I - La jurisprudence et les textes applicables.
La rupture conventionnelle du travail instaurée en août 2008 a pour objectif de laisser convenir des conditions de rupture du contrat de travail l’employeur et l’employé d’un commun accord. Ce type de résolution de contrat fut en hausse importante en 2012 : 16% des fins de Contrat à Durée Indéterminée.
Le 3 mars 2015, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a rendu un arrêt majeur n*13-20.549 concernant les conséquences envisageables de la rupture conventionnelle sur la ou les ruptures antérieurement confirmées. La Cour de Cassation affirme que la rupture conventionnelle entraîne la renonciation commune à la rupture précédemment intervenue à l’initiative de l’une d’entre elles.
Trois types de cessation de contrat de travail sont applicables : la démission, le licenciement et la rupture conventionnelle définis par les articles 1231-1 et 1237-11 du Code du travail. La jurisprudence avait longtemps autorisé la substitution d’une démission ou d’un licenciement au profit d’une rupture conventionnelle sauf si le licenciement était antérieur à cause du défaut de consentement du salarié.
- Rétractation
Dans un arrêt du 25 Octobre 1994 n*90-41.909 la Cour de cassation avait déjà décidé que la démission d’un salarié pouvait être rétractable à condition que le cocontractant donne son accord afin d’éviter la rétractation purement unilatérale. La Cour avait affirmé cette possibilité également pour le licenciement le 17 Janvier 1990.
La rétractation de la démission avait pu être refusée dans deux arrêts du 14 Octobre 2009 n*08-42.878 et du 30 Juin 2010 n*09-41.456 du fait du caractère unilatéral de celle-ci ainsi que du refus de l’employeur. Ce serait le même refus en cas d’absence d’acceptation de l’employé en cas de licenciement.
- Renonciation et effets.
Dans un arrêt du 12 Décembre 2012 n*10-28.166 la Cour de Cassation a affirmé la possibilité pour les parties de renoncer par accord aux effets de la prise de décision précédente. Cet arrêt marque la possibilité de renoncer aux effets de toute rupture unilatérale précédemment décidée.
Le 10 Avril 2013 la Cour de Cassation avait même accepté le fait que la rupture conventionnelle puisse annuler la demande antérieure de résiliation judiciaire du contrat de travail demandée par le salarié.
- Existence d’un différend
Enfin, le 23 mai 2013 la Cour de Cassation avait accepté qu’un différend entre les parties n’affectait pas la validité de la convention de rupture de l’article 1237-11. Un licenciement prononcé antérieurement ne constituait donc pas un obstacle à la conclusion de la convention de rupture à l’amiable.
II- La Rupture conventionnelle annule les effets du licenciement.
En l’espèce, le directeur d’une entreprise était soumis à une clause de non concurrence de deux ans dans son contrat de travail. Cette période commençait le jour de la cessation effective de son contrat, l’employeur pouvant le libérer de cette clause au plus tard dans une lettre de licenciement. Licencié avec dispense du préavis de 3 mois le 9 janvier 2009, le directeur signa une rupture conventionnelle le 10 février 2009. Cette convention implique un allongement du temps pour l’employeur de lever la clause de non concurrence par cessation effective de travail prévue pour le 10 avril 2009. L’employeur lui signifia la levée de la clause de non concurrence et son refus de payer la contrepartie financière le 8 Avril 2009. Le salarié a alors saisi le Conseil des Prud’hommes.
- Date de commencement de la clause de non concurrence.
Selon l’article 1237-13, la convention de rupture doit fixer la date de rupture du contrat de travail qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation par l’autorité administrative. La Cour de cassation en déduit que si le contrat de travail prévoit que l’employeur pourra libérer le salarié de l’interdiction de concurrence soit durant l’exécution du contrat soit au jour de la réception de la lettre de licenciement ou de démission, c’est la date de la rupture fixée par le convention de rupture, en cas de rupture conventionnelle, qui détermine le respect par l’employeur du délai contractuel. Cette analyse avait déjà été admise dans un arrêt du 29 Janvier 2014 affirmant que le délai de renonciation à la clause de non concurrence a pour point de départ la date de rupture fixée par la convention de rupture.
A noter que la date de fin des effets de la clause de non concurrence est la date du départ effectif du salarié de l’entreprise en cas de dispense d’exécuter le préavis pour le salarié (Cour de Cassation, 27 Septembre 1989). A la suite du licenciement du directeur, la clause de non concurrence devait être exécutée – pleinement et entièrement - par l’employé.
- Les conséquences de la convention sur la clause de non concurrence.
Or, par sa décision de signer une convention de rupture le 10 février 2009, l’employé a renoncé aux effets du licenciement qui avait été prononcés le 9 Janvier.
La Chambre sociale affirme qu’il a également renoncé à l’exécution de la clause de non concurrence. Considérant que le contrat n’a pas encore été rompu du fait de la renonciation, la Chambre sociale affirme que le terme suspensif de la clause de non concurrence n’avait pas reçu exécution. L’interdiction de non concurrence y était également suspendue.
De ce fait, un nouveau délai de renonciation à la clause de non concurrence court à compter de la date fixée dans la convention par les parties du fait de la rupture décidée d’un commun accord postérieurement au licenciement.
Dès lors, la convention de rupture entraîne la renonciation aux effets de la rupture unilatérale antérieure. Elle peut réitérer l’extinction de la relation contractuelle pour l’avenir dans un régime juridique différent de ce qui avait été précédemment conclu.
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Joan DRAY
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