L'action du syndicat de copropriétaires contre le vendeur de lots

Publié le 22/07/2015 Vu 8 869 fois 0
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La Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt, datant du 24 juin 2015, dans lequel elle a apprécié l'action en réparation des désordres affectant les parties communes de l'immeuble du syndicat de copropriétaires contre le vendeur de lots. En l'espèce, il s'agissait d'une société ayant acquis un immeuble, qu'elle a rénové, divisé puis vendu par lots de copropriétés. Les actes de vente comportaient en annexe un rapport d'une autre société relatif à l'état de la couverture de l'immeuble. Après expertise judiciaire, le syndicat de la copropriété a assigné la société, son assureur ainsi que l'autre société, ayant établi le rapport, afin qu'ils soient déclarés solidairement responsables des désordres survenus en toiture.

La Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt, datant du 24 juin 2015, dans lequel el

L'action du syndicat de copropriétaires contre le vendeur de lots

La Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt, datant du 24 juin 2015, dans lequel elle a apprécié l'action en réparation des désordres affectant les parties communes de l'immeuble du syndicat de copropriétaires contre le vendeur de lots.

En l'espèce, il s'agissait d'une société ayant acquis un immeuble, qu'elle a rénové, divisé puis vendu par lots de copropriétés.

Les actes de vente comportaient en annexe un rapport d'une autre société relatif à l'état de la couverture de l'immeuble.

Après expertise judiciaire, le syndicat de la copropriété a assigné la société, son assureur ainsi que l'autre société, ayant établi le rapport, afin qu'ils soient déclarés solidairement responsables des désordres survenus en toiture.

Les défendeurs ont soulevé que l'irrecevabilité de ces demandes.

La Cour d'Appel a retenu l'irrecevabilité des demandes formulées par le syndicat de copropriétaires.

Ce syndicat a donc formé un pourvoi, lequel a été accueilli par la Cour de Cassation.

La Cour d'Appel avait retenu que le syndicat n'était pas titulaire des actions rédhibitoire et estimatoire, que celles-ci étaient réservées aux acquéreurs, et que l'action en garantie des vices cachés est une action qui a son origine dans les contrats de vente auxquels il n'est pas partie et celle-ci vise à protéger les acquéreurs, étant les seuls titulaires.

La Cour de Cassation, en se référant aux articles 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965 et de l'ensemble des articles 1641 et 1645 du code civil, a considéré que " l'action en réparation du préjudice subi d'un vice caché n'est pas subordonné à l'exercice d'une action rédhibitoire ou estimatoire et peut être engagée de manière autonome et que le syndicat des copropriétaires ayant qualité pour agir en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble a qualité pour exercer, contre le vendeur des lots, l'action en réparation des désordres affectant les parties communes de l'immeuble vendu".

Par cette décision, il est affirmé que le syndicat de copropriétaires a qualité pour agir en action en garantie des vices cachés dirigée contre la société ayant procédé à la mise en copropriété de l'immeuble et à la vente par lots.

          I. La qualité d'agir du syndicat de copropriétaires

En vertu de l'article 15 de la loi de 1965, le syndicat de copropriétaires a qualité pour agir en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble (Civ. 3e, 21 nov. 1969 - Civ. 3e, 18 mai 1971 - Civ. 3e, 29 mai 1970).

Le syndicat a qualité pour agir à l'encontre de tout responsable de dommages causés aux parties communes de l'immeuble et même aux parties privatives, sur le fondement soit des articles 1382 à 1384 du Code civil soit des articles 1142 et 1143 du même code lorsque l'auteur du préjudice engage sa responsabilité contractuelle.

Le syndicat peut agir contre le constructeur, notamment:

– pour qu'il soit remédié aux insuffisances de pente du revêtement d'une terrasse, partie commune, provoquant la stagnation des eaux pluviales et la dislocation des parquets, parties privatives (CA Paris, 9 oct. 1979– CA 9 févr. 1989) ;

– pour demander tant la réparation de l'étanchéité de la terrasse, partie commune, que la réfection de l'appartement qu'elle recouvre, partie privative (CA Paris, 19e ch., 12 déc. 1994) ;

– pour demander réparation des désordres affectant les parties communes (CA Paris, 24 oct. 2002– CA Versailles, 13 déc. 2010) ;

– pour remettre en état de fonctionnement l'installation de chauffage (Cass. 3e civ., 3 juill. 1991) ;

– pour mettre en cause un bureau d'études dont les fautes de conception et d'exécution sont à l'origine des désordres affectant les parties communes (Cass. 3e civ., 26 mai 1992 - Cass. 3e civ., 4 nov. 1993) ;

– pour obtenir la réfection à neuf de l'étanchéité d'une terrasse (CA Paris, 23e ch., 12 mars 1997) ;

– pour la réfection du bandeau formant acrotère installé au périmètre de la toiture des bâtiments dépendant d'un centre commercial (CA Paris, 14 févr. 1996);

– pour obtenir le paiement des sommes avancées afin de permettre la réhabilitation de l'immeuble (Cass. 3e civ., 6 nov. 2007).

