Les contrats de franchise sont courants dans la vie des affaires.
Ils permettent au franchiseur de tenter de reproduire le succès qu’il a connu dans son entreprise, et au franchisé de bénéficier de son savoir-faire, son enseigne, sa marque et son assistance commerciale.
- Le contrat de franchise n’est pas un contrat spécifique
Ni la loi ni la jurisprudence n’ont donné de définition juridique du contrat de franchise, qui regroupe des prestations juridiques différentes.
Ainsi on ne peut appliquer aux prestations de fourniture de la marque les règles applicables aux fournitures des produits : les premiers relevant de la licence de la marque, les seconds, de la vente.
Le contrat de franchise n'existe donc pas en tant que qualification juridique autonome.
On peut cependant nuancer cette position en notant qu’il existe Fédération française de franchisage, dont les adhérents sont liés par un Code de déontologie européen de de la franchise, dont les dispositions, adoptables contractuellement, pourraient devenir un usage.
N’étant soumis à aucune règle spécifique, le contrat de franchise obéit au droit commun des contrats et aux règles propres à chacun des contrats coexistant en son sein.
Le contrat de franchise est souvent perçu comme un contrat spécifique et non une agrégation de contrats.
C’est pourquoi on peut parfois penser que le franchisé aurait des droits spécifiques sur le franchiseur, comme la réalisation de certains résultats commerciaux.
Mais la Cour de cassation vient dernièrement de rappeler que le contrat de franchise est bien soumis au droit commun des contrats, et notamment qu’une résolution de la franchise emportera les mêmes conséquences (Cass. com. 18 octobre 2011 n° 10-23.524, Sté K3 c/ Sté Lina's développement).
- En cas d’annulation, le franchisé peut-il réclamer réparation pour la non-réalisation des résultats qu'il était en droit d'attendre ?
Dans cette affaire, un franchiseur avait manqué à son obligation d’information précontractuelle, ce pourquoi le franchisé avait obtenu l’annulation du contrat de franchise.
Suite à cela, il avait demandé la réparation de son préjudice financier, estimant que le manquement du franchiseur lui avait fait perdre la différence entre le chiffre d'affaires effectivement réalisé et celui qui aurait dû correspondre au seuil de rentabilité.
Or l’annulation ayant un effet rétroactif, le contrat de franchise annulé est réputé n’avoir jamais existé.
La Cour de cassation rejette donc la demande du franchisé, qui ne pouvait pas utilement réclamer réparation d'un préjudice correspondant à la non-obtention des résultats commerciaux qu'il était en droit d'attendre de l'exploitation de la franchise, sauf à méconnaître les conséquences mêmes de la nullité prononcée.
Cette solution concernant un contrat de franchise correspond exactement au droit commun des contrats où « la nullité emporte effacement rétroactif du contrat et remise des choses en leur état antérieur » (Cass. 3e civ. 2-10-2002 n° 01-02.924).
Aussi, pour obtenir réparation en raison du préjudice causé par la faute du franchiseur (le contrat de franchise avait été annulé pour dol), le franchisé aurait pu agir sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, disposant que celui qui cause à autrui un préjudice par sa faute doit le réparer.
Il est à noter que le même franchiseur a vu un contrat de franchise le liant à un franchisé une nouvelle fois annulé pour dol, par la Cour d’Appel de Paris le 19 janvier 2011 ; les informations étant erronées et le franchiseur dissimulant les difficultés de franchisés (CA Paris 19 janvier 2011 n° 09-13977, ch. 5-4, SARL Lina's Boutiques c/ SAS L & Sud).
- Résiliation du contrat : indemnisation possible si la faute incombe au franchiseur
Sans aller jusqu’à l’annulation, le contrat peut être résilié (la résiliation, contrairement à l’annulation, n’a d’effet que pour l’avenir).
Ainsi, le contrat peut être résilié aux torts du franchisé ou du franchiseur.
Pour exemple de contrats de franchise résiliés aux torts du franchiseur, on peut mentionner des livraisons non conformes aux commandes, tardives voire restées purement et simplement non satisfaites (CA Rouen, 2e ch. civ., 22-9-1994) ; approvisionnement du magasin et opérations promotionnelles (Cass. com. 28-6-2005 n° 968, Sté lyonnaise de développement commercial c/ Sté JB Distribution).
Or, dans un cas de résiliation du contrat aux torts du franchiseur, le franchisé peut obtenir réparation du préjudice subi.
Il peut ainsi obtenir la réparation de ses pertes, tel le remboursement la redevance payée par le franchisé, des frais de dépose des éléments distinctifs de la marque du franchiseur, ou l'atteinte à son image commerciale (CA Paris 22-4-1997, Tendille c/ SARL Synergie et a.).
Le franchisé, qui a constitué une clientèle lors de l’exécution du contrat de franchise, et qui est lié par une clause de non-concurrence stipulée par le franchiseur, a droit à l'indemnisation de la clientèle qu'il a constituée sur le fondement des quasi-contrats de l'article 1371 du Code civil (Cass. com. 9-10-2007 n° 95-14118, Mme Harquet ès qual. c/ SA SFR).
La résiliation d'un contrat de franchise n'entraîne pas, en dépit de l'interdépendance des contrats, celle du contrat de bail conclu entre le franchiseur et le franchisé dès lors qu'il résulte des circonstances que le bail s'est poursuivi après l'expiration du contrat de franchise (Cass. 3e civ. 30-6-2010 n° 09-13.335).
Si le contrat de franchise n’est pas reconnu comme un contrat nommé et disposant donc de ses règles spécifiques, force est de constater que la particularité des relations entre franchiseur et franchisé impose à ce dernier de rester attentif aux solutions données par la jurisprudence à ces situations pratiques, telles que la résiliation du bail ou la perte de clientèle.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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