La liquidation judiciaire est le cadre privilégié de la cession d’entreprise qui permet d’assurer le redressement de l’entité économique en même temps que l’apurement du passif du débiteur (art L642-1 C com).
Mais ce rétablissement économique n’a pas lieu sous la gestion du débiteur lui-même dans la mesure où la cession organise le transfert de l’entreprise ou de certaines de ses branches d’activités saines entre les mains d’un ou plusieurs tiers qui s’engage à les maintenir à un certain niveau d’activité et d’emploi et à payer un prix, sans s’encombrer du passif qui reste, sauf exceptions, à la charge du cédant.
La cession s’opère sur décision du tribunal et sans le consentement du débiteur cédant sauf cession d’une branche d’activité en sauvegarde.
Elle a pour objet l’entreprise ou une partie de l’entreprise c'est-à-dire un ensemble d’actifs en exploitation et normalement destiné à le demeurer.
Aussi, le tribunal ordonne-t-il, outre la cession des biens, celle des contrats nécessaires au maintien de l’activité.
En effet, en application de l’article L642-7 du Code de commerce, le tribunal ordonne la cession au repreneur des contrats nécessaires au maintien de l’activité.
Il s’agira dans cet article de préciser le domaine d’application de cet article ainsi que le régime de la cession de contrats.
I- Le domaine d’application de l’article L642-7 :
L’article L642-7 du Code de commerce prévoit la cession par le tribunal des « contrats de crédit bail, de location ou de fournitures de biens ou de services…» qu’il juge nécessaire au maintien de l’activité.
Ainsi, échappent à la cession forcée le contrat de travail qui fait l’objet d’une transmission légale, automatique, générale et d’ordre public (art L1224-1 C trav), comme le contrat d’assurance du bien cédé.
Hormis ces cas particuliers, le domaine de l’article L642-7 est extrêmement vaste.
Néanmoins, il est généralement admis que le contrat de société n’est pas un contrat de fournitures de biens ou de services pas plus que les conventions constitutives de sûretés réelles.
Le contrat de cautionnement est aussi exclu lorsque l’entreprise dont les contrats sont cédés occupe dans l’opération de cautionnement, la position de débiteur.
En effet, le cautionnement, conclu entre le créancier et la caution, ne peut être cédé parmi les contrats du débiteur, qui n’a pas la qualité de partie.
Ainsi, la caution est alors libérée en principe de son obligation de couverture à partir de la transmission du contrat, mais elle reste tenue au titre de son obligation de règlement des dettes nées avant la cession du chef du débiteur.
De même, l’intuitu personae de certains contrats interdit la cession du contrat que lorsque celle-ci serait incompatible avec le maintien des éléments essentiels du contrat.
Ainsi, par exemple, en cas de liquidation judicaire d’un franchiseur, il est impossible qu’un repreneur transmette au franchisé le savoir faire qui est l’objet même de l’obligation du franchiseur, et le contrat sera caduc.
La cession de contrat sera enfin impossible en cas de commande d’une œuvre de l’esprit passé au débiteur.
Il convient de rappeler que les seules conditions requises par l’article L642-7 sont l’existence de ces contrats, leur nécessité ainsi que leur double mention par le cessionnaire dans son offre et par le tribunal dans le jugement arrêtant le plan.
Le contrat doit être nécessaire au maintien de l’activité, ce qu’apprécient souverainement les juges du fond. Mais, ce pouvoir d’appréciation s’exerce sur les seuls contrats que l’auteur de l’offre a mentionné dans son offre.
En effet, le repreneur qui exécutera le plan ne doit pas voir sa situation aggravée par rapport à son offre notamment par la cession d’un contrat non désiré mais aussi quoique plus rarement du refus d’un contrat désiré.
La cession est en principe judiciaire. Seuls sont cédés les contrats dont le tribunal a expressément ordonné, sauf les cas de cession légale.
II- Le régime des contrats faisant l’objet d’une cession judiciaire :
La cession judiciaire des contrats produit ses effets selon un arrêt de la Chambre commerciale en date du 6 janvier 1998 « à la date de conclusion des actes de cession ou de la prise en possession par le cessionnaire en vertu des dispositions du jugement ou de l’autorisation de l’administrateur lorsqu’elle intervient antérieurement à ces actes » (Com 6 janv. 1998 : RTD Civ 1998.369 obs Mestre).
Si cette solution est logique, elle n’en est pas moins source de difficulté en pratique pour déterminer la date de cession des différents contrats dans la mesure où tous les actes ne sont pas signés simultanément.
Les contrats cédés, précise le texte, « doivent être exécutés aux conditions en vigueur au jour de la procédure », nonobstant toute clause contraire.
Cette règle est d’ordre public et assure la pérennité du contrat ainsi que son exécution future qui se fait en principe à l’identique, sans modification des obligations des parties.
Ainsi, le cocontractant a droit, dans le cas d’un contrat à exécution successive, aux « créances correspondant à la période de jouissance postérieure à la date ainsi fixée » peu important leur date d’exigibilité (Com 6 janv. 1998 : RTD Civ 1998 369 obs Mestre).
Enfin, comme l’a rappelé la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 1er octobre 1997, le cessionnaire ne répond pas des inexécutions du cédant (Com 1er oct. 1997 n° 94-22145).
Mais, la cession n’emporte pas purge de sorte qu’il n’est pas interdit au cocontractant de faire constater, après la cession, une résolution dont le principe était acquis avant (Civ 3ème 12 juillet 2000, n° 98-21945).
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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