L’article L.111-7 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit que le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution ou la conservation de sa créance.
Néanmoins, l'exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l'obligation.
Si tel est le cas, le créancier pourra faire l’objet d’une sanction. Il est donc intéressant de s’interroger sur les sanctions prononcées en cas d’adoption d’une mesure inappropriée.
- l’abus de saisie
Une mesure est jugée inutile chaque fois qu’il existe une disproportion entre celle-ci et la créance en elle-même. ».
La disproportion consiste dans l'utilisation d'une mesure inutile ou excessive pour obtenir le règlement d'une créance.
Le créancier devra donc répondre de cette disproportion puisqu’il avait la possibilité de choisir la mesure appropriée.
Néanmoins, il faut savoir que la jurisprudence considère que le droit d'user des mesures conservatoires et des voies de recours offertes par la loi ne saurait dégénérer en abus qu'en présence de la mauvaise foi ou de la faute du créancier.
Ainsi, le simple maintien d'une saisie pendant une procédure d'appel est simplement l'exercice d'une voie de droit et ne saurait constituer une faute du créancier (Cass. 3e civ., 26 janv. 1993, no 91-15.387).
En revanche, constitue un comportement fautif, le fait pour le créancier de laisser se dérouler une saisie, alors qu'il a été payé (Cass. 2e civ., 24 févr. 1982 : Gaz. Pal. 1982, pan. 204).
Enfin, la jurisprudence a rappelé de nouveau dans un arrêt récent que la mise en œuvre d’une mesure d’exécution forcée ne dégénère en abus, sauf disposition particulière, que s'il est prouvé que le créancier a commis une faute. (Cass. 2e civ., 17 oct. 2013, n° 12-25.147).
- illustrations
La jurisprudence considère que constitue une faute le fait de pratiquer une saisie immobilière pour un montant grossièrement erroné et maintenue pendant cinq ans en dépit de l'extinction de la créance (Cass. 2e civ., 5 juill. 2001, no 99-21.044), l'exercice d'une saisie-contrefaçon irrégulière permettant d'avoir connaissance d'informations sur un concurrent (Cass. 1re civ., 8 déc. 1998, no 96-16.508) ou encore le fait de poursuivre une procédure d'exécution après l'ouverture d'une procédure collective (Cass. com., 28 sept. 2004, no 02-15.818).
En revanche, ne constitue pas une faute le fait de refuser une proposition de rachat faite par le débiteur et aboutissant à imposer au créancier poursuivant une remise partielle de dette (Cass. 2e civ., 18 mars 2004, no 02-11.898).
Enfin, il faut savoir que la faute imputable au créancier peut résulter d'une simple imprudence fautive ou erreur grossière, ou plus radicalement d'une véritable intention de nuire (Cass. com., 20 janv. 1976, no 74-13.921).
- la cessation de la mesure inutile ou abusive
L'article L. 121-2 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit la possibilité pour le juge d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive.
L’objectif est donc de faire cesser l’atteinte aux droits du débiteur.
Néanmoins, il faut savoir que si le juge prononce la mainlevée d’une mesure, cela n’implique pas nécessairement qu’il y ait une faute du créancier et donc que l’on puisse engager la responsabilité de ce dernier.
En revanche, le juge peut condamner le créancier à réparer le préjudice causé par la mesure, chaque fois qu'un texte l'aura prévu.
En effet, la Cour de Cassation a considéré que l’article 73 de la loi no 91-650 du 9 juillet 1991 (L. 512-2) n'exige pas, pour son application, la constatation d'une faute. Par conséquent, « lorsque la mainlevée a été ordonnée par le juge, le créancier peut être condamné à réparer le préjudice causé par la mesure conservatoire » (Cass. 2e civ., 29 janv. 2004, no 01-17.161).
- La sanction de l'abus de saisie
En cas d’abus de saisie, c’est à dire en cas d’adoption d’une mesure d'exécution ou de conservation de la créance constituant une faute de la part du créancier, peut donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts au débiteur (CPC exéc., art. L. 121-2).
Le débiteur pourra donc engagé une action sur le fondement de la responsabilité délictuelle (article 1382 du code civil) en vue d’obtenir des dommages-intérêts.
Il faut pour cela prouver l’existence d’une faute du créancier et d’un dommage causé au débiteur, ainsi que le lien de causalité de la faute et du dommage.
Néanmoins, il est nécessaire de préciser qu’en matière de saisie immobilière, la Cour de cassation exige une condition supplémentaire.
En effet, pour allouer au débiteur des dommages-intérêts en raison de l'abus commis par le créancier dans la poursuite de la procédure de saisie immobilière, il ne faut pas se fonder uniquement sur le caractère injustifié de la mesure.
Ainsi, la Cour de cassation a considéré que l'exécution immobilière ne peut, hors les cas de fraude, être constitutive d'un abus si son irrégularité ou son inutilité n'ont pas été dénoncées par le débiteur saisi, régulièrement sommé, avant l'adjudication définitive (Cass. 2e civ., 18 sept. 2003, no 01-13.902).
C’est le juge de l’exécution qui connait des demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageables des mesures d’exécution forcée ou des mesures conservatoires (Cass. 2e civ., 22 févr. 2012, no 11-12.137).
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Joan DRAY
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