Le syndicat est recevable en ses demandes tendant à faire réaliser par le promoteur des emplacements de stationnement prévus par le permis de construire et destinés à constituer des parties privatives, de manière à permettre ensuite la délivrance du certificat de conformité dont la privation serait de nature à causer un préjudice collectif car ressenti de la même manière par tous les copropriétaires (CA Paris, 6 janv. 1995).

Il peut également mettre en cause la responsabilité de l'entrepreneur et l'architecte chargés de la construction de l'immeuble (CA Poitiers, 27 sept. 2000) de même que la garantie de l'assureur dommages-ouvrage en cas d'infiltrations en sous-sol qui rendent l'immeuble impropre à sa destination (CA Aix-en-Provence, 2 mai 2002).

Il peut également agir en vue d'obtenir la délivrance du certificat de conformité dont l'absence est de nature à causer un préjudice collectif ressenti d'une manière identique par tous les copropriétaires (CA Paris, 18 nov. 2004).

 L'action en réparation de dommages affectant les parties communes peut être exercée par le syndicat ou par des copropriétaires agissant à titre individuel.

Cette action qui, a pour cause un dommage atteignant l'ensemble des parties communes, interrompt les délais de garantie légale même lorsqu'elle est exercée initialement par des copropriétaires agissant individuellement ou par le syndicat (Cass. 3e civ., 24 févr. 1988– Cass. 3e civ., 17 avr. 1991).

        II. L'action du syndicat de copropriétaires contre le vendeur

Le syndicat a qualité pour agir en garantie des vices cachés contre le vendeur de l'immeuble, même lorsque celui-ci a fait l'objet de ventes séparées au profit des copropriétaires, dès lors que les désordres constatés atteignent les parties communes seules ou l'immeuble dans son ensemble comme il a été dit précédemment (Cass. 3e civ., 20 juin 1978– Cass. 3e civ., 22 avr. 1980– Cass. 3e civ., 14 févr. 1990– CA Nancy, 8 janv. 1991– CA Paris, 9 oct. 1992).

Le syndicat peut agir en justice aux fins d'obtenir des dommages-intérêts lorsque les vices de construction de l'immeuble ne sont pas réparables en nature (Cass. 3e civ., 29 mai 1970 – Cass. 3e civ., 14 févr. 1990).

S'il s'agit de la vente d'un immeuble à construire (vente en l'état futur d'achèvement), le vendeur est tenu des mêmes obligations que celles incombant aux locateurs d'ouvrage (article 1646-1 du Code civil).

Le syndicat peut agir à l'égard du promoteur-vendeur qui a modifié son programme de construction (CA Aix-en-Provence, 30 nov. 2000– Cass. 3e civ., 8 sept. 2010)

Le syndicat est en droit d'invoquer le manquement du promoteur à son obligation de délivrance conforme à ses engagements tels que définis dans des documents ayant valeur contractuelle en dehors du règlement de copropriété (Cass. 3e civ., 3 avr. 2013).

 Le syndicat est fondé à réclamer du promoteur-vendeur le respect des obligations résultant du permis de construire qui prévoyait l'existence de garages ou emplacements de stationnement dans la mesure où ils doivent constituer des parties communes (Cass. 3e civ., 16 mars 1994).

 La plaquette publicitaire du vendeur devant être considérée comme ayant valeur contractuelle, le syndicat est recevable à agir en réparation des manquements du vendeur à ses engagements, les copropriétaires eux-mêmes étant fondés à agir conjointement, pour assurer la conformité de leurs lots (CA Paris, 22 nov. 2000).

Sur l'extinction de la créance du syndicat contre une SCI mise en liquidation judiciaire, pour non-finition et malfaçons, du fait de l'absence de déclaration au représentant des créanciers, faisant disparaître l'obligation des associés qui ne sont tenus que du passif social, voir l'arrêt de la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 22 mars 1995).

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Joan Dray

Avocat à la Cour

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