Il y a inaptitude du salarié lorsque le médecin du travail reconnait l’impossibilité pour un salarié d’exercer sa mission de travail en toute sécurité pour sa santé.
Avant de licencier un salarié inapte, l’employeur doit apporter la preuve qu’il ne peut être reclassé, ou bien son refus de le réintégrer ne doit pas être abusif.
Dans le cas contraire, le licenciement prononcé entre dans le champ de la prohibition des sanctions fondées sur l'état de santé ou le handicap.
Le principe ressort de l’article L 1132-1 du Code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de son état de santé ou de son handicap sauf inaptitude constatée par le médecin du travail.
Mais l’employeur peut licencier le salarié inapte s'il justifie soit de l'impossibilité de le reclasser à un autre poste soit du refus abusif par le salarié de l'emploi qui lui était proposé, mais seulement dans ces cas (art. L 1226-12).
L’obligation de reclassement concerne les salariés liés à l'employeur par un CDI come ceux qui le sont par un CDD (Cass. soc., 8 juin 2005).
En tout état de cause, le licenciement prononcé en méconnaissance de l'obligation de justifier l'impossibilité de proposer un autre emploi et suite au refus du salarié du nouvel emploi proposé ouvre droit à réintégration avec maintien des avantages acquis (art. L 1226-15).
En conséquence, l'inaptitude physique du salarié ouvre, à défaut de reclassement, la voie du licenciement ; nous verrons ces deux étapes avant de mentionner la nouvelle règle applicable aux salariés en CDD, issue d’une loi du 17 mai 2011.
La constatation de l’inaptitude du salarié
Cette inaptitude du salarié à l’emploi pour lequel il a été embauché ne peut être appréciée que par le médecin du travail.
En cas d’absences répétées du salarié, ou si son absence pour maladie a duré au moins 3 mois, l'employeur doit, dans les 8 jours suivant son retour, lui faire passer une visite médicale dite de reprise.
Pour prononcer l’inaptitude du salarié, le médecin du travail devra procéder à une étude du poste et des conditions de travail du salarié, ainsi qu’à deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines (art. R 4624-31 du Code du travail).
Il est possible de se passer de cette procédure uniquement si le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité, ou pour celles de tiers (même article).
Précisons que même si le médecin ne formule pas de proposition quant au reclassement, l’employeur ne reste pas moins tenu à l’exécution de cette obligation.
L’obligation de reclassement
Le Code du travail créé un droit au reclassement au profit du salarié physiquement inapte en raison d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle (C. trav., art. L. 1226-10).
En toute logique, l’employeur ne peut se prévaloir des recommandations d’un médecin autre que du travail pour se libérer de son obligation de reclassement (CA Paris, 21e ch. B, 25 juin 2009, n° S 07-05612).
Cette obligation de reclassement faite à l’employeur est impérative.
Ainsi, ni la cessation d'activité de l'entreprise (Cass. soc., 7 mars 2007, pourvoi n° 05-43872), ni l'action en résiliation judiciaire déjà introduite par le salarié (Cass. soc., 30 mai 2007, pourvoi n° 06-41652) ne constituent des motifs d'exonération de l'obligation de reclassement du salarié inapte physiquement pesant sur l'employeur.
Pour que le reclassement du salarié puisse intervenir, il faut que son inaptitude soit constatée par le médecin du travail au terme de 2 visites médicales.
Le salarié ne peut donc pas accepter une proposition de reclassement avant la visite de reprise (visée ci-dessus), elle serait dépourvue de toute portée (Cass. soc., 28 mars 2006, pourvoi n° 04-44895).
La jurisprudence a récemment renforcé sa position, en énonçant que l’employeur qui convoque le salarié à un entretien préalable à son licenciement, en invoquant la nécessité de supprimer le poste auquel il était devenu inapte, élude l'application des dispositions légales protectrices du salarié qui n'avait été déclaré inapte qu'au terme d'une seule visite de reprise (Cass. soc., 14 décembre 2011, n° 10-19.631).
L’employeur dispose d’un délai d’un mois à compter de la visite de reprise pour procéder au reclassement (L 1226-11), ce délai ne pouvant être suspendu (Cass. soc., 25 mars 2009).
Le cadre dans lequel l’employeur doit chercher à reclasser le salarié devenu inapte est très large.
Le niveau de la recherche doit être, non seulement l'entreprise, lorsqu'elle comporte plusieurs établissements (Cass. soc., 14 févr. 2007, pourvoi n° 05-44807), mais encore le groupe lorsque l'entreprise s'inscrit dans un tel ensemble (Cass. soc., 9 janv. 2008, pourvoi n° 06-44407) ; voire même sous certaines conditions les sociétés sous contrat de franchise (Cass. soc., 20 févr. 2008, pourvoi n° 06-45335).
