La Cour de Cassation, dans un arrêt rendu le 29 octobre 2014, a estimé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse dès lors qu' aucune preuve du téléchargement de sites n'a pu être apportée.
Dans cette affaire, l'employeur reprochait à son salarié d'avoir téléchargé pendant ses heures de travail , plusieurs sites , notamment des sites de rencontre , de sport..et avait donc décidé de le licencier pour motif personnel.
La salarié a contesté son licenciement.
En l'espèce, l'employeur a été condamné par la Cour d'Appel pour licenciement vexatoire et devait verser une somme à titre de dommages-intérêts au salarié.
La Cour d'Appel avait relevé d'une part que le salarié avait été contraint de quitter brutalement son emploi pour des faits qualifiés par l'employeur d'illégaux et répétitifs, alors que la preuve n'avait pas été apportée, et d'autre part que l'employeur avait en raison des circonstances vexatoires ayant accompagné le licenciement commis une faute ce qui causait au salarié un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi.
Ainsi la Cour de Cassation a considéré que la Cour d'Appel a justifié sa décision (Cass. soc., 29 oct. 2014).
         I. Le téléchargement: non constitutif d'une faute
La jurisprudence considère désormais que la faute grave est celle "qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise" (Cass. soc., 27 sept. 2007).
La faute grave est une faute disciplinaire résultant d'un manquement aux obligations contractuelles par le salarié (Cass. ch. mixte, 18 mai 2007).
La vie personnelle est un élément de limitation du pouvoir disciplinaire de l'employeur.
Ainsi un fait relevant de la vie personnelle du salarié ne peut donner lieu à une sanction discilpinaire (Cass. soc., 16 déc. 1997).
La notion de vie personnelle est protégée au titre de la vie privée selon l'article 9 du Code civil ( Cons. const., déc. 23 juill. 1999) et inclut également la vie publique, politique, militante ou associative.
Le salarié bénéficie d'une immunité disciplinaire qui interdit à l'employeur de le sanctionner pour un fait tiré de sa vie personnelle.
La vie personnelle est régulièrement invoquée devant les juridictions. Les juges doivent alors déterminer le domaine de l'immunité du salarié.
Lorsque le fait est un manquement aux obligations du contrat de travail ou qu'il se rattache à la vie professionnelle du salarié l'immunité cesse.
Si le fait est commis en utilisant les moyens de l'entreprise alors ceci constituera un indice du caractère professionnel de ce fait (Cass. soc., 24 juin 1998; Cass. soc., 29 janv. 2008).
Le lieu de travail peut expliquer le rattachement d'un fait à la vie professionnelle.
 "Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché" ( article L. 1121-1 et suivants du Code du travail).
 Cette préoccupation du législateur de protéger les libertés du salarié se retrouve particulièrement pour ce qui concerne le règlement intérieur de l'entreprise qui ne peut contenir "des dispositions apportant aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché" ( article L. 1321-3, 2° du Code du travail).
La production d'un relevé de connexion réalisé sur une connexion IP et la consultation d'un site permettant des téléchargements illicites pendant 2 min 30, d'un site de jeux, d'un site de sport, d'un site de rencontres et de Facebook ne caractèrise pas l'action même du téléchargement (Cass. soc., 29 oct 2014).
Ainsi, la Cour de Cassation a considéré que faute de preuve d'un manquement de la part du salarié, celui-ci ne peut être licencié pour ce motif.
 Par principe, le salarié qui exerce une liberté fondamentale ne commet pas une faute disciplinaire (Cass. soc., 28 avr. 1988).
Toutefois l'employeur peut considérer comme une faute disciplinaire un acte relevant d'une liberté du salarié qui contrevient au règlement intérieur dans la mesure où la liberté en question a fait l'objet d'une restriction justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.
Le fait fautif ne suppose ni un comportement volontaire (Cass. soc., 5 mars 1987), ni un acte indélicat (Cass. soc., 29 nov. 1984), ni une intention maligne (Cass. soc., 24 oct. 1989).
Par ailleurs la légèreté ou la mauvaise foi du salarié doivent être prises en compte pour apprécier le caractère fautif ou non de son acte (Cass. soc., 5 déc. 1996).
        II. Absence de preuve: licenciement sans cause réelle et sérieuse
La Cour de Cassation a estimé que l'absence de preuve alléguant le manquement du salarié ne permet pas de considérer le licenciement comme justifié (Cass. soc., 29 oct 2014).
       A. La cause réelle et sérieuse du licenciement
 La cause réelle et sérieuse du licenciement doit être à la fois une cause existante et exacte.
Le juge apprécie donc si le motif invoqué par l'employeur existe, c'est-à -dire que le comportement doit pouvoir être établi par l'employeur.
Dans l'arrêt du 29 octobre 2014, la chambre sociale a considéré que l'employeur n'avait pas établi l'action de téléchargement et qu'ainsi le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.
 Le fait doit être personnellement imputable au salarié (Cass. soc., 12 janv. 1993; Cass. soc., 21 mars 2000).
        B. La preuve
La preuve du caractère réel et sérieux du motif du licenciement n'incombe pas particulièrement à l'une ou l'autre des parties (Cass. soc., 23 mars 1977; Cass. soc., 11 déc. 1997).
Néanmoins l'employeur doit rapporter la preuve de la faute grave ou lourde qu'il reproche au salarié (Cass. soc., 5 mars 1981; Cass. soc., 12 mai 1993).
 En cas de doute il profite au salarié, en matière de faute grave (Cass. soc., 6 oct. 1999).
En matière prud'homale, la preuve est libre.
L'employeur a le droit de contrôler et de surveiller l'activité de son personnel durant le temps de travail.
Mais il ne peut mettre en oeuvre un dispositif de contrôle qui n'a pas fait l'objet, préalablement à son introduction, d'une information et d'une consultation du comité d'entreprise.
              Le licenciement brusque: objet d'indemnisation
Le licenciement brusque peut faire l'objet d'une indemnisation pour le salarié lorsque les circonstances s'avèrent vexatoires (Cass. soc., 27 janv 2000; Cass. soc., 29 oct 2014).
Le licenciement brusque peut causer un préjudice au salarié distinct de celui ayant perdu son emploi (Cass. soc., 29 oct 2014).
Le salarié doit établir que le licenciement a été établi dans des circonstances vexatoires ou humiliantes et que ce préjudice causé est distinct de la perte de son emploi (Cass. soc., 30 mai 1995 ; Cass. soc., 16 mars 1994).
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Joan Dray
Avocat à la Cour
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