La Cour d'Appel de Paris le 10 avril 2015 a rappelé qu'en l'absence de contrat-cadre ou de convention isolée, il ne pouvait être établi des relations commerciales.
Il s'agissait en l'espèce de négociations entre deux entreprises qui avaient été rompues à l'initiative de l'une d'elles, aucun contrat n'avait été conclu.
L'une des parties s'est plainte de cette rupture.
La Cour d'Appel de Paris a rejeté cette prétention constatant qu'il ressortait du dossier « que les parties étaient convenues d'encadrer leurs relations par la conclusion d'un contrat-cadre » puis de différents contrats d'application".
Ainsi, la partie demanderesse « n'ignorait pas que la poursuite des relations devait nécessairement s'accompagner de la signature d'un contrat, ce qui lui a été rappelé à plusieurs reprises, de sorte qu'elle n'a jamais pu croire à la pérennité de leurs relations.
Lorsqu'aucune offre n'est émise, les parties peuvent rompre librement les négociations.
I. La rupture des pourparlers
En l'absence de contrat, la responsabilité précontractuelle peut être engagée.
Pour cela il faut que des assurances suffisantes quant à la formation du contrat aient été données (CE, 2 mai 1990).
L'absence de tout contrat dès l'origine prive les parties de fonder leurs demandes sur la responsabilité extra-contractuelle présentées pour la première fois en appel (CAA Marseille, 21 juin 2007).
Le juge, saisi d'un litige engagé sur le terrain de la responsabilité contractuelle, et conduit à constater la nullité du contrat, admet les moyens tirés de l'enrichissement sans cause ou de la faute quasi délictuelle du maître d'ouvrage, par exemple (CE, 20 oct. 2000 ; CAA Nancy, 26 janv. 2006).
La faute antérieure de l'offre
Tant qu'aucune offre n'a été émise, les partenaires en sont encore au stade des pourparlers. En principe, chacun est libre de ne pas contracter.
Néanmoins la jurisprudence admet que, dans certaines circonstances, la rupture des pourparlers peut être fautive (Cass. com., 20 mars 1972).
La faute délictuelle exigée pour engager la responsabilité ne devrait pas être une faute intentionnelle.
Pourtant, dans le but de ne pas trop entraver la liberté des négociations, la jurisprudence se réfère souvent à la notion d'abus de droit.
Ainsi la rupture fautive serait celle qui constitue un abus du droit de rompre les négociations (Cass. com., 20 mars 1972 – Cass. 3e civ., 16 oct. 1973).
Le critère de l'abus ne signifie pas l'intention de nuire (Cass. 3e civ., 3 oct. 1972 – Cass. com., 11 juill. 2000).
La mauvaise foi suffit à caractériser la faute dans la rupture abusive des pourparlers (Cass. 1re civ., 12 avr. 1976 – Cass. com., 22 avr. 1997– Cass. com., 26 nov. 2003– CA Paris, 10 mars 2000– CA Agen, 21 août 2002).
Il est souvent relevé l'absence de motif légitime de la rupture (Cass. com, 7 janv. 1997. – Cass. com, 7 avr. 1998. – Cass. com, 11 juill. 2000).
La mauvaise foi dans la rupture des pourparlers peut prendre plusieurs formes.
Est d'abord en faute celui qui prend l'initiative de la négociation sans intention sérieuse de contracter. Tel est notamment le cas s'il n'est pas titulaire du droit objet du contrat projeté, ni certain de l'acquérir (Cass. 1re civ., 12 avr. 1976).
De même est en faute celui qui fait naître l'espoir d'une convention et entretient la négociation sans volonté réelle de contracter (Cass. com., 12 févr. 2002– CA Rennes, 8 juill. 1929– CA Paris, 26 juin 1990 – CA Rennes, 29 avr. 1992).
Le fait d'engager des pourparlers avancés pour finalement traiter avec un tiers peut aussi constituer une faute (Cass. 1re civ., 14 juin 2000– Cass. 3e civ., 28 juin 2006) ou de mener des négociations parallèles sans prévenir son partenaire et dans des conditions déloyales (Cass. 2e civ., 4 juin 1997).
II. Les circonstances de la rupture
Les circonstances qui entourent la rupture des pourparlers peuvent également être révélatrices de la mauvaise foi de l'auteur, ainsi la brutalité de la rupture, les propos injurieux, la publicité faite autour de la rupture, seront constitutives de faute.
Le moment de la rupture présente une certaine importance : la faute sera d'autant plus évidente que les pourparlers seront avancés (Cass. com., 20 mars 1971 – Cass. com., 7 janv. 1997 et 22 avr. 1997– Cass. 1re civ., 6 janv. 1998 – Cass. com., 7 avr. 1998– Cass. com., 18 juin 2002– Cass. com., 15 oct. 2002 – CA Rennes, 29 avr. 1992 – CA Paris, 18 janv. 1996).
La confiance du partenaire s'accroît légitimement en effet à mesure que progressent les négociations.
Cette confiance légitime née des relations précontractuelles justifie une plus grande sévérité à l'encontre du professionnel lorsqu'il traite avec un profane.
S'il rompt brutalement, hâtivement, les pourparlers, on lui reprochera plus facilement d'avoir trompé son partenaire qui avait placé en lui toute sa confiance.
Si, au contraire, le professionnel est la victime de la rupture, il lui sera reproché d'avoir trop aisément fait confiance.
Par ailleurs le fait, pour un tiers de conclure un contrat en connaissance des pourparlers engagés avec autrui par le cocontractant, n'est pas fautif, sauf manoeuvres frauduleuses ou intention de nuire (Cass. com., 26 nov. 2003).
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Joan Dray
Avocat à la Cour
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