Initialement, la loi du 6 juillet 1989 ne comportait aucune notion de garantie de paiement accordé au bailleur et fournie par le locataire, à l’exception du dépôt de garantie dont la vocation est d'être conservé par le bailleur jusqu'à la fin du contrat.
Le cautionnement était alors régi par les dispositions du Code civil (C. civ., art. 2288 et s. et 1740). La jurisprudence avait alors déterminé que la caution qui s'est engagée pour une durée indéterminée pouvait mettre fin au contrat de cautionnement à tout moment.
Le cautionnement a durée déterminé pouvait aussi être critiquable car selon l'article 1740 du Code civil, la caution donnée pour le bail ne s’étendait pas aux obligations résultant de la prolongation.
Par la loi du 21 juillet 1994 qui a introduit dans la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 un article spécifique, l'article 22-1, relatif au cautionnement et a complété l'article 24 (concernant la mise en œuvre de la clause de résiliation de plein droit), l’encadrement est devenu plus stricte.
En effet, désormais, si la personne qui se portait caution pour une durée indéterminée, pouvait certes résilier unilatéralement son engagement à tout moment, cette résiliation ne prenait néanmoins effet qu'au terme du bail en cours, qu'il s'agisse du bail initial ou du bail reconduit ou renouvelé.
Toutefois, le cautionnement à durée déterminée ne fait l’objet d’aucune autre règles que celles prévues par le Code civil.
Cet article traitera du domaine d’application (I-), de la règlementation du cautionnement (II-) et de l’obligation du bailleur en cas de défaillance du locataire (III-).
I – Domaine d’application
A/ L'identité du bailleur et les garanties d'assurance
En vertu de loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, qui ajoute au début de l'article 22-1, la situation est donc désormais la suivante :
- si le bailleur a souscrit une assurance garantissant les obligations locatives du locataire, il ne peut solliciter la délivrance d'aucun cautionnement ;
- si le bailleur est une société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus, et n'a pas souscrit d'assurance de loyers impayés, il peut solliciter la délivrance d'un cautionnement ;
- si le bailleur est une autre personne morale que celles ci-dessus, et n'a pas souscrit d'assurance de loyers impayés, il peut solliciter un cautionnement :
- soit il est apporté par un organisme dont la liste sera fixée par décret (Loca-Pass, FSL, etc.) ;
- soit le logement est donné en location à un étudiant ne bénéficiant pas d'une bourse de l'enseignement supérieur.
B/ L'objet du contrat
L'article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ne concerne que les contrats de cautionnement, à l'exclusion de toute autre forme de garantie fournie par le locataire.
La caution sera soit une ou plusieurs personnes physiques, soit une personne morale.
Le bailleur bénéficiaire du cautionnement devra vérifier la capacité du représentant de la personne morale à l'engager ainsi que ses pouvoirs spécifiques de se porter caution au nom de la personne morale.
Lorsque le locataire sera non ressortissant d'un Etat membre de l’UE, une caution sera exigée. Cette pratique a été considérée comme non discriminatoire (Pourvoi c/ CA Versailles, 1re ch., 15 déc. 2000. – Cass. 3e civ., 19 mars 2003 : JurisData n° 2003-018266 ; Loyers et copr. 2003, comm. 216 ; D. 2003, inf. rap. p. 1006, AJDI 2003, p. 417, obs. Y. Rouquet ; Administrer 2003, n° 358, p. 47, obs. V. Canu ; Rev. loyers 2003, p. 838, obs. J. Rémy).
Le bailleur devra vérifier lui-même la capacité de la caution à exécuter ses obligations et ne pourra accepter que des personnes suffisamment solvables qui auront justifié de cette solvabilité par des documents personnels.
