Garantie des vices cachés et cession d'un fonds de commerce

Publié le Modifié le 09/10/2014 Vu 7 014 fois 0
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La garantie des vices cachés est souvent invoqué dans les ventes de biens meubles corporels, notamment dans les opérations juridiques impliquant un professionnel et un profane. Mais la garantie des vices cachés trouve à s'appliquer de façon beaucoup plus large, quelle que soit la nature du bien vendu (immobilier ou mobilier, corporel ou incorporel). Cet arrêt rappelle l'application de la garantie des vices cachés à la vente de bien meubles incorporels.

La garantie des vices cachés est souvent invoqué dans les ventes de biens meubles corporels, notamment dans

Garantie des vices cachés et cession d'un fonds de commerce

Lors d'un arrêt rendu le 3 décembre 2013, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a rappelé l'application de la garantie des vices cachés à l'opération juridique de cession d'un fonds de commerce (Cass. com., 3 déc. 2013, n° 12-20.991, F-D, Sté Les Peupliers c/ Y : Juris-Data n° 2013-027909).

La garantie des vices cachés est souvent invoqué dans les ventes de biens meubles corporels, notamment dans les opérations juridiques impliquant un professionnel et un profane.

Mais la garantie des vices cachés trouve à s'appliquer de façon beaucoup plus large, quelle que soit la nature du bien vendu (immobilier ou mobilier, corporel ou incorporel).

Cet arrêt rappelle l'application de la garantie des vices cachés à la vente de bien meubles incorporels.

En l'espèce, le 18 décembre 2007, une société vend un fonds de commerce de camping et hôtellerie de plein air. Un rapport établi en janvier 2008, à la demande de la communauté de communes, a révélé que les installations d'assainissement autonome présentaient des dysfonctionnements nécessitant des travaux de mise en conformité. Après avoir diligenté une mesure de saisie-conservatoire, les acquéreurs ont assigné le vendeur en garantie des vices cachés.

Il était apparu postérieurement à la vente que le système d'assainissement présentait des dysfonctionnements « qui rendaient le fonds impropre à son usage ». Cela caractérise le vice caché au sens de l'article 1641. Ainsi, les juges du fond ont condamné le vendeur à verser aux acquéreurs des dommages et intérêts correspondant au coût des travaux de remise en état du réseau d'assainissement.

Dans cette affaire, le vendeur objectait notamment que le système d'assainissement était autonome et ne faisait pas partie des éléments du fonds de commerce cédé.

La Cour de cassation réplique que « le système d'assainissement était inclus dans l'accord de cession dès lors que, nécessaire à l'exploitation du fonds, il faisait l'objet d'un engagement du vendeur ».

Par ailleurs, cet arrêt permet de rappeler que les textes relatifs à la garantie des vices cachés sont applicables à la cession d'un fonds de commerce – qu'il s'agisse des textes de droit commun (articles 1641 à 1646-1 du Code civil) ou de droit spécial (article L.141-3 du Code de commerce).
 

I/ L'application du droit commun de la garantie des vices cachés à la cession d'un fonds de commerce

Les articles 1641 à 1646-1 du Code civil posent les règles relatives à la mise en œuvre de la garantie des vices cachés.

L'article 1641 dispose que :

« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ».

En l'espèce, il était apparu postérieurement à la vente que le système d'assainissement présentait des dysfonctionnements « qui rendaient le fonds impropre à son usage ». Ainsi, le vice caché au sens de l'article 1641 était caractérisé.

L'article 1643 dispose que le vendeur « est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie ».

En l'espèce, la Cour d'Appel relève que « ni les acquéreurs, ni les clients, n'étaient en mesure de déceler les dysfonctionnements, qui ne sont apparus qu'au vu d'une étude technique réalisée par un professionnel ». Cette affirmation est reprise par la Cour de cassation et aucune limite conventionnelle à la garantie ne semble avoir été émise puisque cette dernière met en œuvre la garantie des vices cachés pour condamner le vendeur à des dommages et intérêts.

En outre, l'article 1645 du Code civil dispose que :

« Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur ».


En l'espèce, c'est bien cet article qui a été mis en œuvre, et non l'article 1644 qui prévoit une action rédhibitoire ou estimatoire.

En effet, en confirmant la condamnation des vendeurs au paiement des dommages et intérêts, la Cour de cassation semble entériner l'existence d'une mauvaise foi du vendeur. Ce dernier a déclaré dans l'acte de vente que « toutes les installations du fonds étaient en état de marche et conformes aux obligations en la matière, notamment au regard des obligations d'hygiène », alors qu'il semblait avoir connaissances des vices au moment de la vente. La Cour de cassation évoque notamment l'existence de « discussions avec la mairie au sujet de problèmes d'assainissement » en novembre 2007, soit un mois avant la vente.

Bien que la Cour ne se prononce pas directement sur la mauvaise foi du vendeur dans cet arrêt, il est de jurisprudence constante que ce dernier doit des dommages et intérêts à l'acquéreur lorsqu'il manque à son obligation de loyauté et de bonne foi résultant de l'article 1134 du Code civil. Les juridictions judiciaires tentent de faire respecter l'équilibre contractuel et protègent le cocontractant qui s'est vu trompé par son partenaire contractuel.

Cette protection est renforcée par un texte spécial relatif à la vente des fonds de commerce.
 

II/ L'extension de la garantie des vices cachés à l'inexactitude des énonciations du vendeur dans l'acte de vente du fonds de commerce


 

L'article L.141-3 du Code de commerce relatif à l'acte de vente d'un fonds de commerce dispose que :

« Le vendeur est, nonobstant toute stipulation contraire, tenu de la garantie à raison de l'inexactitude de ses énonciations dans les conditions édictées par les articles 1644 et 1645 du code civil.

Les intermédiaires, rédacteurs des actes et leurs préposés, sont tenus solidairement avec lui s'ils connaissent l'inexactitude des énonciations faites ».

Ce texte spécial renforce l'application de la garantie des vices cachés à la cession d'un fonds de commerce.

Tout d'abord, il rappelle l'existence d'une telle garantie. Ce rappel est utile et accessible aux cocontractants, qui vont se référer aux articles du Code de commerce pour conclure un acte de vente d'un fonds de commerce, et qui auront dès lors connaissance du mécanisme de la garantie des vices cachés et des textes de droit commun qui le régissent.

Ensuite, l'article L.141-3 du Code de commerce étend la garantie des vices cachés à « l'inexactitude » des énonciations du vendeur. Cela signifie que toute inexactitude sera assimilée à un vice caché, même si cette inexactitude ne constitue pas un vice inhérent à la chose – vice la rendant impropre à son usage (sur l'inexactitude de la rentabilité d'une officine pharmacie constituant un vice caché au sens des articles L.141-3 du Code de commerce et 1644 et 1645 du Code civil : Cour de cassation, 1ère chambre civile, 3 juillet 1996, N°94-16.196).

Enfin, l'article L.141-3 du Code de commerce interdit toute stipulation contraire, c'est-à-dire que les parties ne peuvent, par leur propre volonté, éluder la garantie des vices cachés en cas d'inexactitudes des énonciations du vendeur.

En conclusion, les textes de droit commun visent à protéger tout acquéreur contre un vice caché de la chose vendue, qu'il s'agisse d'un bien meuble corporel ou incorporel. Les textes du Code de commerce renforcent cette garantie au bénéfice de l'acquéreur.

Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.


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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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