L'obligation de non ingérence du banquier: anomalies apparentes et dépenses anormales

Publié le Modifié le 04/07/2016 Vu 14 289 fois 0
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Le banquier émetteur de la carte bancaire a des obligations envers le titulaire de cette carte bancaire. La banque, prestataire émetteur de la carte bancaire, est tenu d'une obligation de non-ingérence dans les affaires de son client. Cette obligation doit permettre au banquier de vérifier l'absence de caractère anormal des dépenses et l'absence d'anomalies apparentes. Dans un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de Cassation le 1er juillet 2003, il s'agissait d'achats effectués en Thailande par cartes de crédit. En effet, la Cour de Cassation a considéré que l'établissement de crédit est tenu d'une obligation de diligence envers ses clients.

Le banquier émetteur de la carte bancaire a des obligations envers le titulaire de cette carte bancaire. La

L'obligation de non ingérence du banquier: anomalies apparentes et dépenses anormales

Le banquier émetteur de la carte bancaire a des obligations envers le titulaire de cette carte bancaire. La banque, prestataire émetteur de la carte bancaire, est tenu d'une obligation de non-ingérence dans les affaires de son client. Cette obligation doit permettre au banquier de vérifier l'absence de caractère anormal des dépenses et l'absence d'anomalies apparentes.

Dans un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de Cassation le 1er juillet 2003, il s'agissait d'achats effectués en Thailande par cartes de crédit.

En effet, la Cour de Cassation a considéré que l'établissement de crédit est tenu d'une obligation de diligence envers ses clients.

La Cour d'Appel a retenu que les conditions générales d'utilisation des cartes qui réservaient à la société émettrice le droit de refuser l'autorisation de paiement si la dépense prescrite a un caractère anormal ou inhabituel constitue une simple faculté.

Alors que selon la Cour de Cassation, il aurait fallu rechercher si la société de crédit n'avait pas commis de faute et si les dépenses en cause, en l'absence de plafond présentaient à l'examen du compte carte un caractère anormal ou inhabituel.

La Cour de cassation dans un autre arrêt a considéré qu'en l'absence d'anomalies apparentes le banquier n'est pas responsable (Cass. com., 16 oct 2012).

Tout d'abord une précision qui est utile:

Le terme accepteur désigne tout commerçant au sens du Code de commerce mais également tout prestataire de services, toute profession libérale susceptible d'utiliser le système de la carte bancaire.

                        I. Obligation de non ingérence

Chaque utilisation de la carte par le titulaire, dans l'hypothèse de l'achat d'un bien ou d'un service, constitue un ordre de paiement donné par celui-ci à l'émetteur en faveur de l'accepteur (article L. 133-3-II du Code monétaire et financier).

L'ordre de paiement donné par le titulaire de la carte est irrévocable.

                      A. Le caractère anormal des opérations

En l'absence de caractère manifestement anormal des opérations, la banque tenue d'une obligation de non-ingérence dans les affaires de son client, n'a pas à analyser:

- la nature,

- la fréquence,

- la date,

- le lieu des opérations effectuées sur le compte de ce dernier.

La banque n'a pas l'obligation de comparer les opérations effectuées sur le compte du titulaire de la carte avec celles réalisées précédemment.

La banque doit veiller à la validité de l'ordre de l'opération. Elle vérifie que l'opération émane du titulaire de la carte et elle peut contrôler la conformité de l'opération.

L'émetteur doit apporter la preuve qu'une opération a été correctement authentifiée, enregistrée et comptabilisée (L. 133-23 du Code monétaire et financier).Pour une opération de paiement qui a donné lieu à la signature d'une facturette (c'est le cas des achats à l'étranger), la preuve de la réalité de l'achat par le titulaire est apportée par le ticket signé par le client. L'accepteur doit alors vérifier la conformité de la signature du ticket avec celle figurant au verso de la carte (Cass. com., 21 mai 1996). Dans l'hypothèse d'une opération de paiement validée par le code confidentiel, la preuve éléctronique est admissible (Cass. 1re civ, 8 nov 1989; Cass. com, 2 déc 1997).Eu égard à l'arrêt de la Cour de Cassation rendu le 1er juillet 2003, la banque est tenu de vérifier si les dépenses effectuées par carte bancaire ne présentent pas un caractère anormal ou inhabituel, en l'absence de plafond. Il faut aussi rechercher si la banque a commis une faute selon la Cour de Cassation. Dans le cas où les dépenses présenteraient un caractère anormal ou que la banque est commis une faute, sa responsabilité peut être engagée.

