Période suspecte, liquidateur judiciaire et nullité

Publié le 04/11/2014 Vu 10 420 fois 0
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Les nullités de la période suspecte poursuivent deux objectifs : -reconstituer le patrimoine du débiteur, - assurer l'égalité des créanciers, - établir les fraudes commises lorsque le débiteur était en état de cessation des paiements. La période suspecte désigne la période qui s'écoule entre la date de cessation des paiements et celle du jugement d'ouverture. Pour qu'il y ait une période suspecte, le tribunal doit donc avoir fixé une date de cessation des paiements antérieurement au jour du jugement d'ouverture. Qui est titulaire de l’action en nullité des actes effectués pendant la période suspecte ?

Les nullités de la période suspecte poursuivent deux objectifs : -reconstituer le patrimoine du débiteur,

Période suspecte, liquidateur judiciaire et nullité

Les nullités de la période suspecte poursuivent deux objectifs :

-reconstituer le patrimoine du débiteur,

- assurer l'égalité des créanciers,

- établir les fraudes commises lorsque le débiteur était en état de cessation des paiements.

La période suspecte désigne la période  qui s'écoule entre la date de cessation des paiements et celle du jugement d'ouverture. Pour qu'il y ait une période suspecte, le tribunal doit donc avoir fixé une date de cessation des paiements antérieurement au jour du jugement d'ouverture.

Qui est titulaire de l’action en nullité des actes effectués  pendant la période suspecte ?

  • La qualité du liquidateur judiciaire pour agir en nullité d’un acte conclu pendant la période suspecte

Suite à un arrêt de la Cour de Cassation  en date du 1er Avril 2014, le liquidateur judiciaire, même non cité à l'article L. 632-4 du Code de commerce, peut agir en nullité d'un apport immobilier en société consenti par des époux communs en biens au cours la période suspecte de la procédure de liquidation du mari (Cass. com., 1er avr. 2014, n° 13-14.086, F-P+B, Alpaydin, épse Yilmaz c/ Claus : JurisData n° 2014-006540 ; BRDA 2014, n° 8, p. 5 ; Dictionnaire permanent Difficultés entreprises, Bull. n° 358, avr. 2014, p. 1, note J.-P Rémery ; L'essentiel Droit des entreprises en difficulté, n° 5, mai 2014, comm. 72, obs. E. Mouial-Bassilana).

En effet, l’article L. 632-4 du Code de Commercer dispose que « L'action en nullité est exercée par l'administrateur, le mandataire judiciaire, le commissaire à l'exécution du plan ou le ministère public. Elle a pour effet de reconstituer l'actif du débiteur. »

Dès lors, le liquidateur judiciaire ne fait pas parti de cette liste imposée par le législateur, néanmoins la jurisprudence a décidé de l’y inclure.

Le liquidateur judiciaire est nommé par le juge dans la cadre d’une liquidation judiciaire afin de rembourser les créanciers.

Avant la réforme de 2008, le liquidateur judiciaire faisait partie de la liste de l'article L. 632-4 du Code de commerce  habilitant certaines à agir en annulation des actes conclus par le débiteur pendant la période suspecte.

Suivant l'ordonnance du 18 décembre 2008, le liquidateur judiciaire a disparu de cette liste entrainant l'impossibilité d'action du liquidateur dans la mesure où l’action en nullité est réservée à personnes

Néanmoins, l'article L. 641-4 alinéas 1ers dispos que le liquidateur « peut introduire ou poursuivre les actions qui relèvent de la compétence du mandataire judiciaire ».

C’est ainsi que la Cour de Cassation a adopté cette solution en « réautorisant » le liquidateur judiciaire à agir en nullité d’un acte pris pendant la période suspecte.

  • Conditions de nullité d’apports de biens immobiliers communs aux époux

L'article L. 632-2 énonce les causes de nullité facultative et en font partis les actes à titre onéreux accomplis pendant la période suspecte dans la mesure où « ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements ».

  • Caractère onéreux

Parfois, le caractère onéreux peut être contesté mais dans ce cas, l'article L. 632-1 annule les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière conclus pendant la même période.

En outre, même si la contrepartie en titres sociaux est très faible, l'apport relève de la catégorie des contrats commutatifs déséquilibrés sanctionnée par une nullité de droit (Cass. com., 3 mai 2011, n° 10-17.011, F-P+B, Da Mota c/ Guigon : JurisData n° 2011-007706 ; Dr. sociétés 2011, comm. 179 ; Leden n° 6, juin 2011, comm. n° 093, obs. P. Rubellin ; BRDA 2011/10, n° 8, p. 3 ; Gaz. Pal. n° 189 à 190, 8 et 9 juill. 2011, p. 31, note Ph. Roussel Galle ; D. 2011, p. 1343, note A. Lienhard ; JCP E 2011, 1598, note J.-P. Legros).

  • Connaissance de la cessation de paiement

Cette connaissance s’apprécie au moment de la signature des statuts.

Dès lors, le juge doit apprécier les faits.

Cette connaissance est appréciée de façon personnelle et effective, au cas par cas et sans présomption (Cass. com., 19 nov. 2013, n° 12-25.925, F-P+B, Roussel c/ Bonvin : JurisData n° 2013-026145 ; Dr. sociétés 2014, comm. 107 ; JCP E 2014, 1003).

Certaines situations favorisent la connaissance de la cessation de paiement :

  • le fondateur d'une société en formation qui agit en son nom afin d'emprunter les sommes nécessaires à l'acquisition d'un fonds de commerce est considéré comme un emprunteur averti en sa qualité d'ancien cadre au sein d'une société exerçant la même activité. L'intéressé, membre fondateur et associé égalitaire, était en mesure de disposer de tous les renseignements utiles pour apprécier l'opportunité de recourir au crédit litigieux (Cass. com., 18 mars 2014, n° 12-28.784, F-D, Magnien c/ BNP Parisbas : RJDA 2014, n° 559, p. 512).
  • La société en formation est représentée par les associés qui sont en même temps les apporteurs et ont donc une « double qualité d'auteur et de destinataire de l'offre : auteur en tant que fondateur, destinataire en tant que souscripteur » (M. Buchberger, Le contrat d'apport. Essai sur la relation entre la société et son associé, Préface M. Germain : Editions Panthéon-Assas, 2011, spéc. n° 16, p. 42 et note 30).

Par conséquent, l'explication la plus simple repose sur la volonté de la société exprimée par anticipation (En ce sens également, V. J.-F. Hamelin, Le contrat-alliance, Préf. de N. Molfessis : Economica 2012, n° 264).

Ainsi, la double qualité apporteur/souscripteur et fondateur/destinataire a pour conséquence que la connaissance de l'état de cessation des paiements des deux fondateurs implique celle de la société en formation.

Néanmoins, si la société compte d'autres membres, il faudrait démontrer leur connaissance aussi.

Il convient de rappeler l'action en nullité d'un acte accompli en période suspecte n'est soumise à aucun délai de rigueur.

Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.


Vous pouvez me poser vos questions sur conseiller juridique.net : http://www.conseil-juridique.net/joan-dray/avocat-1647.htm


Joan DRAY

Avocat à la Cour

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