Interdiction de la vente ou de la location séparée d’un garage
Le droit de copropriété compte certaines particularités dont il ne faut pas sous-estimer la portée.
Il convient notamment de souligner l’équilibre à assurer entre les droits des propriétaires sur les parties privatives, et celles sur les parties communes, des droits qui doivent être évalués dans le contexte d’une copropriété.
Ce point important a été mis en lumière par un arrêt de la Cour de Cassation en date du 9 juin 2010 (Cass. 3e civ. 9 juin 2010 n° 09-14.206 (n° 716 FS-PB), Gouteyron c/ Sté Daniele).
En l’espèce, une SCI était propriétaire d’un immeuble, ainsi que d’une cave et d’un garage. Suite à l’acte authentique de vente, elle a cédé ces derniers à des acquéreurs qui entendaient s’installer dans l’immeuble, à l’exception du garage. La SCI a décidé de vendre ledit garage séparément à une autre SCI qui n’était pas copropriétaire. Les premiers acquéreurs ont alors assigné la SCI venderesse en justice pour obtenir la nullité de cette vente et pour que une nouvelle vente soit prononcée à leur profit.
Ils se sont prévalus des stipulations du règlement de copropriété interdisant la vente ou la location à des personnes étrangères à la copropriété.
La Cour d’Appel les a débouté de leurs prétentions, estimant « que toute clause du règlement de copropriété restreignant le droit pour un copropriétaire de disposer de son lot est réputée non écrite, sauf si cette restriction est justifiée par la destination de l'immeuble "telle qu'elle est définie aux actes" ; qu'en l'espèce, rien n'est mentionné dans les actes versés aux débats sur ce point ; que l'article 2 du règlement de copropriété est donc réputé non écrit ».
Ce raisonnement se fonde sur l’article 8, alinéa 2, de la loi 65-557 du 10 juillet 1965.
Cependant la Cour de Cassation casse et annule l’arrêt rendu pour manque de base légale, au motif qu’il appartenait à la juridiction d’appel de « rechercher, comme il le lui était demandé, si ces restrictions n'étaient pas justifiées par la destination de l'immeuble telle que définie par ses caractères ou sa situation ».
Il convient de noter que la Haute Juridiction n’a pas infirmé le raisonnement même de la Cour d’Appel, mais rappelle simplement que la destination de la copropriété, qui seule peut justifier des restrictions des droits sur les parties privatives, résulte non seulement des actes juridiques mais également de ses caractères et de sa situation.
L’appréciation de cette destination est alors on concreto, en fonction de chaque immeuble, et nécessite une analyse des la situation factuelle, qui peut changer au cours du temps et non seulement à partir des stipulations des actes juridiques, pouvant s’écarter de la réalité.
Cette solution est parfaitement conforme à l’article précité, qui dispose que « Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, telle qu'elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation ».
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements complémentaires.
MAître Joan DRAY