La réticence dolosive prend sa source dans l’article 1116 du Code Civil qui dispose que
« le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ».
Si, dans un premier temps, la jurisprudence admettait uniquement des manœuvres frauduleuses et les affirmations mensongères comme pouvant être constitutives de dol, il est désormais de jurisprudence constante que le silence, à savoir la réticence dolosive est également admise comme cause de nullité de l’engagement.
Cependant, puisque le dol constitue un vice de consentement, il est essentiel pour le demandeur d’apporter la preuve du caractère déterminant de la réticence ainsi que l’élément intentionnel, et non seulement celle du silence du vendeur.
La Chambre Commerciale vient de se prononcer sur l’importance de cette preuve par un arrêt an date du 7 juin 2011 (Cass. com. 7 juin 2011 n° 10-13.622 (n° 588 FS-PB), Sté Pharmacie Chapelle c/ d'Alguerre).
En l’espèce, le vendeur d’un fonds de commerce n’avait pas informé l’acquéreur sur les qualifications d’un salarié engagé dans l’activité.
En vertu de l’article L.1224-1 du Code du Travail, tous les contrats de travail en cours à la date du changement d’employeur sont transférés de plein droit au nouvel employeur, sans que ce dernier puisse s’y opposer.
Il ressort que suivant la vente, l’acquéreur se trouve déçu par ces qualifications mais ne peut pas licencier le salarié car les dispositions de l’article L.1224-1 sont s’ordre public et qu’aucune faute ne pouvait être retenue.
En conséquence, l’acquéreur soutient que son consentement a été vicié du fait du silence du vendeur sur ces qualifications du salarié et mais réclame uniquement des dommages et intérêts (et non la résolution).
Cependant, les juges de fond et la Cour de Cassation le déboutent de ses demandes, retenant que « n’étaient établis ni l’intention du vendeur de tromper l’acheteur ni le caractère déterminant de l’information litigieuse sur les conditions de la vente ».
La preuve de l’intention de tromper, apporté par tout moyen, n’est pas discutable.
Cependant, celle du caractère déterminant par le silence doit permettre d’établir que l’acquéreur n’aurait pas acheté ou bien l’aurait fait à un moindre prix.
Ce caractère déterminant doit faire état d’une certaine gravité suffisante de la réticence, soit au regard des informations devant être fournies de manière générale par le vendeur, soit au regard des spécificités convenues par les parties.
Il convient de noter sur ce point une divergence de jurisprudence d’avec la Première Chambre Civile, qui estime que l’acquéreur n’a pas à apporter cette preuve s’il ne sollicite que des dommages et intérêts (Cass. 1e civ. 28 mai 2008 n° 07-13.487) car il s’agit de réparer la violation précontractuelle de l’obligation d’information.
Il convient de noter que la Chambre Commerciale précise que la demande était fondée « exclusivement » sur le dol. L’acquéreur pouvait effectivement agir sur le fondement de l’article 1382 du Code Civil pour obtenir réparation de la violation de l’obligation d’information précontractuelle.
Cependant, cette demande devait être introduite en première instance.
Enfin, on ne peut que souligner l’importance pour l’acquéreur de s’informer lui-même, puisque l’acquéreur aura des meilleures chances dans ce cas d’obtenir gain de cause, que ce soit sur le terrain de la responsabilité de droit commun ou sur celui du dol.
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