Droit de vote et indivision.
L’indivision est la situation dans laquelle se trouvent des biens sur lesquels s'exercent des droits de même nature appartenant à plusieurs personnes. Le fait que, dans l'usufruit, les droits des nu-propriétaires et ceux des usufruitiers ne soient pas de même nature, fait que les dispositions sur l'indivision ne s'appliquent pas à leurs rapports.
Que l’indivision soit volontaire (indivision conventionnelle) ou subie (indivision successorale ou post-communautaire faisant suite à un divorce), elle constitue une source de difficultés juridiques considérables.
En effet si les coïndivisaires s’accordent sur les décisions, tout va bien.
En revanche il suffit que certaines tensions surgissent pour que des désaccords apparaissent, et que l’indivision conduise à l’immobilisme.
L’indivision étant susceptible de concerner toutes sortes de biens, des problématiques différentes apparaissent : être propriétaire d’un bien immobilier suscite des difficultés distinctes de celles rencontrées concernant un compte bancaire, une œuvre d’art, ou encore de droits sociaux.
Ainsi s’agissant des droits sociaux, une question majeure se pose : comment s’exerce le droit de vote pour des indivisaires de droits sociaux ?
- Parts sociales ou actions indivises et droit de vote :
L'affirmation que l'indivisaire est associé trouve sa limite dans l'organisation du droit de vote en assemblée.
On ne saurait reconnaître un tel droit à chaque copropriétaire indivis.
Pour cette raison, la loi organise une représentation de l'indivision à l'heure du vote : il n'y aura qu'un seul votant. La solution est nécessaire.
Elle est dictée dans les sociétés par actions par le principe d'indivisibilité des actions (C. com., art. L. 228-5), ce même principe s’applique pour les parts sociales à l’article 1844 al 2 du code civil. Elle favorise la prise de décision par l'assemblée.
Les indivisaires sont représentés par un mandataire unique.
Celui-ci peut être l'un des copropriétaires de la part indivise ou être choisi en dehors d'eux.
En cas de désaccord, le mandataire sera désigné en justice à la demande du plus diligent. Cette demande doit être adressée au président du tribunal de commerce statuant en référé.
Mais, comme pour l'usufruit, les statuts peuvent déroger à ces règles en prévoyant eux-mêmes les critères de choix du mandataire chargé de représenter les indivisaires.
Par exemple les statuts peuvent prévoir que le mandataire sera choisi parmi les associés non-indivisaires.
Bien que différemment formulées, les mêmes règles sont applicables dans les SA et les SCA (art L 225-110 al 2 du Code de commerce). Cependant, les statuts ne peuvent cette fois y déroger.
Les indivisaires doivent donc choisir un mandataire chargé de les représenter en assemblée. Mais, comme pour les autres sociétés, la loi ne précise pas les modalités de cette désignation.
- La désignation d’un mandataire :
La désignation du mandataire est soumise aux normes applicables en matière d'indivision. Dans le cadre d'une représentation à l'assemblée, il découle de l'interprétation des dispositions de l'article 815-3 alinéa 1 du Code civil que les modalités de désignation du mandataire varient en fonction du contenu de l'ordre du jour.
S’agissant des parts sociales, la désignation d’un mandataire unique est prévue à l’article 1844 du code civil, qui dispose que « les copropriétaires d’une part sociale indivise sont représentés par un mandataire unique, choisi parmi les indivisaires ou en dehors d’eux. En cas de désaccord, le mandataire sera désigné en justice à la demande du plus diligent ».
- Les modes de désignation du mandataire :
Dans le cas d’une désignation conventionnelle, il convient de privilégier le recours à un mandat exprès, étant précisé que la Cour de cassation a écarté en la matière le jeu du mandat tacite de l’indivision légale visé à l’article 815-3, alinéa 4 du Code civil ( Voir en ce sens, Cass, com 16 novembre 2004, n°01-10.666).
Dans le cas d’une désignation judiciaire, le Code de commerce à l’article 225-87 (pour les SA) prévoit que celle-ci intervient « par ordonnance du président du tribunal de commerce, statuant en référé ». Rien ne s’oppose à ce que, dans cette hypothèse également, le mandataire soit choisi parmi les coïndivisaires (voir en ce sens, Cass, com 10 juillet 2012, n°11-21.789).
La décision de désignation doit en effet être prise à l'unanimité des indivisaires lorsque l'ordre du jour ne relève pas de l'exploitation normale du bien indivis ou contient des résolutions susceptibles d'aboutir à un acte de disposition, c'est-à-dire celles conduisant au transfert de tout ou partie des parts ou actions détenues en indivision.
L'unanimité sera ainsi requise pour les décisions suivantes :
• la réduction du capital ;
• la dissolution de la société
• la fusion ou la scission ;
• la transformation d'actions de préférence en actions ordinaires, etc.
Dans tous les autres cas, c'est-à-dire lorsque l'ordre du jour relève de l'exploitation normale du bien indivis ou ne contient pas des résolutions susceptibles d'aboutir à un acte de disposition, la désignation du mandataire doit se faire à la majorité des deux tiers des droits indivis.
Enfin, il est à noter que si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis alors que les autres ont connaissance de la tenue de l'assemblée et ne formulent aucune opposition, l'indivisaire est censé avoir reçu un mandat tacite.
Ce dernier ne peut néanmoins couvrir que les actes d'administration et non les actes de disposition (il ne couvre donc pas le vote de résolutions portant sur une réduction du capital ou une fusion par exemple).
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Joan DRAY
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