Selon l’article L651-2 du code de commerce "Lorsque la résolution d'un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que les dettes de la personne morale seront supportées, en tout ou partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion"
Pour rappel, l’action en insuffisance d’actif n’a pour but de combler l’actif de la société mais bien de sanctionner les dirigeants en leur faisant supporter tout ou partie du passif non couvert par l'actif.
L’action en insuffisance d’actif en tant qu’elle est précisément une action en justice, doit être également appréhendée du point de vue procédural.
Afin de préserver les droits du dirigeant soumis à une procédure pouvant entrainer une sanction patrimoniale à son encontre, le législateur a institué un certain nombre de garanties procédurales visant à assurer le droit à un procès équitable.
Nous verrons que l’initiative d’une telle procédure est réservée à certaines personnes et qu’il existe des garanties au bénéfice du dirigeant pendant le déroulement de la procédure
1- Qui peut exercer une action en insuffisance d’actif :
Depuis la loi du 26 juillet 2005 le législateur a retiré la compétence de cette action à certaines personnes tandis qu’il a maintenu cette possibilité à ceux qui en avaient déjà l’usage.
Ainsi, le tribunal de commerce ne peut plus désormais se saisir d’office
Il existe trois catégories de personnes titulaires de l'action :
-le mandataire judiciaire,
- le liquidateur
- le Ministère public
Bien entendu lors de la délivrance de l’assignation, la mention de la qualité devra être précisée à défaut d’encourir une nullité.
Il convient de rappeler que le tribunal compétent pour connaitre de cette action est est celui qui a prononcé la sauvegarde, le redressement ou la liquidation judiciaires de la personne morale.
Quant aux créanciers, il convient de rappeler, selon une jurisprudence constante, qu’ils ne sont pas recevables à exercer une telle action.
En revanche, les créanciers contrôleurs se sont vus octroyés par la loi du 26 juillet 2005 la possibilité d’une saisine sous certaine conditions.
Lorsque plusieurs dirigeants sont poursuivis, il a été admis que le dirigeant poursuivi ne pouvait pas appeler en garantie un autre dirigeant et que son action était irrecevable
2- Le juge commissaire peut il participer au délibéré ?
La loi du 26 juillet 2005 a apporté une importante modification dans la détermination du prononcé du délibéré puisqu’elle écarte désormais la présence du juge commissaire dans la formation de jugement.
L'article L. 651-3, alinéa 3, du Code de commerce énonce que “le juge-commissaire ne peut ni siéger dans la formation de jugement, ni participer au délibéré”
3- Le rapport communiqué au Procureur de la République doit il être transmis au dirigeant poursuivi ?
La Chambre commerciale de la Cour de Cassation, dans un arrêt du 10 janvier 2012, a jugé que toutes les pièces transmises au juge en vue d’influencer sa décision sa décision devaient être nécessairement communiquées au dirigeant poursuivi(Cass. com., 10 janvier 2012, n° 10-24.426, P+B).
En l’espèce, elle a jugé en se fondant sur l’article 6§1 CESDH, que la faculté de consultation du dossier au greffe, prévue par les dispositions de l'article 164 du décret du 27 décembre 1985, dans sa rédaction issue du décret du 21 octobre 1994, ne dispensait pas le greffe de communiquer à la partie qui le demande le rapport communiqué au ministère public.
Dans cette affaire, le liquidateur de la société avait assigné son dirigeant en comblement de l'insuffisance d'actif de la société.
Le Tribunal avait alors désigné un juge chargé d'établir un rapport qui a été communiqué au procureur de la République et au tribunal mais pas à l'intéressé malgré la demande de son avocat.
De ce fait, le dirigeant avait soulevé une irrégularité de procédure qui n’a pas reçu un accueil favorable du Tribunal et de la Cour d’Appel mais qui a, en revanche, été admis par la Cour de Cassation.
Il faut donc en déduire que la communication de pièces devra être faite spontanément au dirigeant (et/ ou son conseil) au visa de de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales afin d’être traité sur un pied d’égalité .
La consultation du dossier au greffe ne saurait suppléer la communication de pièces et de documents qui doit être transmise au dirigeant poursuivi pour sa défense.
4- La relaxe au pénal d’un dirigeant exclue t elle toute action en insuffisance d’actif ?
La Chambre commerciale dans un arrêt du 1er février 2011 a précisé que la relaxe du délit de banqueroute n’ayant pas d’autorité de la chose jugée, sur les fautes invoquées par le liquidateur, puisqu'il ne s'agit ni de la même juridiction, ni des mêmes parties ni de la même cause, le contentieux pénal ayant pour fondement le délit de banqueroute, et l'action en comblement de passif les fautes de gestion même légères d'imprudence
Il a également été jugé en ce sens que “l'issue des poursuites pénales engagées contre un gérant pour banqueroute et abus de biens sociaux est sans incidence sur sa responsabilité [...] puisque, même en cas de relaxe, il peut être condamné au paiement de tout ou partie du passif social”, sur le fondement de l'ancien article 99 (Cass. com., 9 déc. 1980 )
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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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