C/ La nature des obligations garanties
1) Les contrats de location
L'article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 s'applique aux cautionnements destinés à garantir les obligations résultant de contrats de location conclus :
- Aux locations de locaux à usage d'habitation principale ou à usage mixte professionnel et d'habitation principale ainsi qu'aux garages, places de stationnement, jardins et autres locaux loués accessoirement au local principal par le même bailleur ;
- et en vertu de l'article 40 de la loi du 6 juillet 1989 :
- aux logements HLM ;
- aux logements dont le loyer est fixé en application du chapitre III de la loi du 1er septembre 1948 ;
- aux logements régis par une convention conclue en application de l'article L. 351-2 du Code de la construction et de l'habitation ou de l'article L. 353-14 ou encore aux logements "aidés" et réglementés en contrepartie de primes ou prêts spéciaux à la construction consentis par le Crédit foncier de France ou la Caisse centrale de coopération économique ;
- aux logements donnés en location à titre exceptionnel et transitoire par les collectivités locales.
2) L’engagement des preneurs
La loi vise « le cautionnement d'obligations résultant d'un contrat de location ».
Toutes les obligations mises à la charge du preneur par le bail peuvent être cautionnées dès lors qu'elles seront expressément mentionnées (Cass. com., 24 oct. 1995 : JurisData n° 1995-002666 ; Bull. civ. 1995, IV, n° 249 ; JCP G 1995, IV, n° 2619. – CA Paris, 14e ch. A, 20 mars 1991 : JurisData n° 1991-021488).
En effet, la jurisprudence considère que la caution peut refuser de payer l'indemnité d'occupation due par le preneur à compter de la résiliation du bail, faute de stipulation de son engagement à cet égard (CA Versailles, 1re ch., 2e sect., 6 nov. 1998).
Lorsque la caution s’est engagée à garantir deux colocataires, la caution reste engagée au titre des obligations du locataire qui reste dans les lieux (CA Nancy, 2e ch., 3 juin 2002 : JurisDara n° 2002-198919 ; Loyers et copr. 2003, comm. 128, obs. B. Vial-Pedroletti).
D/ La durée du contrat de cautionnement
Les dispositions de l'article 22-1 concernent les contrats de cautionnement ne comportant aucune indication de durée ou dont la durée est stipulée indéterminée.
E/ La date de formation du contrat de cautionnement
Le texte énonce qu'il n'est pas applicable aux cautionnements consentis avant le 1er septembre 1994 qui demeurent donc soumis à la loi sous l'empire de laquelle ils ont été donnés, c'est-à-dire le Code civil (CA Paris, 6e ch. C, 23 nov. 1999)
II – Réglementation du cautionnement
L'ensemble des dispositions de l'article 22-1 est d'ordre public.
A/ La forme
L'acte de cautionnement sera établi soit par acte séparé, soit dans le bail, par acte notarié ou par acte sous seing privé. Il devra contenir l'engagement de la caution à l'égard du bailleur et ainsi que la durée ou non de la garantie.
Quelle que soit la durée de la caution, la personne qui se porte caution doit faire précéder sa signature :
- de la reproduction manuscrite du montant du loyer et des conditions de sa révision : en lettres et en chiffres le montant du loyer initial, la seule mention en lettres étant insuffisante
- de la mention manuscrite exprimant de façon explicite et non équivoque la connaissance qu'elle a de la nature et de l'étendue de l'obligation qu'elle contracte
A cela, il faudra rajouter la reproduction du sixième alinéa de l’article 22-1, relatif aux modalités de résiliation des cautionnements à durée indéterminée ou sans indication de durée.
Le cautionnement est nul si la mention manuscrite n'est pas de la main de la caution. Le bailleur ne pourra en effet reprocher à la caution cette irrégularité car il aurait dû s'assurer des conditions de validité de l'acte (CA Douai, 3e ch., 22 mars 2012, SCI Leruste c/ Vandeleene : JurisData n° 2012-009333).
Enfin la signature de la caution est obligatoire car les seules mentions manuscrites ne sauraient faire preuve de l'engagement si elles ne sont pas suivies de la signature de celui qui s'engage (Cass. 1re civ., 2 juill. 1996).
Toutefois, ces différentes mentions ecrites ne semblent pas concerner les actes authentiques selon la jurisprudence (Cass. 3e civ., 9 juill. 2008).
