La déclaration de créances est une formalité obligatoire pour les créanciers afin d’obtenir le paiement des sommes dues par une entreprise en difficulté dès lors que celle-ci fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.
L'article L. 622-24 du Code de commerce prévoit que la déclaration de créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix.
En principe, les créances devant être déclarées auprès du mandataire judiciaire (en cas de procédure de sauvegarde ou de redressement) ou du liquidateur (en cas de liquidation) sont :
toutes les créances nées antérieurement au jugement d'ouverture de la sauvegarde, du redressement judiciaire ou de la liquidation judiciaire de l'entreprise en difficulté ;
les créances assorties d'une sûreté publiée (hypothèque, par exemple) ou résultant d'un contrat publié (notamment crédit- bail) ;
les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture et ne bénéficiant pas du privilège de paiement prévu à l'article L. 622-17 I du Code de commerce.
Néanmoins, certaines créances antérieures au jugement d'ouverture, telles que les créances salariales, sont dispensées de déclaration.
La déclaration de créances doit être formalisée par écrit et le créancier doit mentionner de façon non équivoque sa volonté de réclamer une somme déterminée. De plus, l'article L. 622-25 du Code de commerce indique les éléments à mentionner dans la déclaration.
Les créances déclarées doivent être certifiée sincère par le créancier, sauf si elles résultent d'un titre exécutoire, et doivent comprendre les documents justificatifs de la créance.
LE DELAI DE DECLARATION
Le délai pour effectuer la déclaration diffère selon que le créancier est ou non domicilié en France.
Pour le créancier non titulaire d'une sûreté publiée ou d'un contrat publié, la déclaration de créances a lieu dans les deux mois suivant la publication du jugement d'ouverture de la procédure au Bulletin Officiel des Annonces civiles et commerciales (BODACC) et dans un journal d'annonces légales du lieu de la société débitrice (article R. 622-24 du Code de commerce).
Pour le créancier titulaire d'une sûreté publiée ou d'un contrat publié, le mandataire judiciaire dispose d'un délai de 15 jours à compter de l'ouverture de la procédure pour avertir le créancier de l'obligation de déclarer sa créance. Le créancier dispose alors d'un délai de deux mois qui court à compter de la notification de l'avertissement personnel envoyé par le mandataire.
Il est tenu compte de la date d'expédition de la déclaration pour apprécier le délai de deux mois.
Les créanciers qui sont domiciliés hors de France disposent d'un délai de quatre mois pour effectuer cette formalité.
L'article L. 622-26 du Code de commerce prévoit qu'à défaut de déclaration dans le délai imparti, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion ;
Le mandataire judiciaire qui reçoit les déclarations de créances établit, en accord avec le débiteur, une liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi. Cette liste est ensuite transmise au juge commissaire qui tranche les contestations éventuelles.
LA CONTESTATION DE DECLARATION
En l'absence de contestation du débiteur ou du mandataire judiciaire, la déclaration est portée sur l'état des créances qui est signé par le juge-commissaire, sans qu'il soit besoin d'entendre les parties.
Si le débiteur conteste la proposition d'admission du mandataire judiciaire, le créancier est invité à répondre à cette contestation dans un délai de 30 jours, à compter de l'accusé de réception de la lettre qui lui est envoyée par le mandataire judiciaire l'informant de cette contestation.
En l'absence de réponse du créancier, ce dernier s'interdit toute contestation ultérieure et est réputé avoir admis la contestation de son débiteur.
En revanche, si le créancier répond, les parties sont convoquées à l'audience du juge-commissaire qui statuera sur le sort de la créance contestée.
La décision est alors portée sur l'état des créances.
Le juge-commissaire a seul compétence pour statuer sur la déclaration ainsi que sur l'existence de la créance.
Seulement, la procédure de vérification des créances ne vise qu’à déterminer l’existence du montant et de la nature de la créance, le juge-commissaire n’est pas compétent pour se prononcer sur la nullité d’un contrat (Cass. Com., 19 mai 2004).
Les décisions d'admission ou de rejet des créances ou d'incompétence prises par le juge-commissaire sont portées sur un état des créances déposé au greffe du tribunal de commerce où toute personne intéressée peut en prendre connaissance.
Les parties et les organes de la procédure peuvent ensuite contester les décisions du juge-commissaire devant la cour d'Appel.
A cet égard, dans un arrêt rendu récemment, le 9 avril 2013, la Chambre commerciale de la Cour de cassation apporte des précisions sur l’exercice de la contestation de la décision du juge-commissaire.
En l'espèce, dans cette affaire, suite au redressement judiciaire ouvert le 1er mars 2007 à l’encontre d’une débitrice, un établissement de crédit avait déclaré sa créance correspondant à trois prêts accordés par actes notariés du 10 août 2000.
La déclaration ayant été contestée par la débitrice, le juge-commissaire a, par ordonnance du 28 janvier 2010, considéré que la contestation soulevée sur la nullité des contrats de prêts ne relevait pas de ses pouvoirs juridictionnels.
Faute pour le débiteur d'avoir pris l'initiative d'engager une action judiciaire dans le délai d'un mois prévu par l'article R. 624-5 du Code de commerce, le créancier a saisi de nouveau le juge-commissaire pour faire admettre sa créance au passif du redressement judiciaire du débiteur.
L’article R. 624-5 du code de commerce dispose que si le juge-commissaire se déclare incompétent pour statuer sur une créance déclarée, les parties disposent d’un mois pour saisir la juridiction compétente sous peine de forclusion.
Seulement, la cour d'appel avait rejeté la créance de la banque, retenant que, même en l'absence de saisine de la juridiction compétente dans le délai d'un mois prévu par l'article R. 624-5 précité, le juge-commissaire et la cour d'appel, statuant en matière de vérification des créances, restaient sans pouvoir pour se prononcer sur la validité de la créance contestée et, par voie de conséquence, sur son admission, constate la forclusion édictée par l'article R. 624-5.
Mais la Cour de cassation censure l'arrêt d'appel au visa des articles L. 624-2, L. 631-18, R. 624-5 et R. 631-29 du Code de commerce.
La Chambre Commerciale énonce que la cour d'appel qui relève son absence de pouvoir juridictionnel pour trancher une contestation relative à une créance déclarée doit surseoir à statuer sur l'admission de la créance après avoir invité les parties à saisir le juge compétent, de sorte qu'elle ne peut pas constater la forclusion édictée par l'article R. 624-5 du Code de commerce.
La forclusion est la sanction civile qui, en raison de l'échéance du délai légalement imparti à une personne pour faire valoir ses droits en justice, éteint l'action dont disposait cette personne.
Il en est par exemple ainsi lorsqu'une partie à un litige a laissé passer le délai pour faire appel ou pour se pourvoir en cassation. La forclusion est l'effet que la loi attache à une déchéance, à une prescription ou à une péremption.
Ainsi, la Cour de Cassation a justement considéré que dès lors que la Cour d’appel se déclare incompétente pour trancher une contestation relative à une créance déclarée, elle ne peut pas non plus constater la forclusion sans laisser aux parties l‘opportunité de saisir le juge compétent.
La cour d’Appel doit donc, en l’espèce, inviter les parties à saisir le juge compétent et sursoir à statuer sur l’admission de la créance litigieuse.
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Joan DRAY
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