I – La teneur du droit au logement décent
A) L’obligation légale
Selon l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le logement ne peut laisser paraître « des risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé » et doit être « doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation ». Il s’agit d’assurer un confort et décence minimum au profit du locataire.
Par conséquent, il est précisé que, de manière générale ce logement lui-même doit être en bon état de réparation et d’usage. Cette exigence vaut également pour tous les équipements dont le logement est garni et dont mention est porté au contrat de location.
Puisque aucune disposition législative ni même réglementaire ne donne une définition de la notion de « logement décent » il faut alors se référer, pour ce qui est des locaux à usage d’habitation principale, à la liste de conditions établie par le décret du 30 janvier 2003. Ce dernier opère une distinction entre la protection de la sécurité physique et la santé du locataire d’une part, et les obligations tenant aux éléments d’équipement et de confort d’autre part.
Dans tous les cas, le décret prévoit que le logement qui fait l'objet d'un arrêté d'insalubrité ou de péril ne peut être considéré comme un logement décent.
Le logement décent doit assurer la sécurité et la santé du locataire
Pour ce faire, le logement doit assurer :
Þ Le clos et le couvert
Þ Le bon état, conformément à l’usage normal, des dispositifs d’entretenue
Þ Absence de risque présenté pour la sécurité ou la santé par la nature et l'état de conservation et d'entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement
Þ Bon état et conformité aux normes légales et réglementaires des réseaux et branchements d'électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d'eau chaude
Þ Adaptation aux besoins d’une occupation normale des dispositifs d'ouverture et de ventilation adapté aux besoins d'une occupation normale du logement
Þ Un éclairement naturel suffisant
Le logement décent doit assurer le bon état des éléments de confort et d’équipement
Les aspects techniques sont précisés par le décret et tendent à assurer tant l’adaptation aux caractéristiques du logement, que celle aux besoins d’un usage normale et à la conformité à la réglementation en vigueur.
Puisque c’est la dangerosité qui doit être prévenue, une installation ne répondant plus à la réglementation en vigueur ne confère par au locataire le droit d’exiger sa mise en conformité, sans preuve de sa dangerosité (CA Paris, 6e ch. B, 27 mars 2003).
Les éléments d’équipement et de confort concernent l’alimentation en eau potable, en électricité, le chauffage, les installations sanitaires, la cuisine ou coin cuisine.
B) La dérogation conventionnelle
La loi accorde une place à la liberté contractuelle, en précisant que le bailleur peut s’affranchir de cette obligation. Dans ce cas c’est le locataire qui doit assurer les travaux nécessaires mais les parties doivent prévoir les modalités de réduction du loyer.
Cependant, les parties ne peuvent pas librement convenir que le locataire, en contrepartie d’une diminution des loyers, exécutera ou fera exécuter les travaux de mise aux normes de confort et d’habitabilité. La Haute Juridiction a récemment rappelé (Cass.civ3ème, 3 février 2010) que ces travaux ne peuvent pas être mis à la charge du locataire, même avec une contrepartie. La loi opère donc un tri entre les obligations dérogeables et celles non dérogeables sans lesquelles le logement ne pourra être décent.
Ces travaux particuliers sont énumérés par le décret du 6 mars 1987 et comprennent notamment :
Þ Les dispositions concernant la composition et les dimensions des pièces, comme la surface habitable du logement, qui est, sans compter la cuisine, 9m2 ou 12 m2 en présence d’un coin cuisine ; l’hauteur sous plafond étant normalement au moins 2,20m
Þ l’existence d’ouvrants sur l’extérieur du bâtiment permettant l’aération et l’éclairage
Þ alimentation en eau potable permanente ainsi que celle en électricité (le cas échéant en gaz)
Þ existence d’une salle d’eau et cabinet d’aisance séparés
Þ celle d’une cuisine ou d’un coin aménagé afin de recevoir un appareil de cuisson
Þ absence d’infiltration ou de remontée d’eau
Þ absence de défaut d'entretien grave dans le logement, avec le gros oeuvre (murs, charpentes, escaliers, planchers, balcons) en bon état d'entretien et une couverture étanche.
II – Les sanctions de la violation du droit à un logement décent
Que peut faire le locataire ?
Þ Demander la mise en conformité
L'article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit la possibilité d'une demande en ce sens.
A défaut d'entente, le locataire peut saisir le juge qui déterminera la nature des travaux ainsi que leur délai d'exécution, éventuellement sous astreinte (CA Lyon, 8e ch., 30 juin 2009)
Þ Obtenir réduction du loyer ou suspension de son paiement
Sur le fondement du même article le locataire peut saisir le juge pour demander la réduction du montant du loyer ou de suspendre, avec ou sans consignation, son paiement et la durée du bail jusqu'à l'exécution des travaux ordonnés. Avant la loi du 13 juillet 2006, la réduction judiciaire des loyers ne pouvait intervenir qu'à défaut d'exécution des travaux prescrits (Cass. civ. 3e, 20 févr. 2008).
Il peut également soulever l’absence de cause (prévu à l’article 1131 du Code civil) et faire prévaloir l’exception d’inexécution. Dans un arrêt en date du 28 avril 2009, la Cour de Cassation a retenu que l’obligation de paiement des loyers n’est pas causée tant que le logement était insalubre et impropre à sa destination.
Þ Résiliation du bail, unilatérale ou judiciaire
Le locataire peut enfin résilier le bail de manière unilatérale, en observant le délai de préavis légal de trois mois. La possibilité d’une résiliation judiciaire pour inexécution est laissée à l’appréciation souveraine du juge.
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.