La bonne foi et le surendettement

Publié le Modifié le 01/06/2015 Vu 12 902 fois 0
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L'article L. 330-1 du Code de la consommation définit l'état de surendettement comme “l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles ou à échoir”. L'article L. 332-6 du Code de la consommation précise que le juge ouvre la procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire après avoir vérifié la bonne foi du débiteur.

L'article L. 330-1 du Code de la consommation définit l'état de surendettement comme “l'impossibilité man

La bonne foi et le surendettement

L'article L. 330-1 du Code de la consommation définit l'état de surendettement comme “l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles ou à échoir”.

L'article L. 332-6 du Code de la consommation précise que le juge ouvre la procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire après avoir vérifié la bonne foi du débiteur.

La procédure de surendettement ne peut donc bénéficier qu'au débiteur de bonne foi. Il appartient donc à la commission de surendettement puis, sur recours, au juge d'instance, sous le contrôle de la Cour de cassation, d'apprécier si le débiteur est de bonne ou de mauvaise foi. Or, la bonne ou la mauvaise foi est une notion juridique et non pas morale, qui finalement n'est pas si facile à apprécier.

La Cour de cassation a rappelé de façon constante que la bonne foi du débiteur était toujours présumée (Cass. 1re civ., 4 avr. 1991).

Il appartient donc au créancier de soulever et de prouver la mauvaise foi invoquée par lui. Toutefois, en matière de procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire, le juge tient de l'article L. 332-6 du Code de la consommation, le pouvoir de vérifier, le cas échéant d'office, la bonne foi du débiteur (Cass. 2e civ., 14 déc. 2006).

La vérification de la bonne foi n'est pas un examen de la moralité du débiteur. Pour retenir la fin de non-recevoir, l'acte reproché doit avoir eu un rapport avec la situation de surendettement. C'est ainsi que la Cour de cassation a jugé que le comportement du débiteur qui avait présidé à son licenciement pour faute grave était sans rapport avec la situation de surendettement et ne pouvait donc pas constituer un élément de mauvaise foi au sens de l'article L. 330-1 du Code de la consommation(Cass. 1re civ., 31 mars 1992).

De nombreuses difficultés ont tourné autour de la question du sens à donner à la bonne et la mauvaise foi en matière de surendettement. La Cour de cassation n'a jamais voulu donner une définition de cette notion.

Néanmoins, a été affirmé que n'est pas de bonne foi et ne peut bénéficier de la procédure de surendettement, le débiteur qui retire de l'argent pour jouer au casino à l'issue de l'audience ayant précédé le premier plan de redressement (Cass. 2e civ., 15 mai 2014).

N'est également pas de bonne foi la débitrice qui continue à occuper un logement loué et donc à aggraver sa dette de loyer alors qu'elle a déjà conclu un autre bail pour assurer son logement (CA Caen, 24 avr. 2014).

Le simple fait de ne pas travailler et de ne pas justifier d'une recherche active d'emploi ne caractérise pas la mauvaise foi (Cass. 2e civ., 10 avr. 2014).

Dès lors qu'une personne dispose de ressources suffisantes pour assumer l'ensemble de ses charges y compris son loyer mais n'utilise pas les fonds dont elle dispose pour payer ces charges, n'est pas de bonne foi (Cass. 2e civ., 5 juin 2014).

Classiquement, l'appréciation de la bonne foi ou de la mauvaise foi du débiteur s'effectue en tenant compte du comportement actif et conscient du consommateur lors de la constitution de son endettement excessif. Il tient également à sa volonté non d'arrêter le phénomène de l'endettement, mais au contraire de l'aggraver, sachant pertinemment qu'il ne pourrait pas faire face à ses engagements

Un comportement irrationnel causé par son état de vulnérabilité n'est pas constitutif de mauvaise foi du débiteur et ne justifie pas le prononcé de la déchéance du bénéfice de la procédure de surendettement (CA Nancy, 8 déc. 2014).

Dans cet arrêt, la Cour d'appel s’était fondée sur l'absence de mauvaise foi de la débitrice et sur son état de vulnérabilité consécutif au décès de son mari.

Pour être sanctionné, il faut avoir conscience que l'acte commis causait préjudice à ses créanciers et c'est précisément l'inverse que recherchait la débitrice.

En cas de nouvelle demande d'ouverture d'une procédure de surendettement, le débiteur doit apporter la preuve de nouveaux éléments (Cass. 2e civ., 4 déc. 2014). La notion de bonne foi n'est pas figée, en ce sens que le débiteur qui s'est vu opposer une première fois sa mauvaise foi aura toujours la possibilité de formuler une nouvelle demande.

Le débiteur qui saisit une nouvelle fois la commission de surendettement des particuliers d'une nouvelle demande de traitement de sa situation n'est pas de bonne foi dès lors qu'il n'a pas respecté le plan de redressement précédemment adopté alors que rien ne justifie qu'aucun paiement même partiel n'ait été adressé aux différents créanciers depuis l'adoption du plan (Cass. 2e civ., 5 juin 2014).

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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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