Agents immobiliers et mandat apparent
On sait qu’une personne peut se trouver engagée par un mandataire apparent, c’est-à-dire quelqu’un qui n’avait pas reçu d’elle un pouvoir de représentation, mais dont le comportement a pu de façon légitime induire le tiers en erreur sur ce point. Dans le domaine des transactions immobilières, la théorie de l’apparence pouvait trouver à s’appliquer généralement non pas en cas d’absence de mandat, mais en cas d’absence de clause autorisant expressément l’agent immobilier à engager son mandant, le vendeur. Par un arrêt rendu par la Première chambre civile de la Cour de cassation en date du 5 juin 2008 (n° 04-16368), la théorie du mandat apparent se voit exclure de la gestion immobilière. |
En l’espèce, des locataires d’une maison à usage d’habitation se font délivrer un congé avec une offre de vente conséquente, par un agent immobilier. Les époux acceptent cette offre par lettre recommandée, mais le même jour, l’agence immobilière les informe qu’elle retire son offre. Ceux-ci assignent l’agent immobilier ainsi que le bailleur de l’appartement afin de faire constater que la vente était parfaite. La cour d’appel de Toulouse fait droit à leur demande et condamne l’agent immobilier e à leur verser des dommages et intérêts, aux motifs que le bailleur et la société immobilière étaient engagés par la vente. Ainsi la cour justifie sa décision au motif que « l'existence d'un mandat apparent par lequel les locataires pouvaient légitimement croire que la société Ferret immobilier avait le pouvoir de gérer le bien et de délivrer un congé pour vente au nom du bailleur. » Autrement dit le mandant était engagé par cet acte de vente en vertu d'un mandat apparent. Elle retient le caractère parfait de la vente, par l’application de la théorie du mandat apparent, qui permet de se fonder sur l’apparence d’une situation pour lui faire produire des effets juridiques qui ne lui sont pas normalement attachés. Cette théorie permet de protéger les tiers de bonne foi victime d’un engagement qu’il pensait légitime. Pour pouvoir prétendre à l’application de la théorie du mandat apparent, le tiers, ici les époux, doit remplir plusieurs conditions. • Premièrement, il faut une compétence apparente de la représentation du mandataire ; Le tiers doit donc avoir la croyance légitime que le mandataire à le pouvoir qu’il prétend détenir pour pouvoir invoquer la théorie du mandat apparent. (Cass, Ass plén, 13 décembre 1962). Cependant la Cour de cassation va casser l’arrêt estimant que le propriétaire de l'immeuble ne pouvant être engagé par un acte pour l'accomplissement duquel il n'a pas expressément conféré pouvoir à celui qui agissait en son nom. Son raisonnement consiste notamment à exclure la théorie du mandat apparent du domaine de la gestion immobilière. En effet elle justifie sa décision aux motifs que « « les conventions conclues avec les personnes physiques ou morales qui, d'une manière habituelle, se livrent ou prêtent leur concours aux opérations portant sur les biens d'autrui et relatives, notamment, à la gestion immobilière, doivent être rédigées par écrit. » (articles 1er et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, qui sont d'ordre public). Et précise que « le titulaire de la carte professionnelle « gestion immobilière » doit détenir, à moins qu'il représente la personne morale qu'il administre, un mandat écrit qui précise l'étendue de ses pouvoirs et qui l'autorise expressément à recevoir des biens, sommes ou valeurs, à l'occasion de la gestion dont il est chargé. Il en résulte que la preuve de l'existence et de l'étendue du mandat de gestion immobilière délivré à un professionnel ne peut être rapportée que par écrit. Le mandat apparent ne peut tenir en échec ces règles. » (article 64 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972) Désormais les mandataires immobiliers doivent impérativement détenir un mandat spécial, qui encadre expressément leurs prérogatives ainsi que le cadre de leur mission, délivré par leur mandant. (ex.Cass, 1er civ, 12 juillet 2006) Pour conclure la protection des droits des tiers trompés par des professionnels qui agissent sans être mandatés à cet effet, qui était le principal fondement de l’utilisation de la théorie du mandat apparent, cède désormais devant la garantie de ceux qu'ils prétendent représenter sans satisfaire aux dispositions d'ordre public (v.Cass, 1re civ, 27 janvier 1981) édictées par les articles 1 et 6 de la loi du 2 janvier 1970 et les articles 64 et 72 du décret du 20 juillet 1972. e me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux. Vous pouvez me poser vos questions sur conseiller juridique.net : http://www.conseil-juridique.net/joan-dray/avocat-1647.htm Joan DRAY Avocat à la Cour joanadray@gmail.com 76/78 rue Saint-Lazare 75009 PARIS TEL:09.54.92.33.53
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