Dans un arrêt, en date du 17 juin 2015, la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a estimé que le seul fait pour le prêteur d'accorder une facilité de paiement à l'emprunteur ne caractérise pas une renégociation du prêt.
Les intérêts intercalaires précédant l'amortissement du prêt doivent être pris en compte pour le calcul du taux effectif global (TEG).
La banque a consenti un prêt immobilier à un couple.
La banque a constaté la défaillance de ces emprunteurs et les a assigné, afin d'obtenir la vente forcée de l'immeuble.
L'emprunteur reproche à l'arrêt d'avoir rejeté ces constatations, qui portaient sur l'application du taux d'intéret conventionnel et ordonner la vente forcée de l'immeuble par adjudication judiciaire.
Il a formé un pourvoi contre cet arrêt.
La Cour de Cassation a censuré la décision des juges du fond.
Sur la troisième branche du moyen unique, il fait valoir qu'en cas de renégociation du prêt, les modifications au contrat de prêt initial sont apportées sous la forme d'un avenant qui comprend un échéancier des amortissements détaillant chaque échéance le capital restant dû en cas de remboursement anticipé et le taux effectif global ainsi que le coût du crédit calculés sur la base des seuls échéances et frais à venir.
Ainsi, selon le demandeur au pourvoi, le report de l'exigibilité des mensualités d'un contrat de prêt constitue une renégociation du prêt pour laquelle la banque est tenue d'établir un avenant selon l'article L312-4-1 du Code de la consommation.
La Cour de Cassation sur ce même moyen a estimé que le seul fait pour le prêteur d'accorder une facilité de paiement à l'emprunteur ne caractérise pas une renégociation du prêt.
Sur la première branche du moyen unique, la Haute Juridiction a considéré que la durée de la période de franchise et les intérêts s'y rapportant étaient précisément prévus par le contrat et qu'étant ainsi déterminés lorsqu'il a été signé, ils relevaient des intérêts, frais, commissions et rémunérations de toute nature qui sont une condition de l'octroi du crédit aux conditions acceptées par l'emprunteur, la cour d'appel a violé l'article 313-1 du Code de la consommation.
La Cour de Cassation a décidé, sur la deuxième branche du moyen unique, que le taux conventionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel, la cour d'appel a violé l'article 1907 du code civil et les articles L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation.
         I. Le calcul du taux effectif global
Lorsque le taux nominal et les frais sont connus, le calcul même du taux conventionnel, TEG ou taux annuel effectif global, qui sera donc le taux affiché et pratiqué, va dépendre de l'application de méthodes et de pratiques particulières.
Il n'est pas interdit aux parties de faire évoluer ce taux pour l'avenir soit par une indexation soit par une variation du taux initial.
Le principe général est que le taux annuel est calculé selon la méthode de l'quivalence.La détermination du taux d'intérêt annuel selon cette méthode est extrêmêment complexe. Elle ne relève pas du droit mais de la science mathématique. L'article R. 313-1 renvoie à un décret le soin de présenter les techniques de calcul (Décret du 10 juin 2002 qui, lui-même, prévoit pour application de son article 1er l'adoption d'un autre décret, c'est un décret du même jour, n° 2002-928)
        L'exception: la méthode proportionnelle
Cette méthode s'applique aux crédits professionnels et immobiliers.
Le TEG est alors un taux annuel proportionnel au taux de période.
Le taux de période et la durée de celle-ci doivent être communiqués à l'emprunteur (art. R. 313-1, III, al. 1er du Code de la consommation) et donc figurer au contrat de prêt.
Le taux de période est "calculé actuariellement à partir d'une périodicité correspondant à la périodicité des versements effectués par l'emprunteur. Il assure, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre, d'une part les sommes prêtées et, d'autre part, tous les versements dus par l'emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers, ces éléments étant, le cas échéant, estimés" (art. R. 313-1, III, al. 2 du Code de la consommation).
La période, rythme d'amortissement du prêt, constitue donc la base du calcul actuariel du TEG, tenant compte de la possibilité pour le créancier de replacer les intérêts déjà perçus au taux du prêt et pour la durée restant à courir.
En cas de périodicité irrégulière des versements, la période unitaire est celle qui correspond au plus petit intervalle séparant deux versements, sans qu'il puisse être inférieur à 1 mois.
Le TEG annuel est obtenu en multipliant le taux de période par le nombre de périodes contenues dans une année (12 mois, 4 trimestres ou 2 semestres).
