En cas d'arrêt de travail médicalement constaté dû à un accident du travail et pour compenser votre perte de salaire, vous pouvez percevoir des indemnités journalières.
En revanche, l'article L451-1 du Code de la Sécurité Sociale (CSS) pose le principe d'une réparation forfaitaire du dommage subi par la victime d'un accident de travail, cantonnée au strict cadre de règles ad hoc.
Concrètement, l'accidenté du travail ne pourra prétendre à d'autre dédommagement que celui octroyé par sa Caisse, et ce sans possibilité de recourir à l'encontre d'un éventuel responsable, ne serait-ce qu'au titre de l'indemnisation de ses préjudices non réparés par les prestations sociales (art L451-1 CSS - Cass 2ème civ 22 février 2007 n° 05-11.811)..
Toutefois, les articles L452-5 et L452-1 CSS posent des exceptions à ce principe en cas de comportements fautifs graves imputables à l'employeur.
Ainsi, la faute intentionnelle ou inexcusable de l'employeur ou de l'un de ses préposés pourra donner lieu à une indemnisation complémentaire de la victime.
D'une part ils reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues (art L452-2 CSS).
D'autre part, indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.
Si la victime est atteinte d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation (art 452-3 al 1 CSS).
A titre liminaire, on rappellera que pour bénéficier du régime de la faute inexcusable, la victime devra avoir la qualité de salarié et devra avoir obtenu la reconnaissance de sa maladie professionnelle par la sécurité sociale avec une notification d'un taux IPP.
Cet article a pour objet de préciser la notion de faute inexcusable avant de donner quelques illustrations jurisprudentielles.
1/ La notion de faute inexcusable :
Il convient de préciser que la faute dont il s’agit ici est la faute inexcusable de l’employeur ou de ses substitués dans la direction.
En ce qui concerne les substitués, la jurisprudence a précisé que la faute reprochée doit avoir été commise dans l’exercice du rôle de direction (Cass soc 2 mars 1988 n° 86-14.749 : JurisData n° 1988-000328).
Faute de défaut légale de la faute inexcusable, la jurisprudence est venu préciser la notion de faut inexcusable.
Ainsi, l’assemblée plénière dans un arrêt du 24 juin 2005 a considéré que la faute inexcusable est constituée par le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité « lorsque l’employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pris les mesure nécessaire pour l’en préserver » (Cass ass plén 24 juin 2005, n° 03-30.038).
Ainsi, il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié, il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée, alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage (Cass ass plén 24 juin 2005, n° 03-30.038).
2/ Illustrations jurisprudentielles :
Il a été jugé que l'employeur aurait dû avoir conscience du danger lié à un escalier qui n'était pas aménagé de manière à prévenir les risques de chute, et il n'avait pas pris les mesures nécessaires pour en préserver les salariés (Cass 2ème civ 12 juillet 2007 n° 06-17.144).
De même, la Cour de cassation a jugé que l’employeur commet une faute inexcusable envers un agent d'entretien ayant chuté dans un escalier que son nettoyage avait rendu humide en ne lui ayant pas donné pas des chaussures adaptées (Cass 2ème civ 9 juillet 2009 n° 08-16.241 : JurisData n° 2009-049283).
Par ailleurs, la jurisprudence a admis que le suicide du salarié peut être du à une faute inexcusable de l’employeur ou d’un substitué.
Aussi, un accident qui se produit à un moment où le salarié ne se trouve plus sous la subordination de l'employeur constitue un accident de travail dès lors que le salarié établit qu'il est survenu par le fait du travail.
Tel est le cas lorsque le salarié rapporte la preuve de ce que sa tentative de suicide, à son domicile, alors qu'il était en arrêt de maladie, était en lien avec ses conditions de travail.
A cet égard, la Cour de cassation a jugé les juges, qui ont retenu que l'équilibre psychologique du salarié avait été gravement compromis à la suite de la dégradation continue des relations de travail et du comportement de l'employeur, ont caractérisé le fait que celui-ci avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et qu'il n'avait pas pris les mesures nécessaires, et ont pu en déduire qu'il avait commis une faute inexcusable (Cass 2ème civ 22 février 2007 n° 05-13.771 : JurisData n° 2007-037472) .
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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