Enfin, selon les articles 1325 et 1326 du Code civil un exemplaire de l’acte de cautionnement sera remis à la caution.
B/ La sanction
L'ensemble des formalités énoncées est prescrit à peine de nullité du cautionnement. Le défaut total ou la simple insuffisance entraînera la nullité du cautionnement (CA Paris, 14e ch. A, 25 nov. 1998).
Selon la Cour de cassation, la nullité prévue par l'article 22-1 est une nullité de plein droit, qui n'est pas subordonnée à la démonstration d'un grief (Cass. 3e civ., 8 mars 2006).
C/ La resiliation
Aux termes du sixième alinéa de l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989, si le cautionnement est à durée indéterminée ou sans indication de durée, la caution peut résilier son engagement.
Toutefois, cette résiliation ne prendra effet qu'au terme du titre locatif en cours, qu'il s'agisse du contrat initial, du contrat reconduit ou renouvelé.
Cette résiliation sera une résiliation unilatérale et sera exprimée soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit de préférence par acte d'huissier de justice.
En revanche, si le cautionnement a été donné pour une durée déterminée, il est impossible de procéder à une résiliation anticipée (Cass. 1re civ., 4 oct. 2000).
Cette durée déterminée peut inclure les renouvellements, si la caution s'est engagée pour la durée de l'occupation du preneur (Cass. 3e civ., 21 mars 2006).
La résiliation du cautionnement ne va prendre effet qu’au terme du contrat de location au cours duquel le bailleur en reçoit la notification ; elle va donc rester tenue des obligations du preneur nées avant la résiliation, ainsi que de celles nées après la résiliation jusqu'au terme du contrat de location en cours.
Pour éviter toute difficulté relative à la réception de la résiliation par le bailleur, il sera conseillé à la caution d’exprimer sa résiliation soit par remise au bailleur en mains propres, soit par acte d'huissier de justice.
Dans le cas où il y aurait plusieurs bailleurs à l'égard desquels la caution se sera engagée, la notification ou signification de la résiliation devra être faite à chacun d'eux sauf disposition contraire de l'acte de cautionnement.
A l’égard du locataire. La loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 interdit de faire de la résiliation du cautionnement ou de son défaut de renouvellement un motif de mise en jeu de la clause de résiliation de plein droit, ces motifs étant limitativement fixés par la loi
Néanmoins, il pourra être prévu dans le bail, l’obligation pour le locataire de fournir caution, de la maintenir ou la renouveler en cas de résiliation. Le défaut de respect de cette obligation pourrait constituer un motif de résiliation au sens de l'article 1741 du Code civil ou de motif légitime et sérieux de congé au sens de l'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.
III – Les obligations du bailleur en cas de défaillance du locataire
A/ La signification du commandement à la caution
L'article 24, a une portée générale. Ainsi, tout commandement de payé délivré au locataire devra être signifié à la caution, l'esprit de la loi n'étant pas respecté dans le cas contraire.
L’emploi du mot « signification » signifie que l'acte doit être délivré à la caution par un huissier de justice en la forme extrajudiciaire.
L'acte délivré à la caution doit être délivré dans les quinze jours du commandement signifié au locataire.
B/ Sanctions
Lorsque ces formalités n'ont pas été respectées, la caution ne peut être tenue au paiement des pénalités éventuellement prévues par le bail ou des intérêts de retard sur les sommes impayées, mais elle reste, en revanche, tenue du principal quelle qu'en soit la nature.
Lorsque le bailleur laisse s'accroître la dette de loyers des preneurs sans agir en temps utile ni contre eux, ni contre la caution solidaire, il engage sa responsabilité à l'égard de la caution en ne lui permettant pas de l'exercer (Cass. 1re civ., 16 juill. 1998).
Il faut enfin rappeler que l'action contre la caution est exercée lors d'un contrat de bail, ce qui justifie la compétence du tribunal d'instance. Toutefois, si la demande à l'encontre de la caution n'excède pas 4 000 euros, la juridiction de proximité sera compétente.
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.
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Joan DRAY
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