L'article L. 137-2 nouveau du Code de la consommation dispose : « L'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ».
Se pose alors une question de la charge de la preuve : le prêteur doit-il prouver que ce délai ne s’est pas écoulé ou bien est-ce à l’emprunteur de montrer que tel est bien le cas ?
Cette question est essentielle, car celui qui n’arrive pas à prouver ses allégations va indéniablement échouer en justice.
Par une décision en date du 3 février 2011 (Cass. 1re civ., 3 févr. 2011, n° 09-71.693, F-D : JurisData n° 2011-001117 ) la Cour de Cassation a rappelé que c’est à l'emprunteur qui invoque la fin de non-recevoir tirée de la forclusion biennale de l'action en paiement du prêteur d'en justifier.
En l’espèce, une banque a intenté une action en recouvrement d’un crédit de consommation à l’encontre de l’emprunteur.
Ce dernier avait soutenu que le prêteur doit apporter la preuve de l’absence de forclusion biennale de l’action en recouvrement, au moyen de l’historique du compte de l’emprunteur et de la date du premier impayé.
La Cour d’Appel, s’appuyant sur ce raisonnement a ainsi débouté la banque de ses prétentions car cette derniere ne pouvait produire un historique complet du compte.
Cependant, sur pourvoi, la Haute Juridiction casse et annule l’arrêt attaqué au visa des articles L. 311-37 du Code de la consommation et 1315 du Code civil.
Pour que l’action de la banque puisse aboutir, la preuve de l’absence de forclusion n’était pas requise. C’était au contraire à l’emprunteur de démontrer que le délai de deux ans était acquis.
Cette solution est conforme aux dispositions de l’article 1315 du Code Civil, qui, reprenant l’ancien adage « « Actori incumbit probatio. Reus excipiendo fit actor » dispose que « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ».
Si cette règle de preuve est indiscutable, il n’en va pas ainsi si l’on doit la concilier avec les dispositions du Code de la consommation qui exige la preuve du montant et de l’existence de la créance par l’établissement de crédit. Cet arrêt permet de poser les limites de la preuve de l’existence et illustre le fait que, si le consommateur bénéficie d’une protection accrue en raison de sa qualité, cela n’emporte pas pour autant renversement des règles générales en matière de la charge de la preuve.
Cette charge de la preuve pesant sur l’emprunteur et non sur le prêteur a déjà été affirmée (Cass. 1re civ., 9 déc. 1997 : Bull. civ. 1997, I, n° 365) par des décisions précédentes.
Il convient également de citer un arrêt important de la Cour de Cassation qui précise que: "en cas de réaménagement ou de rééchelonnement des modalités de règlement des échéances impayées d'un crédit à la consommation consenti à plusieurs emprunteurs, le report du point de départ du délai biennal de forclusion, n'est pas opposable à l'emprunteur, fût-il tenu solidairement, qui n'a pas souscrit l'acte de réaménagement ou de réechelonnement, à moins qu'il n'ait manifesté la volonté d'en bénéficier".
'Cass. Civ. 1er 11 février 2010 pourvoi n° n08-20-800 )
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements complémentaires.
Maître Joan DRAY