Mise en demeure préalable en cas de défaillance de l'emprunteur non commerçant

Publié le Modifié le 13/08/2015 Vu 11 450 fois 0
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La Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a, dans un arrêt en date du 3 juin 2015, précisé que la déchéance du terme ne peut être déclarée acquise pour le créancier sans la délivrance d'une mise en demeure, qui précise le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle. En l'espèce, il s'agissait d'une société qui avait consenti à un individu un prêt personnel remboursable par mensualités. L'emprunteur a cessé ces paiements, la société a alors fait prévaloir la déchéance du terme par une lettre recommandée avec avis de réception. La société a, par la suite, assigné en remboursement l'emprunteur.

La Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a, dans un arrêt en date du 3 juin 2015, précisé que la

Mise en demeure préalable en cas de défaillance de l'emprunteur non commerçant

La Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a, dans un arrêt en date du 3 juin 2015, précisé que la déchéance du terme ne peut être déclarée acquise pour le créancier sans la délivrance d'une mise en demeure, qui précise le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, il s'agissait d'une société qui avait consenti à un individu un prêt personnel remboursable par mensualités.

L'emprunteur a cessé ces paiements, la société a alors fait prévaloir la déchéance du terme par une lettre recommandée avec avis de réception.

La société a, par la suite, assigné en remboursement l'emprunteur.

La Cour d'Appel a accueilli la demande de la société, en retenant que selon les stipulations contractuelles le prêteur n'était pas tenu de mettre en demeure l'emprunteur préalablement au constat de la déchéance du terme.

La Cour de Cassation a censuré la décision des juges du fond et a condamné la société.

La Haute Juridiction a rendu un attendu de principe dans lequel elle a décidé que " si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dipose le débiteur pour y faire

obstacle. "

La Cour de Cassation a estimé qu'il n'existait pas de stipulation expresse, qui dispensait le créancier de mise en demeure, ainsi la Cour d'Appel a violé les articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil.

Il est admis la déchéance du terme par le prêteur mais les conséquences financières pour l'emprunteur sont réglementées.

                    I. Le principe de la déchéance du terme

Il implique que le prêteur puisse imposer la résolution du contrat et exiger le remboursement immédiat du capital restant dû.

Il concerne aussi bien les crédits à la consommation( art. L. 311-30 du Code de la consommation) que les prêts immobiliers ( art. L. 312-24 du Code de la consommation).

En régle générale, les conventions contiennent une clause de déchéance du terme qui ne peut jouer que si le défaut de paiement est constaté, ce qui nécessite que le créancier adresse au débiteur une sommation ou un commandement avant de pouvoir agir.

Le juge peut, à l'occasion de cette action, accorder des délais de paiement à l'emprunteur et suspendre ainsi les effets de la demande de résolution du contrat (CA Paris, 29 juill. 1893).

Il a été précisé que ne caractérise pas la renonciation d'un établissement financier à se prévaloir de la déchéance, les prélèvements qu'il effectue postérieurement à cette dernière et qui ont vocation à réduire sa créance (Cass. 1re civ., 3 juill. 2008).

Aux termes de l'article 1899 du code civil relatif au prêt de consommation, « le prêteur ne peut pas redemander les choses prêtées avant le terme convenu ».

L'obligation de restitution du débiteur est affectée d'un terme suspensif, ce qui reporte son exigibilité. En cas de déchéance, cette obligation devient exigible immédiatement.

La mise en oeuvre des clauses résolutoires nécessite une mise en demeure préalable en l'absence de clause contraire (Civ. 1re, 3 févr. 2004).

Pourtant, la déchéance du terme n'est pas à proprement parler une résolution du contrat (Com. 12 juill. 1993).

La clause de déchéance du terme dans un contrat de prêt de somme d'argent est néanmoins proche d'une clause résolutoire en ce qu'elle permet au créancier d'obtenir une restitution de façon anticipée en cas d'inexécution du débiteur.

Il apparait logique qu'elles soient soumises au même régime.

Or, en l'espèce la Cour de Cassation a considéré que, même si dans le contrat de pret la défaillance de l'emprunteur non commerçant a été prévu comme mettant fin au terme il est nécessaire de délivrer une mise en demeure au débiteur, en lui précisant le délai dans lequel il peut agir pour s'y opposer (Cass. 1re civ., 3 juin 2015).

         II. Les conséquences de la résolution

En cas de remboursement immédiat du capital restant dû, tant pour les crédits à la consommation ( art. L. 311-24 du Code de la consommation) que pour les prêts immobiliers ( art. L. 312-22 du Code de la consommation), l'assiette de la créance se limite, pour les intérêts, aux intérêts échus et non payés, interdisant au prêteur de réclamer les intérêts à échoir.

Les sommes dues produisent des intérêts de retard au taux conventionnel jusqu'à leur règlement définitif et courent à compter de la sommation de payer à défaut d'une clause contractuelle prévoyant leur point de départ ( CA Paris, 8e ch. B, 25 oct. 1991).

Le taux conventionnel s'impose aux parties et au juge (Cass. 1re civ., 13 juin 1982).

Le prêteur peut exiger de l'emprunteur défaillant une indemnité, compensatrice de son préjudice.

Son montant est limité, pour les crédits à la consommation, à 8 % du capital restant dû au jour de la défaillance ( art. D. 311-7 du Code de la consommation) et, pour les prêts immobiliers ( art. R. 312-3 du Code de la consommation) à 7 % de ce même capital. L'indemnité n'est due que si le prêteur demande la résolution du contrat (Cass. 1re civ., 3 juill. 1993) et reste soumise au pouvoir de révision du juge dans les conditions de l'article 1152 du Code civil.

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Joan Dray

Avocat à la Cour

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