Le crédit affecté ou lié : une protection supplémentaire pour le consommateur
L'article L.311-1 9° du Code de la consommation définie le crédit affecté ou lié comme "le crédit servant exclusivement à financer un contrat relatif à la fourniture de biens particuliers ou la prestation de services particuliers ; ces deux contrats constituent une opération commerciale unique".
Dans cette hypothèse, il y a à la fois :
- un contrat principal conclu entre un professionnel et le consommateur
- un contrat qui lie le consommateur avec un établissement de crédit
Au terme des articles L.311-20 à L.311-28 du Code de la consommation, il y a interdépendance entre les deux contrats. Cette interdépendance est d'ordre public. Les parties ne peuvent pas y déroger.
I/ Le délai de rétractation
Lorsqu'un crédit affecté est conclu, le consommateur a un délai de 14 jours pour se rétracter.
Cependant, pour ces crédits à l'exclusion de ceux conclus à distance, l'article L. 311-35 du Code de la consommation autorise une réduction du délai à trois jours lorsque le consommateur en fait une demande expresse rédigée, datée et signée de sa main même.
Dans le cas où le délai serait raccourci, celui-ci expire au jour de la livraison.
Lorsque les formalités de l'article L.311-35 du Code de la consommation ne sont pas respectées, le contrat de vente est nul. Cela a pour conséquence d'entrainer la nullité du contrat de crédit.
Il a été jugé que le contrat était nul, en cas de livraison anticipée d'un véhicule automobile acheté à crédit, si le formalisme et les délais de l'article L. 311-24 ancien du Code de la consommation ne sont pas respectés (CA Amiens 3 avril 2012, SA Fiat Crédit France c/ D).
L'article L. 311-40 du Code de la consommation autorise le versement comptant d'une partie du prix lorsque le crédit est lié à une vente ou une prestation de services sauf si elles ont été réalisées par un démarchage à domicile.
En contrepartie, le consommateur doit recevoir un récépissé valant reçu et comportant la reproduction intégrale des articles L. 311-36 et L. 311-37 du Code de la consommation.
II/ L'exécution du contrat de crédit affecté
- La condition du paiement
Les obligations du consommateur-emprunteur ne débutent qu'à compter du jour de la livraison du bien ou de l'exécution de la prestation de services.
Si le contrat est à exécution successive, les obligations commencent au début de la livraison ou de la fourniture et cesse avec celle-ci (article L. 311-20 du Code de la consommation).
Or, tant que l'organisme de crédit ne l'a pas prévenu de l'octroi du crédit, et tant que le délai de rétractation n'est pas expiré, le vendeur ou le prestataire de services n'est pas tenu d'exécuter le contrat principal en livrant la marchandise ou en exécutant la prestation (Civile 1 3 mai 1995).
C'est au prêteur que revient la charge de la preuve de l'exécution du contrat principal. « Il incombe au prêteur, lequel ne peut délivrer les fonds au vendeur ou au prestataire de services qu'au reçu d'un document attestant l'exécution, au moins partielle, du contrat principal, de démontrer cette exécution » (Civile 1 3 mai 1995).
- L’obligation de remboursement
L’une des obligations du consommateur-emprunteur est le remboursement du crédit.
L'emprunteur peut obtenir une dispense de remboursement du prêt lorsque l'obligation de délivrance n'a pas été exécutée.
La Cour de cassation a refusé d'admettre une dispense de remboursement lorsque la personne a signé le bon de livraison alors qu'elle n'avait pas été livrée et qu'elle commence à rembourser le crédit (Civile 14 novembre 2001).
En cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal pourra, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit (article L.311-32 du Code de la consommation).
La demande doit être adressée au tribunal qui appréciera l'opportunité de la suspension.
La suspension n'est possible que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur ou l'emprunteur.
C'est à l'emprunteur de rapporter la preuve de l'inexécution de l'obligation de délivrance (Civile 1 16 janvier 1996).
Cependant, il ne faudrait pas que le défaut de livraison soit dû à une carence de l'acheteur (Civile 1 16 avril 1991).
III/ La résolution du contrat de crédit
L'article L. 311-32 du Code de la consommation prévoit que le contrat de crédit est résolu de plein droit lorsque le contrat, en vue duquel le prêt avait été conclu, est lui-même résolu (Civile 2 juillet 1991), peu importe la cause de la résolution du contrat principal (vice du consentement, garantie des vices cachés, non-conformité de l'usage).
Il ne peut y avoir de renonciation à l'exercice de l'action en résolution dans un contrat de crédit à la consommation (Civile 1 11 février 1986).
Cette résolution de plein droit n'est admise que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur (article L.311-21 alinéa 2 du code de la consommation et Civile 1 31 janv. 1995).
La résolution a pour conséquence que chacune des parties doit être remise en l'état antérieur. L'emprunteur doit restituer les prestations reçues et le prêteur doit rendre les intérêts perçus.
Lorsque l'organisme de crédit a versé les sommes au vendeur, se pose la question du remboursement de ses sommes en cas de résolution du contrat principal.
Dans cette hypothèse, la Cour de cassation a estimé que le consommateur devait rembourser à l'organisme de crédit les sommes versées pour son compte (Civile 2 mai 1989).
Cependant, si le prêteur a payé le vendeur sans tenir compte des instructions de l'emprunteur, il y a faute de sa part et le consommateur n'est plus tenu de rembourser (Civile 1 13 novembre 2008).
C'est le cas lorsque :
- la remise des fonds a été faite de la seule initiative de l'organisme de crédit, sans l'attestation du consommateur (Civile 1 8 juillet 1994).
- l'organisme de crédit manque à son obligation contractuelle de conseil : c'est-à-dire son devoir de ne pas inciter les consommateurs à s'engager dans une relation préjudiciable (CA Rennes 6 juillet 1995).
Le délai de forclusion ne s'applique pas en cas d'annulation ou de résolution du contrat principal.
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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