Logement décent : obligations du bailleur et recours du locataire :
En France, tout logement occupé par un locataire doit être décent.
Un logement décent est un logement qui ne présente pas de risques manifestes pour la sécurité physique et la santé des occupants et qui est doté des équipements habituels permettant d’y habiter normalement.
Ces principes permettent d’évaluer la conformité d’un logement aux caractéristiques de décence.
Il convient de rappeler que les caractéristiques de décence sont définies par deux textes de loi : l’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 modifiée par l’article 187 de la Loi Solidarité et Renouvellement Urbains du 13 décembre 2000 et le décret d’application n°2002-120 du 30 janvier 2002.
Cette obligation de délivrance d'un logement décent lorsqu'il s'agit de l'habitation principale du preneur s'applique au bailleur de locaux à usage commercial et d'habitation. (3e Chambre Civile 14 octobre 2009, pourvoi n°08-10955 et 08-17750).
Cet article a pour objet de rappeler les obligations du bailleur en la matière avant de voir les recours du locataire en cas de logement indécent.
1/ Les obligations du bailleur :
- Un logement décent au sens de la loi SRU :
Le bailleur est tenu d’assurer au locataire un logement décent, ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à sa sécurité physique ou à sa santé.
Ainsi, le propriétaire doit s'assurer que le logement qu'il met en location répond à toutes les mesures de sécurité et de salubrité notamment que le gros œuvre est en bon état d’entretien et de solidité, que les réseaux et branchements d'électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d'eau chaude doivent être conformes aux normes de sécurité.
Par ailleurs, le logement doit disposer au moins d'une pièce principale ayant :
- soit une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres
- soit un volume habitable au moins égal à 20 mètres cube.
Pour être « décent », le logement doit aussi être équipé des éléments de confort le rendant conforme à l'usage d'habitation.
Ainsi, le logement doit notamment comporter une installation permettant un chauffage normal, une installation d'alimentation en eau potable et une évacuation des eaux usées, un équipement pour la toilette (baignoire ou douche) permettant de garantir l'intimité personnelle…..
- Illustrations de non conformité aux normes de décence :
A ainsi été jugé non conforme, la présence dans le logement de conducteurs à nus non isolés conduisant à des risques d’électrocution voire d’incendie des prises de courant (CA Paris, 6° ch C, 17 mars 2009, n° 06/21484, Cheruel et a. c/ Cheniti).
De même, la Cour d’appel de Chambéry, dans un arrêt du 20 octobre 2011, a confirmé la condamnation d’un bailleur à réparer désordres structurels dus à l'humidité dans le logement de nature à causer un trouble de jouissance à son locataire (CA Chambéry, 2e ch., 20 oct.. 2011, SA Halpades d'HLM Groupe Odes c/ Samba Sakho : JurisData n° 2001 -025219).
En l’espèce, il s’agissait des moisissures du plafond de la salle de bains, décollement et gonflement de la peinture dans la cuisine, le salon et une chambre.
2/ Les recours du locataire :
Outre, la résiliation ou la résolution du bail, le locataire pourra obtenir la réduction ou la dispense de loyer jusqu'à l’accomplissement des travaux (CA Rouen, 4 sept. 2007 : JurisData n° 2007-342577).
De même, le locataire pourra demander que les travaux nécessaires soient effectués par le bailleur et obtenir des dommages et intérêts notamment pour les troubles de jouissance que lui causent des travaux qui auraient dû être préalables à son entrée dans les lieux (CA Montpellier, 2e ch. B, 24 sept. 2002 : JurisData n° 2002-197707).
Par ailleurs, la Cour d’appel d’Amiens, dans un arrêt du 21 octobre 2010 a jugé que « L'exception d'inexécution est justifiée, dès lors que le locataire était dans l'impossibilité de disposer d'une quelconque jouissance des lieux en raison de leur indécence et de leur dangerosité » (CA Amiens, 1re ch., 21 oct. 2010, Ouadah c/ SCI Shams : JurisData n° 2010-025978).
En l’espèce, le logement était inhabitable compte tenu notamment d'une électricité dangereuse, d'une humidité importante et de coupures d'eau prolongées.
Ces éléments d’indécence auxquels s’ajoutait la mauvaise foi du bailleur qui connaissait le mauvais état de son logement, justifiaient, selon la Cour d’Appel, la suspension des paiements des loyers du jour de la mise en demeure adressée au bailleur d'exécuter les travaux jusqu'au départ du locataire.
Enfin, le propriétaire encourt des sanctions pénales notamment pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui (CA Paris, 6° ch C, 17 mars 2009, n° 06/21484, Cheruel et a. c/ Cheniti).
En l'espèce, il résultait des conclusions d'un rapport d'expertise que les occupants de la maison étaient soumis « des dangers de brûlures graves sur conducteurs à nus non isolés pouvant entraîner un décès par électrocution ainsi que des risques d'incendie sur les prises de courant ».
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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