET subitement MCS.me propose un abondant partiel de la dette selon le code monétaire et financier me dit il Le cautionnement à était sais contrôler notre patrimoine ni nos salaires. NORMALEMENT JE DEVAIS LISTER NOS bien ( zéro ) et masse salariale
DEPUIS LE jugement je n ai de nouvelle, à part en 2017 ( Mcs) saisie titrisation 1et 2.JE crois que mon avocate c'est laissée impressionner par cette armada
J'espère que vous pouvez m'aider. Cordialement

7 Publié par wwwsarl
22/07/2019 15:22

Bonjour Maître
Est-il possible de faire requalifier une garantie autonome à première demande en caution. J ai signé cette garantie pour un prêt brasseur en qualité de gérant SARL , il s'agit en fait d'un crédit classique servant à acheter le fond de commerce de restauration.
s'agit t-il d' une garantie autonome ou d'une caution ?
Avec mes remerciements

8 Publié par Jeromechanussot
10/06/2020 13:00

Bonjour, mon entreprise (bar restaurant concerts expos) fait l’objet d’une liquidation judiciaire (en cours), suite à la fermeture imposée suite à la crise sanitaire.
En tant que dirigeant caution, la banque m’a signaler qu’elle allait envoyer le dossier au contentieux. Caution à rembourser : 32000 euros.
J’ai travaillé pendant 3 ans sans pouvoir me prendre de salaire, ma situation personnelle est donc assez tendue. Quels sont les recours envisageables pour éviter de rembourser cette somme, d’autant plus que la liquidation est due à un événement dont je ne suis pas responsable ?
Merci

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