Demandé son licenciement à son employeur ne constitue pas une faute.
Comme tout autre licenciement, la rupture du contrat de travail pour un motif disciplinaire doit reposer sur une cause à la fois réelle et sérieuse.
L'employeur doit donc caractériser une faute du salarié suffisamment grave pour justifier la rupture de son contrat.
Pour apprécier le degré de gravité de cette faute, il doit tenir compte d'éléments de contexte.
Pour légitimer un licenciement, la faute doit avoir été commise par le salarié dans l'exercice de ses fonctions. Le fait reproché au salarié doit être susceptible de justifier le prononcé d'une sanction, et être suffisamment sérieux pour entraîner la rupture du contrat de travail.
Par principe, seules les fautes commises par un salarié dans le cadre de sa vie professionnelle peuvent justifier un licenciement disciplinaire.
Cependant, quand est-il lorsqu’il s’agit du salarié lui-même qui demande à son employeur d’être licencié ?
La chambre sociale de la Cour de cassation a répondu à ce sujet, par un arrêt en date du 2 juillet 2015, n°14-13.419 (n° 1163 F-D), d'A. c/ Sté NCI Environnement : RJS 11/15 n° 702.
La haute juridiction s’est prononcée, notamment, sur le caractère fautif de la demande, et a considéré que le seul fait pour un salarié de solliciter de son employeur la rupture du contrat de travail ne constitue pas une faute.
En l’espèce, il s’agissait d’un salarié qui souhaitait quitter son entreprise pour s'occuper d'un projet personnel.
Son contrat de travail contenait une clause prévoyant le versement d'une indemnité dite « parachute » en cas de rupture du contrat à l'initiative de l'employeur, sauf faute grave ou lourde de sa part.
Il avait demandé à l'employeur, à au moins deux reprises, de le licencier en lui versant cette indemnité.
La haute juridiction a affirmé que le simple fait de solliciter de son employeur la rupture du contrat de travail ne constitue pas une faute et ne saurait fonder un licenciement.
Mais dans l’affaire commentée, le salarié avait un intérêt tout particulier à être licencié, ce qui explique qu’il ait pu se montrer insistant auprès de son employeur.
L’intéressé était en effet bénéficiaire d’une indemnité contractuelle, appelé « clause parachute » si la rupture de son contrat de travail intervenait à l’initiative de l’employeur.
Toutefois, la clause n’était pas due en cas de licenciement pour faute grave ou lourde.
Dès lors pour se soustraire au paiement de cette indemnité, l’employeur avait licencié l’intéressé pour faute grave, au motif qu’il avait clairement exprimé, à plusieurs reprises, sa volonté d’être licencié afin de pouvoir s’occuper de projets personnels, alors qu’il pouvait démissionner.
La Cour d’appel avait requalifié le licenciement en « faute simple », condamnant l’employeur au paiement de l’indemnité contractuelle de licenciement et d’une indemnité compensatrice de préavis.
La Cour de Cassation censure en partie les Juges d’appel.
Statuant sur la qualification du licenciement, la Haute juridiction juge au contraire qu’aucune faute ne peut être reprochée au salarié pour s’être exprimé en sollicitant la rupture de son contrat de travail, de sorte que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Cependant, si le fait de solliciter un licenciement ne peut être considéré comme fautif, on peut reconnaitre que cette stratégie n’est pas la plus adaptée.
D’une part, il est évident qu’un employeur ne soit pas enclin à verser des indemnités de rupture à un salarié qui prend l’initiative de se retirer de l’entreprise pour des raisons de convenance personnelle.
D’autre part, lorsque le salarié souhaite rompre son contrat de travail, d’autres modalités de rupture semblent plus adaptées, comme la démission ou la rupture conventionnelle, voire lorsque les circonstances s’y prêtent, la prise d’acte ou la résiliation judiciaire.
Dès lors ,la demande de licenciement du salarié à l’employeur reste à méditer, même s’il ne constitue pas une faute.
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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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