Le TEG étant un taux à terme échu, il oblige à la conversion éventuelle d'intérêts précomptés, mais la pratique bancaire a toujours donné la préférence, en matière de prêts à échéance, au taux à terme échu.
Il est prévu la perception d'un montant minimum, « lorsque le montant des opérations mentionnées aux articles R. 313-2 et R. 313-3 du Code de la consommation est inférieur à un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances ». Dans ce cas, « il peut être perçu pour chaque opération un minimum forfaitaire qui n'est pas pris en compte pour déterminer le taux effectif global, ce minimum doit être porté à la connaissance de l'emprunteur. » (C. consom., art. R. 313-4).
Le TEG s'obtient, en matière d'escompte et quelle que soit la méthode de calcul retenue, selon la même formule que celle applicable au découvert.
Les modalités de calcul du TEG concernent le moment du calcul et les formules mathématiques de base. Pour les prêts, quels qu'ils soient, c'est en principe à la date de la convention que doit se faire le calcul, même si les textes ne le précisent pas directement.
Il est possible de se référer au texte relatif à l'usure (art. L. 313-3 du Code de la consommation).
Le TEG est calculé « au moment où le prêt est consenti », c'est-à -dire, à la date de la signature du contrat.
Pour les prêts à taux évolutifs, parce que indexés, variables ou révisables, « le taux effectif global est calculé en partant de l'hypothèse que le taux d'intérêt et les autres frais resteront fixes par rapport au niveau initial et s'appliqueront jusqu'au terme du contrat de crédit » ( art. R. 313-1, I du Code de la consommation). C'est d'ailleurs à ce moment que s'apprécie le caractère éventuellement usuraire du taux, par comparaison avec le taux plafond.
Il faut savoir que le calcul du TEG s'appuie sur des formules mathématiques correspondant à la méthode de conversion proportionnelle retenue par la loi.Le taux de période et TEG annuel doivent être calculés avec, au moins, une décimale pour permettre une précision et une fiabilité minimales.
Il est prévu une obligation de communication à l'emprunteur mais pas de sanction spécifique.
Toutefois, une mauvaise base de calcul entraînera une erreur de calcul et donc aboutira à afficher un TEG erroné.
Les sanctions, civiles, nullité ou déchéance, auront vocation à s'appliquer.
Une Juridiction d'Appel a pu décider de substituer au taux conventionnel le taux légal (CA Colmar, 24 août 2004).
La Cour de cassation a implicitement confirmé cette solution (Cass. 1re civ., 19 sept. 2007).
       II. La facilité de paiement accordé à l'emprunteur
Le seul fait pour le prêteur d'accorder une facilité de paiement à l'emprunteur ne caractérise pas une renégociation du prêt.
Ainsi, dès lors que la banque avait seulement accepté, à la demande des emprunteurs, de reporter en fin de contrat les échéances dues pour la période comprise entre le 15 octobre 2010 et le 15 mars 2011, les autres conditions du prêt demeurant inchangées et aucune incidence n'étant invoquée sur les sommes dues aux titres des frais et intérêts, le formalisme de cet article L. 312-14-1 ne s'imposait nullement (Cass. 1re civ., 17 juin 2015 - Com. 9 juill. 2002).
À propos de la base de calcul des intérêts, la Cour rappelle une solution qu'elle avait déjà retenue, qui est la suivante: le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le TEG, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile (Civ. 1re, 19 juin 2013).
La Cour de Cassation a précisé que les intérêts intercalaires, dus au titre de la période de franchise, à savoir au titre du différé d'amortissement, devaient être inclus dans le TEG (Cass. 1re civ., 17 juin 2015).
En l'espèce, le contrat de prêt excluait du TEG les intérêts et cotisations d’assurance prélevés pendant la période qui précédait l'amortissement du capital emprunté.
L'article L. 313-1 du code de la consommation impose que soient inclus dans le TEG les intérêts, les frais commissions ou rémunérations de toute nature déterminables à la date de l’acte de prêt (Civ. 1re, 28 juin 2007) qui conditionnent l'octroi du prêt (Civ. 1re, 9 déc. 2010).
Cette règle est d'ordre public (Civ. 1re, 21 janv. 1992).
Il importe peu que la période d'amortissement commence seulement après la période de franchise.
Vous pouvez me poser vos questions sur conseiller juridique.net: http://www.conseil-juridique.net/joan-dray/avocat-1647.htm
Joan Dray
Avocat à la Courjoanadray@gmail.com
76/78 rue Saint-Lazare
75009 Paris
tel: 09.54.92.33.53