L’employeur peut aussi trouver une solution alternative, ainsi l'employeur satisfait à l'obligation de reclassement dès lors qu'il a procédé aux transformations du poste initialement occupé pour le rendre compatible à l'état de santé de la salariée et conforme aux préconisations du médecin du travail (Cass. soc., 02-06-2010, n° 08-45.020).
Enfin, la preuve de l'exécution de l'obligation de chercher un reclassement incombe à l'employeur (Cass. soc., 16 juin 1998).
La résiliation du contrat de travail
-  Pour un contrat de travail à durée indéterminée  Â
La résiliation d'un commun accord du contrat de travail après que le médecin du travail ait rendu un avis d'inaptitude du salarié est illégale, et entachée de nullité (Cass. soc., 29-06-1999, n° 96-44.160).
L’employeur ne peut non plus prendre acte de la rupture en raison de l’inaptitude du salarié, il s’agirait alors d’un licenciement (Cass. soc., 9 mai 1995, pourvoi n° 91-43749).
Ce n’est donc que si l’employeur démontre soit l'impossibilité dans laquelle il se trouve de le reclasser, soit le refus du salarié d'accepter le poste proposé, qu’il pourra le licencier (C. trav., art. L. 1226-12).
L'employeur a l'obligation de justifier la rupture du contrat.
Dans le cas contraire, l'absence de signification des motifs s'opposant au reclassement du salarié inapte à son emploi ouvre droit pour ce dernier à des dommages et intérêts réparant le préjudice nécessairement subi (Cass. soc., 06-05-1998, n° 95-40.579).
Enfin, c’est à l’employeur qu’il incombe de prouver l’impossibilité de reclasser le salarié (Cass. soc., 7 juill. 2004).
Concernant le refus du salarié d’accepter le poste, il est pleinement justifié lorsque les propositions de l'employeur ne sont pas conformes aux prescriptions légales, et aucun grief ne pourra être tiré de ce refus à l'encontre du salarié.
Ainsi, la justification du refus sera appréciée au cas par cas par les juges ; mais même un refus qualifié d’abusive n’aura pas pour conséquence de rendre le salarié responsable de la rupture du contrat de travail (Cass. soc., 26 mars 1996, pourvoi n° 93-40624).
La rupture ouvre droit à l'indemnité légale de licenciement ou, si elle est plus favorable au salarié et si les clauses de la convention ne l'excluent pas, à l'indemnité conventionnelle (Cass. soc. 11-10-1994 n° 91-41.317).
-     Pour un contrat de travail à durée déterminée.
Il existait, dans ce cas, une situation de blocage qu’une loi du 17 mai 2011 est venue régler.
En effet, il n'existait aucune disposition légale autorisant l'employeur à rompre le CDD d'un salarié déclaré inapte et dont le reclassement dans l'entreprise s'avérait impossible.
L’impossibilité de reclasser le salarié ne constituait pas un motif de rupture anticipée du CDD (Cass. soc. 13-11-1986 n° 84-41.803).
L’inaptitude du salarié ne constituait pas non plus un cas de force majeure autorisant son licenciement (Cass. soc. 12-7-1999 n° 97-41.131).
Le salarié devait donc être maintenu dans l'effectif de l'entreprise jusqu'au terme de son contrat, cependant sans avoir droit à rémunération.
En conséquence, si l’employeur rompait néanmoins le contrat par anticipation, le salarié ne pourra que demander réparation du préjudice subi et non les rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat (Cass. soc. 18-11-2003 n° 01-44.280).
Ce peut être par exemple la perte de droits à la retraite (Cass. soc. 26-10-2011 n° 10-20.991).
La rupture anticipée du CDD pour inaptitude physique du salarié et impossibilité de reclassement de l'intéressé est donc désormais prévue, par l’article 49 de la loi 2011-525 du 17-5-2011.
A loi modifie les articles L 1243-1 et L 1243-4 du Code du travail afin de permettre à l'employeur de rompre le contrat à durée déterminée, avant l'échéance de son terme, en cas d'inaptitude constatée par le médecin du travail.
Dans ce cas, la rupture du CDD ouvrira droit, pour le salarié, à une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 du Code du travail.
La loi ajoute ainsi un nouveau cas de rupture anticipée du CDD à l'initiative de l'employeur à ceux déjà prévus par ces textes, à savoir la faute grave et la force majeure.
A défaut de reclassement ou de rupture du CDD dans le délai d'un mois suivant la constatation de l'inaptitude l'employeur est tenu de reprendre le versement du salaire.
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Joan DRAY
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