Le bailleur qui loue à bail un logement est tenu de respecter certaines obligations et notamment celle de délivrer un logement décent à son locataire.
En cas de non respect de cette obligation, le bailleur s’expose à des sanctions.
Plusieurs questions se posent alors :
Que recouvre la notion de « logement décent » ? Dans quels cas sommes-nous en présence d’un logement indécent et quelles sont les sanctions applicables ?
Notion de logement décent
L’obligation pour le bailleur de délivrer un logement décent est prévue à l'article 1719 du Code civil qui dispose que :
« Le bailleur est obligé par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent, d’entretenir la chose louée en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée et d’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ».
La même obligation est rappelée et précisée par l'article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.
Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.
Les caractéristiques correspondantes sont définies par décret en Conseil d'État n° 2002-120 du 30 janvier 2002.
Mon cabinet est à votre disposition pour tous renseignements complémentaires.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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Pour qu'un logement soit décent, il doit satisfaire à certaines conditions liées à la sécurité physique et à la santé des locataires.
Elles concernent notamment la nature des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement, les branchements de gaz et d'électricité et les équipements de chauffage, les dispositifs d'ouverture et de ventilation, etc...
Le logement doit être doté d'éléments d'équipement et de confort nécessaires à l'habitation.
Les réseaux et branchements d'électricité et du gaz ainsi que les équipements de chauffage et de production d'eau chaude doivent être conformes aux normes de sécurité définies par les lois et les règlements.
Lorsque l'installation électrique n'est plus aux normes actuelles, le locataire ne peut exiger une mise en conformité, sauf s'il démontre la dangerosité de l'installation (CA Paris, 6e ch. B, 27 mars 2003, Conte c/ SCI Imefa).
Il a pu être jugé dans un arrêt du 4 mai 2010 que « le bailleur n’a pas respecté son obligation de délivrance d’un logement décent qui constitue l’habitation principale du preneur, dès lors que le logement ne satisfait plus, en raison de sa vétusté, aux normes minimales de confort et d’habitabilité auxquelles doivent répondre les lieux mis en location » (Cass. 3e civ., 4 mai 2010, no 09-13.281).
Le décret précise que le logement qui fait l'objet d'un arrêté d'insalubrité ou de péril ne peut être considéré comme un logement décent.
Cette obligation de décence, comme l'obligation de délivrance, doit être considérée comme impérative.
L’obligation à la charge du bailleur de délivrer un logement en bon état
L’article 1720 du Code civil dispose que « le bailleur est tenu de délivrer la chose «en bon état de réparation de toutes espèces».
L'obligation, pour le bailleur, de délivrer une chose en bon état de réparations de toute espèce n'a pas besoin d'être stipulée expressément.
La nature du contrat suffit à suppléer le silence éventuel des parties.
Cette obligation de délivrance en bon état doit s'entendre très largement et concerne les réparations de toute espèce que le bailleur doit avoir réalisées. Il n'y a pas à distinguer entre réparations locatives et grosses réparations.
Il incombe au bailleur de prendre les initiatives nécessaires pour rendre la chose louée propre à l'usage auquel elle était destinée dans la convention des parties.
Preuve de l’absence de logement décent
Le locataire est tenu d’adresser une mise en demeure au bailleur de remédier aux désordres affectant les lieux loués.
Il a pu être jugé qu’ « en l’absence de mise en demeure du bailleur par le locataire de remédier aux désordres affectant les lieux loués, ce dernier ne justifie pas d’un manquement du bailleur à son obligation de délivrance et doit être, en conséquence, débouté de sa demande de réfaction du loyer » (Cass. 3e civ., 8 juill. 2009, no 08-14.846, D).
Sanctions de l’inexécution de l'obligation de délivrance
En vertu de l'article 1184 du Code civil, la partie à un contrat synallagmatique, envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts (Cass. soc., 8 juin 1956 : Bull. civ. 1956, IV, n° 535).
En cas d'indécence, le locataire peut à tout moment demander la mise en conformité du logement.
A défaut d'entente, et après saisine facultative de la commission départementale de conciliation, le juge peut être saisi et peut déterminer la nature des travaux ainsi que leur délai d'exécution au besoin sous astreinte (CA Lyon, 8e ch., 30 juin 2009, Brossard c/ Fritz).
Il peut aussi réduire le montant du loyer ou suspendre, avec ou sans consignation son paiement et la durée du bail jusqu'à l'exécution des travaux ordonnés.
À ces sanctions classiques, il est toujours possible de substituer un simple dédommagement pour le préjudice subi (Cass. 3e civ., 3 avr. 1997, n° 94-19.419 : JurisData n° 1997-001532).
Dans un arrêt du 28 avril 2009, les juges ont estimé que « le bailleur qui délivre au locataire un logement insalubre et impropre à sa destination ne respecte pas son obligation de délivrance et ne peut, en conséquence, prétendre au paiement d’un loyer qui ne serait pas causé ni retenir le dépôt de garantie versé par le locataire » (Cass. 3e civ., 28 avr. 2009, no 08-11.749, D).
Le preneur n'a pas obtenu la contrepartie du paiement des loyers, ce qui légitime qu'il ne paye pas.
Lorsque le logement n’est pas décent, « le bailleur n'est pas tenu de fournir un autre logement au locataire » (CA Besançon, 2e ch., 16 déc. 2003, Mesloub c/ OPAC de Haute-Saône.
« La proposition de relogement du bailleur ne permet pas d'échapper aux travaux de mise en conformité » (Cass. 3e civ., 15 déc. 2004, no 02-20.614).