L’extension de procédure « dans les procédures collectives »:
La loi du 26 juillet 2005 consacre la possibilité reconnue par la jurisprudence d’étendre la procédure collective ouverte à l’encontre d’une personne à une autre personne qui ne remplit pas nécessairement les conditions de la loi de sauvegarde.
L’intérêt de l’extension de procédure est d’attraire à la procédure collective déjà ouverte à l’encontre d’un débiteur un autre patrimoine et donc des actifs supplémentaires.
En conséquence, l’extension de procédure est bien souvent en faveur des créanciers qui disposent dès lors d’une plus grande chance de recouvrer leur créance.
L’ordonnance de 2008 a énuméré strictement les personnes pouvant demander cette extension. Désormais, les titulaires de l’action sont clairement énumérées par l’article L621-2 du code de commerce qui a vocation à s’appliquer par renvoie à la procédure de redressement et de liquidation judicaire. Il s’agit de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du Ministère public ou du tribunal d’office.
Par ailleurs il convient de souligner que le tribunal compétent pour statuer sur l’extension est celui ayant ouvert la procédure à étendre.
Pour étudier cette question, il convient de voire dans un premier temps les causes d’extension (I) avant de voir le régime de l’extension (II).
I- Les causes d’extension de patrimoine :
Selon l’article L621-2 du code de commerce, il n’y a que deux causes d’extension de procédure : la fictivité d’une personne morale et la confusion des patrimoines.
Une société est fictive dès lors qu’il s’agit d’une société de façade crée de manière artificielle sans aucune autonomie juridique ni fonctionnement propre.
La fictivité suppose ainsi l’absence d’un élément constitutif de la personne morale, le plus souvent l’affectio societatis. Comme le précise un arrêt, « La fictivité d’une société, qui doit s’apprécier à la date de sa création, peut être révélée par des faits postérieur à sa constitution ; une société apparaît fictive lorsqu’elle est dépourvue de toute autonomie décisionnelle et notamment de la faculté de décider…de sa liquidation ou de sa survie, cette faculté appartenant en fait au véritable maître de l’affaire » (Affaire Metaleurop Com 19 avril 2005 JCPE 2005 n° 271)
En ce qui concerne la confusion des patrimoines, la jurisprudence utilise en réalité deux critères :
Tout d’abord, un critère classique, commun aux personnes physiques et morales qui est l’imbrication inextricable des comptes.
Ainsi, il y a confusion de patrimoines lorsque des personnes se sont comportées de telle manière que l’actif et le passif de chacune sont imbriqués dans ceux de l’autre sans qu’on puisse les séparer créant un « désordre généralisé des comptes » (com 24 octobre 1995 Bull. Joly 1996 p 158 note P Scholer).
Ensuite, le second critère utilisé est propre aux personnes morales. Il s’agit du critère des relations financières anormales.
Ainsi, la confusion est caractérisée par l’existence de flux financiers anormaux ou des relations financières anormales c'est-à-dire quand il existe entre deux personnes morales notamment au sein d’un groupe de sociétés des rapports financiers sans contrepartie ou à l’avantage systématique de la même personne et résultant du détournement des ressources d’une vers l’autre.
Depuis notamment l’affaire Metaleurop du 19 avril 2005, la Cour de cassation utilise plutôt l’expression de relations financières anormales (Com 19 avril 2005 JCPE 2005 n° 271). Dans ces espèces, elle avait du à se prononcer sur des opérations à sens uniques, qui ne constituaient pas véritablement des flux financiers. C’est pour cette raison qu’elle a utilisé la notion de relations financières anormales.
En effet, la notion de relations financières anormales étant plus large, elle permet de prendre en compte des situations plus complexes dans lesquelles il n’existe pas à propos parler de flux financiers.
Cette notion va ainsi permettre de sanctionner des avances sans remboursements ultérieures, des abandons de créances, une renonciation à percevoir des loyers, le fait qu’une société, titulaire contre une autre d’une créance importance, ait omis de la déclarer au passif de la seconde (Com 16 juin 2009 Gaz Proc coll 2009/4 p 4 note F Reille).
II- Le régime de l’extension de procédure à une autre personne :
En l’absence de précision dans les textes, c’est la jurisprudence qui est venu préciser les conséquences de l’extension de procédures.
Le régime de l’extension est dominé par un principe directeur : le principe d’unicité de la procédure.
Autrement dit, la procédure collective déjà ouverte est étendue, avec sa date de cessation des paiements, à toutes les personnes morales concernées, ce qui permet le paiement du passif commun sur un actif élargi.
La procédure collective reste dès lors régie par la loi en vigueur lors du jugement d’ouverture même si l’extension est postérieure à l’entrée en vigueur d’une loi nouvelle.
Dans un arrêt de la Chambre commerciale du 30 juin 2009, la Cour de Cassation a affirmé que l’extension de procédure n’avait pas pour effet de faire disparaitre la personnalité juridique de chacune des sociétés dont le patrimoine a été confondu.
En conséquence, elle a jugé que la déclaration de créance effectuée à l’égard du débiteur de la procédure initiale vaut à l’encontre des patrimoines inclus par la suite par l’extension (Com 1er oct 1997).
Par ailleurs, la Cour de cassation dans un arrêt en date du 17 février 1998 a posé la règle selon laquelle en cas d’extension de procédure il ne peut y avoir qu’unicité des solutions pour toutes les personnes concernées par la procédure c’est à dire qu’il ne peut y avoir qu’un seul plan.
Mais le principe d’unicité comporte d’importantes et nécessaires limites :
Tout d’abord le jugement d’extension ne rétroagit pas à la date d’ouverture de la première procédure.
En conséquence, les créanciers de la personne à laquelle la procédure est étendue ne sont pas soumis à la règle de l’interdiction des poursuites individuelles avant la date du jugement d’extension (com 28 sept 2004)
De même, puisque le jugement d’extension est assimilé à un jugement d’ouverture et qu’il ne rétroagit pas à la date du jugement ouvrant la procédure initiale, les créances nées du chef de la personne à laquelle la procédure a été étendue sont des créances antérieures dès lors qu’elles sont nées avant le jugement d’extension et postérieurement au jugement d’ouverture.
Enfin, il a pu être jugé que la condamnation d’un dirigeant à supporter une partie du passif de la société qu’il dirigeait ne peut être étendue au passif des autres sociétés avec lesquelles il y a eu confusion.
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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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