                              B. Les anomalies apparentes

Le banquier est tenu de relever les anomalies apparentes ( Cass. com., 25 avr. 1967; Cass. com., 3 janv. 1977; Cass. com., 11 janv. 1983).

La Cour de Cassation a justifié sa décision de rejet en estimant que la Cour d'Appel qui, après avoir relevé que le compte était largement créditeur et que l'anomalie ne pouvait être caractérisée d'apparente s'agissant d'un compte d'entrepreneur aux nombreux mouvements, a fait ressortir l'absence d'anomalies apparentes dans le fonctionnement du compte (Cass. com., 16 oct. 2012).

 L'anomalie apparente est celle qui ne doit pas échapper au banquier normalement vigilant. Par exemple, il peut s'agir:

- d'endos irréguliers,

- grattages,

-surcharges,

- répétitions systématiques d'opérations laissant deviner le caractère illicite des opérations (CA Amiens, 24 févr. 1969),

- le nombre anormalement important de titres aux porteurs présentés par une personne endettée (Cass. 1re civ., 8 févr. 1983),

- mouvements bancaires anormaux qui laissent soupçonner des détournements de fonds par un administrateur (Cass. com., 11 janv. 1983),

-chèque remis à l'encaissement avec l'endossement de l'URSSAF, alors que cet organisme n'endosse qu'à des banques (CA Paris, 1er févr. 1966),

- ordre de paiement émis par les parents après les 18 ans de leur enfant alors que l'administration légale des biens du mineur cesse de plein droit à sa majorité (Cass. 1re civ., 9 janv. 2008).

 Ces anomalies appellent de la part du banquier un surcroît de vigilance et d'investigations (Cass. 2e civ., 5 mai 1975; Cass. com., 30 oct. 1984; CA Bordeaux, 17 févr. 1986).

La jurisprudence a pu considéré qu'au regard de la nature de l'opération, l'existence d'un découvert n'était pas à elle seule un motif d'alerte et en l'absence de tout élément lui donnant connaissance d'agissements irréguliers et de toute anomalie apparente dans le mode de fonctionnement du compte, la banque n'avait pas manqué à son obligation de surveillance et de conseil (Cass. com., 20 nov. 2001).

       II. Responsabilité de l'émetteur en cas d'inexécution ou d'exécution fautive

Il faut établir le lien de causalité entre le manquement et le préjudice allégué. Les cas de responsabilité du prestataire émetteur, autrement dit la banque:

- l'exécution de l'opération de paiement (l'article L. 133 22 du Code monétaire et financier),

- la perte directe subie par le titulaire, en cas de paiement par carte mal exécuté (CA Versailles, 15e ch. sect. B, 11 mai 2001),- l'exécution défecteuse de la comptabilisation d'opération d'achats ou de retraits qui peut donner lieu à réparation de la part de l'émetteur,

- les opérations effectuées sans le consentement du titulaire, dans cette hypothèse l'émetteur doit prendre toutes les mesures de nature à protéger les données confidentielles concernant le titulaire tel que le code confidentiel, algorithme donnant le numéro des cartes (ceci est prévu par la Recommandation européenne de 1988).

L'émetteur doit indemniser le titulaire sauf si ce dernier a été averti au préalable du dysfonctionnement (C. monét. fin., art. L. 133-10). Cas où l'émetteur n'est pas responsable:

Le refus constitue pour le prestataire émetteur de la carte un cas de force majeure comme prévu à l'article L. 133-5 du Code monétaire et financier, lorsque le refus de recevoir une carte de paiement est celui d'un accepteur, qui n'est pas le titulaire de la carte. L'émetteur n'est pas responsable du comportement de l'accepteur.

La faute de la victime permet d'atténuer la responsabilité de la banque dans le cadre des anomalies apparentes (Cass. com., 10 juin 1980; Cass. com., 27 avr. 1982).

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Joan Dray

Avocat à la Cour

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