Le droit de faire opposition à un chèque est ouvert au tireur d’un chèque lorsque le porteur du chèque est en liquidation judiciaire. Cette règle résulte du Code monétaire et financier.
En effet, en vertu de l’article L131-35 al 2, « le tireur peut faire opposition au paiement d’un chèque en cas de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur ».
La loi autorise donc l’opposition en cas de procédure collective du porteur pour éviter qu’il n’encaisse seul le montant du chèque au mépris des règles prévoyant son dessaisissement et que le tireur fasse un paiement nul.
A ce titre, il apparait que la jurisprudence a nettement évolué et exige que le droit d’opposition soit exercé en respectant certaines conditions.
Dans un premier temps, dans un arrêt du 12 octobre 1993, la Cour avait fait une application littérale de l’article L 131-35, qui ne distingue pas selon que le chèque frappé d’opposition se trouve entre les mains du « failli » ou dans celles du mandataire de justice chargé de le représenter.
La Cour de cassation avait refusé d’accueillir une demande de mainlevée d’une opposition formée par le tireur d’un chèque remis au mandataire de justice de son débiteur (Cass. com. 12-10-1993 n° 91-15.648 : RJDA 2/94 n° 189 ).
Dans un arrêt du 8 juillet 2008, la Cour de Cassation opère un revirement de jurisprudence.
En effet, en l’espèce, une société avait payé par chèque son fournisseur qui peu après avait été déclaré en liquidation judicaire. Le chèque avait été alors remis au liquidateur qui l’avait endossé et présenté au paiement.
Le tireur du chèque avait fait opposition se fondant sur l’article L131-35 énonçant qu’il n’est admis d’opposition au paiement par chèque qu’en cas de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du porteur.
Cependant, la Cour d’appel avait constaté que l’opposition avait été formée après la remise du chèque au liquidateur et après que celui-ci l’ait endossé, qu’en conséquence l’opposition était irrégulière.
La Cour de Cassation indique « l’opposition au paiement d’un chèque prévue à l’article L131-35 au motif que son porteur est en liquidation judiciaire, ne peut plus être admise s’il est établi que le titre en cause a été remis au liquidateur ».
La Cour donne donc ici une limite à la faculté de former opposition avec une date butoir : la remise du chèque au liquidateur (Cass. com. 8 juillet 2008 n° 07-16.936 (n° 808 FS-PB), Sté Carrefour c/ Lize ès qual.
Cet arrêt rapporte donc la solution inverse de l’arrêt du 8 octobre 1993.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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